Critiques Cinéma

BLACK PANTHER : WAKANDA FOREVER (Critique)

SYNOPSIS: La Reine Ramonda, Shuri, M’Baku, Okoye et les Dora Milaje luttent pour protéger leur nation des ingérences d’autres puissances mondiales après la mort du roi T’Challa. Alors que le peuple s’efforce d’aller de l’avant, nos héros vont devoir s’unir et compter sur l’aide de la mercenaire Nakia et d’Everett Ross pour faire entrer le royaume du Wakanda dans une nouvelle ère. Mais une terrible menace surgit d’un royaume caché au plus profond des océans : Talokan.

 A cause de son succès considérable mais surtout à cause de l’écho qu’il eut dans la communauté noire américaine dépassant le cadre strict du divertissement pour porter un message culturel voire politique fort, donner une suite à Black Panther a toujours été une entreprise difficile. Mais le décès tragique de son interprète principal Chadwick Boseman fauché par le cancer à 43 ans ajoute une dimension supplémentaire, la nécessité d’honorer sa mémoire sans l’exploiter. Mais comment continuer l’histoire d’un personnage majeur du MCU dont l’interprète n’est plus là ? Les producteurs Kevin Feige et Nate Moore et le réalisateur scénariste Ryan Coogler ont fait le choix, par respect pour Boseman,  de ne pas recaster le rôle. T’Challa est donc mort avec son interprète mais dés lors vers quel horizon orienter cette suite?  Coogler et son coscénariste Joe Robert Cole font le choix de faire de Black Panther: Wakanda Forever un film choral qui repose sur les femmes du Wakanda (Shuri, la reine Ramonda, les Dora Milaje). La gestion de la mort de Chadwick Boseman dans l’univers du film est faite avec beaucoup de goût et les funérailles de T’Challa sont un moment qui donne le ton à tout le film. Dans le monde fictionnel du MCU on comprend que maintenant que son roi et protecteur étant décédés, le pays est vulnérable. Les autres puissances tournant autour de lui comme des vautours  pour essayer de s’emparer de sa précieuse ressource : le vibranium. Croyant le Wakanda sans défense, diverses nations tentent des incursions , mais la reine Ramonda (une féroce Angela Bassett) ne tarde pas à démontrer aux envahisseurs que Black Panther n’était pas la seule ligne de défense de son pays. Cependant, la princesse Shuri (Letitia Wright) ne se remet pas de la perte  de son grand frère, son tuteur et idole, s’enfonçant dans la technologie et évitant la tradition. Mais quand le mystérieux Namor (Tenoch Huerta ), le roi de Talokan – une ancienne civilisation sous-marine apparaît au cœur du  Wakanda,  avec une menace : que le Wakanda se débarrasse d’une jeune scientifique américaine Riri Williams (Dominique Thorne) qui a mis au point une technologie pour détecter le vibranium  et a localisé une partie du précieux minerai au fond de l’océan menaçant de révéler l’existence de Talokan  sous peine de représailles, Shuri  va devoir assumer ses responsabilités sous peine d’entrainer son pays dans la guerre.

Black Panther: Wakanda Forever marque l’entrée dans le MCU d’un des plus anciens (il a été créé en 1939) et célèbres personnages de Marvel Comics Namor The Sub-Mariner incarné par le comédien mexicain Tenoch Huerta Mejía . La façon remarquable, dans sa conception et son exécution, avec laquelle Coogler et son coscénariste  ont introduit  et adapté le personnage  et sa civilisation sous-marine  dans le MCU constitue la grande réussite du film. Sans doute en partie parce que Aquaman les avaient devancé dans la visualisation de l’interprétation classique « greco-romaine » d’Atlantis cette réinterprétation inspirée des cultures mésoaméricaines (maya, aztèques, toltèques) est mue par la volonté d’offrir aux communautés latino-américaines, comme avec le Wakanda pour la communauté noire, un bastion fictionnel et faire entrer  leurs cultures traditionnelles dans la pop-culture. En mêlant des événements historiques réels au fantastique, ils nous rendent plus concrète cette civilisation sous-marine et la rattache à la thématique du colonialisme. Cette réinterprétation est intelligente car elle parvient à conserver les fondamentaux visuels et comportementaux des comics. C’est un plaisir de fan de voir le personnage à l’écran avec son look emblématiques et ses ailettes au pied ! Huerta relève le défi de succéder au personnage de Killmonger un des meilleurs bad-guys du MCU imprégnant Namor d’une menace tranquille, d’un charme et d’une motivation qui fait de lui un anti-héros complexe plutôt qu’un pur vilain. Shuri et Namor ont une admiration mutuelle pour les empires respectifs mais cela n’enlève rien à son pouvoir qui le place au-dessus de la plupart des antagonistes du MCU. Black Panther: Wakanda Forever  introduit également à l’écran le personnage de Riri Williams / Ironheart qui tiendra bientôt la vedette de sa propre série sur Disney plus. Si  la jeune Dominque Thorne apporte de la sympathie à Riri, c’est un personnage  qui souffre sans doute le plus des modifications du scénario à la suite du décès de Boseman . On imagine que celui-ci aurait dû tenir le rôle de mentor qu’occupait Tony Stark auprès de Peter Parker dans Civil War . Shuri trop proche en âge et en caractère ne peut remplir cette fonction et le personnage se trouve trop souvent livré au statut de McGuffin à l’image du personnage d’America Chavez dans Doctor Strange et le multivers de la Folie. Leticia Wright doit porter la majeure partie de Black Panther: Wakanda Forever avec Angela Bassett et Huerta en renfort. C’est beaucoup à assumer pour une jeune actrice et sa performance est solide. Elle nous fait comprendre les réactions de Shuri  tout au long du film,  ce chagrin qui se transforme en colère même si elle n’a pas tout le charisme que sa nouvelle position nécessite . Le massif Winston Duke dans le rôle de M’Baku  compose un personnage truculent qui apporte une touche d’humour au film. Okoye incarnée par  Danai Gurira (l’interprète de Michonne dans la série The Walking dead)  a un arc intéressant  même si elle tend à s’effacer dans la deuxième partie du film. La prometteuse Aneka (Michaela Coel) est également sous-utilisée. Martin Freeman est de retour dans  le rôle de Everett K.Ross   mais son personnage sert ici essentiellement de tissu conjonctif avec les futurs films du MCU.

Avec l’original, Black Panther: Wakanda Forever est  sans doute le plus beau film du MCU. La direction artistique d’ Hannah Beachler est majestueuse, sa conception de Talokan honore et intègre des éléments issus des cultures méso-américaines comme elle l’avait fait des cultures africaines dans son design du Wakanda. Les costumes de Ruth Carter ont le même niveau d’excellence, que ce soit les atours impériaux de Namor ou  le costume de la nouvelle Black-Panther.  Le travail de la nouvelle directrice de la photographie Autumn Durald Arkapaw  (la série Loki) est superbe, elle signe certains des plus beaux plans à ce jour dans le MCU, en particulier lors de la merveilleuse séquence sous-marine à Talocan. On reproche assez souvent, parfois à raison, aux productions Marvel Studios pour ne pas apprécier la gravité et la solennité qu’apporte Ryan Coogler. Il exploite parfaitement la peur qu’engendre les profondeurs insondables de l’océan dans les séquences impliquant les redoutables guerriers Talokans. L’attaque  du bateau d’exploration océanique annoncée par un étrange chant de sirène est cauchemardesque. Ses scènes de combat sont intenses, étonnamment brutales et il a sans doute tiré les leçons du premier film jamais embourbé par trop de CGI approximatifs. L’amour que toutes les personnes impliquées dans la production avaient pour Boseman se ressent mais cette charge émotionnelle empêche le film de se concentrer pleinement sur ses enjeux.  En dépit d’un univers richement construit et peuplé, de thématiques émotionnelles et politiques intéressantes Black Panther: Wakanda Forever  a besoin de trop d’éléments et d’informations disparates  pour parvenir à construire une intrigue qui ait du sens. Black Panther: Wakanda Forever même si certaines séquences fonctionnent très bien, est  maladroit en termes de structure de l’intrigue, de rythme et d’exécution. Paradoxalement malgré sa durée (deux heures et quarante et une minutes qu’on ressent malheureusement parfois) certains concepts et personnages n’ont pas la possibilité de se développer aussi complètement qu’ils le pourraient. Wakanda Forever a aussi tendance à reproduire des séquences d’autres films, le sauvetage initial de Riri ressemble la poursuite en voiture de Black Panther, le désir de représailles d’un personnage rappelle l’arc de T’Challa dans Civil War. Ryan Coogler et son équipe ont fait un travail incroyable en concevant le Wakanda et Talokan Talokan des lieux majestueux, impressionnants et  d’une grande beauté  si bien que, si le choix du décor du final a du sens dans le contexte de l’histoire il le prive de la dimension épique que voudraient lui donner ses concepteurs. Le montage de Kelley Dixon (les séries Breaking Bad et Obi Wan),  Jennifer Lame (Tenet, Midsommar), Michael P. Shawver (Creed, Black Panther) peine à donner à Black Panther: Wakanda Forever  un rythme assez dynamique pour  propulser l’intrigue privant d’urgence les séquences d’action. En conclusion malgré un superbe travail de conception artistique et un antagoniste d’anthologie les ambitions contradictoires de Black Panther: Wakanda Forever  qui veut concilier la fresque épique de super-héros et la célébration de la mémoire de Chadwick Boseman, l’empêche d’atteindre tout son potentiel.

Titre Original: BLACK PANTHER WAKANDA FOREVER

Réalisé par: Ryan Coogler

Casting : Letitia Wright, Lupita Nyong’o, Danai Gurira, Winston Duke, Tenoch Huerta Mejía…

Genre: Action, Fantastique

Sortie le: 9 Novembre 2022

Distribué par : The Walt Disney Company France

BIEN

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