Critiques Cinéma

GODZILLA II ROI DES MONSTRES (Critique)

3,5 STARS TRES BIEN

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SYNOPSIS: L’agence crypto-zoologique Monarch doit faire face à une vague de monstres titanesques, comme Godzilla, Mothra, Rodan et surtout le redoutable roi Ghidorah à trois têtes. Un combat sans précédent entre ces créatures considérées jusque-là comme chimériques menace d’éclater. Alors qu’elles cherchent toutes à dominer la planète, l’avenir même de l’humanité est en jeu…

Il y a un paradoxe à voir que Warner Bros. qui recherche éperdument un « univers partagé » cohérent capable de concurrencer le MCU, peine à le faire émerger avec les adaptations des DC comics pourtant bâtis sur un univers clé en mains  y parvient  avec son univers de monstres développé avec Legendary Pictures avec  Godzilla en  2014  puis Kong Skull Island en 2017 et avant Godzilla vs. Kong qui sortira en 2020. La mise en scène de ce Godzilla II Roi des monstres, suite directe du film de Gareth Edwards (les événements de Skull Island se déroulant des décennies avant les deux films) est  confiée à un réalisateur sans expérience dans la gestion de gros budgets, ici Michael Dougherty qui commença sa carrière comme scénariste pour Bryan Singer  (X-Men 2, Superman Returns) avant de signer deux films fantastiques à moyen budget (un film à sketchs autour d’Halloween inédit en France mais qui bénéficie d’une belle réputation outre-atlantique Trick ‘r Treat et Krampus sur le père fouettard). Il signe à la fois la mise en scène et le scénario avec son co-scénariste de Krampus Zach Shields à partir d’un traitement signé Max Borenstein le showrunner de la franchise. Dougherty développe  la mythologie des monstres géants  amorcée dans le film précédent et Kong Skull Island dévoilant un peu plus de la structure et des moyens de Monarch la cabale secrète qui étudie ses monstres depuis des décennies (l’équivalent du SHIELD pour le MCU). On  retrouve l’organisation et ses membres émérites Dr. Ishiro Serizawa et le Dr. Vivienne Graham, Ken Watanabe (Inception, Le dernier samouraï) et Sally Hawkins (La forme de l’Eau) reprenant leurs rôles, sous le feu des critiques du gouvernement US,  après  la révélation catastrophique de l’existence des MUTO (Massive Unidentified Terrestrial Organism traduit en français par Mutant Ultime Terrestre d’Origine inconnue) rebaptisés titans. Alors que la traque de Godzilla se poursuit, on apprend que l’organisation a  localisé et emprisonné des dizaines de ces créatures encore dormantes quand une de leur scientifique le Dr. Emma Russell (Vera « Conjuring » Farmiga) qui a mis au point un système capable de les  contrôler est kidnappée avec sa fille Madison (Millie Bobby Brown la révélation de Stranger Things)  par l’éco-terroriste Jonah Alan (Charles Dance) déterminé  à libérer les créatures. Monarch enrôle son ex-mari  Mark Russell (Kyle Chandler) père de Madison  et ancien membre de l’organisation pour les retrouver avant qu’il ne soit trop tard.

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Godzilla II Roi des monstres troque l’approche semi-réaliste du premier film qui liait l’apparition des monstres à un incident nucléaire industriel faisant écho à la catastrophe de Fukushima pour un esprit pulp (on y croise d’antiques cité sous-marines et on évoque la théorie de la terre creuse) qui privilégie leur aspect mythologique. Dougherty en fait d’anciens dieux Lovecraftiens qui se réveillent et reprennent leurs droits sur la planète que l’Homme qui leur a succédé en haut de la chaîne alimentaire  a ravagé durablement. Il fait ainsi de ces symboles de destruction  des instruments de vie et de renaissance réponses à la crise écologique. Godzilla est traité à la fois comme un animal, prédateur alpha mais aussi comme un protecteur qui doit faire face aux cotés de Mothra une mite géante (pas de contrepèteries s’il vous plait !) à d’autres créatures cultes du panthéon du Kaiju-Eiga  : Rodan  (un ptérosaure mutant long d’une centaine de mètres volant à la vitesse d’un avion apparu pour la première fois dans un film de Ishirô Honda créateur  de Godzilla en 1956) et à son ennemi juré King Ghidorah un dragon ailé tricéphale d’origine extra-terrestre.  Contrairement au film de Gareth Edwards, Godzilla II Roi des monstres s’abandonne complètement au kaiju-porn, là où le réalisateur de Rogue One gérait les apparitions de sa « vedette » avec parcimonie, Dougherty révèle rapidement ses titans avant d’enchaîner une série d’affrontements massifs et dévastateurs à une échelle ahurissante qui occupent la majeure partie du métrage.

