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GODZILLA (Critique)

4,5 STARS TOP NIVEAU

GODZILLA AFFICHE

Le tweet de sortie de projo:

tweet godzilla

SYNOPSIS: Godzilla tente de rétablir la paix sur Terre, tandis que les forces de la nature se déchaînent et que l’humanité semble impuissante…

Au début, personne n’y croyait. Une nouvelle adaptation de Godzilla seize ans après le divertissant mais très inoffensif et dispensable blockbuster de Roland Emmerich se justifiait-elle ? Motivation mercantile au premier plan ou réelle ambition de redorer le blason du mythe Godzilla aux États-Unis ? Confiée à l’inexpérimenté Gareth Edwards, néanmoins auteur de Monsters, petit film SF low-budget particulièrement malin et garni d’envolées lyriques saisissantes, ce reboot de Godzilla au budget mastodonte a commencé à intriguer et faire saliver dès les premières annonces de casting : Bryan Cranston, