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ATLANTA (Critique Saison 1) Du magique dans la vie de tous les jours

4 STARS EXCELLENT

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SYNOPSIS: Deux cousins se tournent vers la scène rap d’Atlanta. Mais leurs points de vue opposés sur la différence entre art et commerce, le succès et les races ne vont pas leur faciliter la tâche.

C’est le projet chéri de Donald Glover, petit génie de la comédie américaine ayant décroché son premier job en tant que scénariste à l’âge de 22 ans, et ce pour une série qui en 2006 était encore en période de gestation sous la houlette de Tina Fey mais qui allait faire beaucoup parler d’elle : l’excellent 30 Rock. L’un des personnages de la série, Kenneth Parcell (interprété par Jack McBrayer) est un jeune homme naïf à peine éclos de sa Georgie natale. Glover ayant lui aussi grandi à Stone Mountain, en Géorgie, c’est donc lui qui est charge de Kenneth et qui lui concocte ses meilleures blagues. Mais écrire des sketches n’est pas le seul talent de Glover qui se révèle être un excellent acteur, notamment avec son rôle culte dans la sitcom Community et qui a également sorti trois albums de hip-hop sous le nom de Childish Gambino. Pour son premier projet en tant que créateur et showrunner, Glover s’entoure de collaborateurs de longue date : son frère Stephen Glover qui participe à l’élaboration des scripts et à l’écriture des textes de rap, Hiro Murai qui signe la réalisation de la majorité des épisodes et le producteur Paul Simms que Glover a sans doute rencontré en tournant dans la saison deux de Girls sur HBO. Bref c’est une famille solidaire que celle d’Atlanta, la nouvelle série de FX qui s’impose dès les premières minutes du pilote comme LA nouvelle série à ne pas rater.

Les choses sont loin d’être au beau fixe pour Earnest « Earn » Marks (Donald Glover). Il est paumé, au chômage, avec un compte en banque à sec et un futur incertain au milieu d’une relation très compliquée avec Van (Zazie Beets), la mère de sa fille qui le laisse dormir chez elle puisqu’il s’est fait virer de chez ses parents. Et puis un jour, son cousin Alfred « Paper Boi » Miles (Bryan Tyree Henry) se fait remarquer sur le Net avec son single éponyme, et voilà qu’Earns se dit que son rappeur de cousin va bien avoir besoin d’un manager pour l’aider à gérer sa carrière. Le voilà donc à essayer de réparer les pots cassés avec Alfred qui traîne avec une espèce de gugusse évaporé du nom de Darius (Keith Stanfield), et ces trois-là vont se retrouver compagnons de fortune dans la banlieue miteuse d’Atlanta et tenter de s’extirper de la médiocrité de leur situation. C’est tout à fait le genre de pitch qui aurait pu rapidement se dégrader et tourner à la caricature mais grâce aux performances des trois acteurs principaux, la série s’envole bien au-delà des clichés pour atteindre un coin de la stratosphère qui n’appartient vraiment qu’à elle, une espèce de mashup de l’esthétique des frères Coen et de la culture hip-hop.

Diffusée sur FX depuis Septembre 2016 et maintenant auréolée de deux Golden Globes (Meilleure Série Comique et Meilleur Acteur de Série Comique pour Donald Glover), Atlanta n’a pas volé ses accolades. Intelligente, fine, dotée d’un ton bien à elle et d’un vrai point de vue qui se permet d’être subtilement politique sans être pontifiant ou indigeste, la série réussit l’exploit d’être à la fois extrêmement réaliste et franchement surréaliste, juxtaposant des problèmes tellement quelconques qu’ils en paraissent insignifiants (le manque d’argent, les relation amoureuses, comment donner un sens à sa vie) à de grands thèmes sur l’art, l’amour et ce qu’il faut pour survivre dans le Sud des États-Unis quand on n’est pas Blanc, riche ou particulièrement privilégié. Certains critiques ont qualifié Atlanta de conte de fée, et s’il est indéniable que la série dégage un certain enchantement, sa grande force réside davantage dans sa capacité à introduire du magique dans la vie de tous les jours que dans une propension à se tirer d’un pétrin scénaristique grâce à l’intervention du surnaturel. Un procédé qui n’aurait sans doute pas déplu à Baudelaire et qui inscrit d’office Donald Glover dans la grande lignée des poètes modernes. A voir. Absolument.

Crédits: FX

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