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Godzilla II Roi des monstres conserve néanmoins ses choix atmosphériques et le même soin pictural apporté à chaque plan. Lawrence Sher directeur de la photographie attitré de Todd Philips depuis Very Bad Trip (et bientôt sur Joker) qui a toujours donné à leurs comédies une vraie patine visuelle (si  Hangover 2 est le moins drôle de la série il est visuellement somptueux ) livre ici son travail le plus abouti, donnant à chaque bataille une texture particulière créant des atmosphères surréalistes tour à tour bleutées éclairées par  la bioluminescence de Mothra, jaunes ou écarlates  composant ses scènes de bataille comme des  toiles digne de figurer dans un musée ou au moins comme fond d’écran d’ordinateur ! Scott Chambliss (Les gardiens de la galaxie Vol. 2, Star Trek, Tomorrowland) signe des décors hi-tech à une échelle monumentale. Le montage agressif signé par des vétérans du film de monstres  comme Bob Ducsay  (déjà à l’œuvre sur le premier et qui signa ceux de la  Momie ou Van Helsing), de la destruction massive comme Roger Barton (le montage des films de Michael Bay depuis Bad Boys II) et du cut furieux tel Richard Pearson (Quantum of Solace ,Vol 93) soutient un rythme  qui maintient l’équilibre entre la fluidité du récit et le chaos des combats mais qui s’avère épuisant. La répétition des séquences d’affrontements monumentals mithridatise le public et leur faisant perdre en efficacité. Dans un sens Michael Dougherty tombe dans le travers contraire à celui de Gareth Edwards qui avait choisi de jouer, peut-être trop, sur la frustration du spectateur ne révélant sa vedette que par petites touches au long du film laissant des batailles se dérouler hors-champ ou entrevus par le biais de flashes télévisés pour  préserver l’impact de son final. En abandonnant la retenue d’Edwards, Dougherty dont la mise en scène, moins percutante que celle de Jordan Vogt-Roberts sur Skull Island,  a du mal parfois à maintenir l’intensité à chaque combat.

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Le film emploie un peu du même fétichisme guerrier que celui de Roland  Emmerich dans Independance Day (ou son Godzilla) mais contrairement aux productions patriotiques de l’allemand, si Monarch et les militaires US déploient une force de frappe technologique impressionnante elle est sans effet devant la puissance primordiale qu’incarnent les créatures. Les protagonistes humains, scientifiques et militaires, malgré un casting international composés de comédiens de qualité (Ziyi Zhang, O’Shea Jackson Jr., Charles Dance) ont peu à jouer en dehors de  la gravité et de la stupéfaction. Pour nous impliquer malgré tout  Dougherty comme Edwards utilise le ressort de la famille désunie qui doit se retrouver au  milieu du chaos. Si le personnage de Kyle Chandler n’est pas vraiment étoffé le comédien apporte son charisme naturel pour combler son manque de caractérisation. Le scénario utilise intelligemment l’ambiguïté dont est capable Vera Farmiga pour apporter un peu d’imprévisibilité. Millie Bobby Brown très mise en avant dans la promotion du film est loin d’avoir un rôle central. Si dans l’ensemble le scénario maintient un équilibre entre le premier degré nécessaires pour imposer les enjeux du film d’aventures et le second degré  l’emploi de deux comic-reliefs Thomas Middleditch (Silicon Valley) et Bradley Whitford (Get out) est  assez maladroit. Comme jadis Raymond Burr dans la version américaine du Godzilla original, le personnage de Ken Watanabe  apporte un surplus de gravité et son Dr. Ichiro Serizawa qui comprend le monstre mieux que quiconque, est un lien direct avec les origines du mythe. Dans la droite ligne du précédent film le design et l’animation des créatures sont très réussies leur donnant une authentique personnalité  et une ampleur majestueuse tout en conservant un peu du charme des tokusatsu (effets spéciaux japonais employés dans les films originaux). Godzilla a subi une légère modification, son nouveau design présentant plus de protusions ressemble davantage aux incarnations antérieures. Bear McCreary (The Walking Dead , Outlander) signe une bande originale massive et tonitruante qui reprend certains motifs des thèmes originaux d’Akira Ifukube. Ceux qui regrettaient la discrétion des combats de monstres du film d’Edwards seront ravis par le massif mais épuisant Godzilla II Roi des monstres à la mise en scène  moins inspirée que celle de son prédécesseur mais qui conserve  à l’image des précédents volets du Monsterverse un bel esprit pulp et demeure un gros divertissement tout à fait honorable.

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Titre Original: GODZILLA KING OF THE MONSTERS

Réalisé par: Michael Dougherty

Casting : Vera Farmiga, Kyle Chandler, Millie Bobby Brown

Genre: Aventure, Fantastique, Action

Sortie le: 29 mai 2019

Distribué par: Warner Bros. France

3,5 STARS TRES BIENTRÈS BIEN

3 réponses »

  1. Merci beaucoup pour cette critique qui donne bien envie! J’avais été un peu sur ma faim sur Godzilla 1 bien que je n’en attendais pas grand chose mais avait bien kiffé Skull Island qui effectivement assumait son côté pulp et la mythologie autour de la Terre creuse. Du coup, avec ces visuels très chouettes qui semblent tendre vers le magnifique Pacific Rim ca donne envie d’y aller. Et ce que tu dis sur la capacité de Warner à produire des univers partagés est selon moi bien lié aux producteurs: Legendary a depuis longtemps montré son talent à rendre intéressants des films improbables sur le papier alors que DC a un gros problème de direction dans son projet. Le DCU c’est Kevin Feige. Aussi simple que cela..

  2. (evilashymetrie) Ahah, voilà une critique qui donne envie. Bref, comme j’avais été frustré par le 1er film et que je veux voir des monstres titanesques se mettre sur la gueule, ce film semble être fait pour moaaaa :p

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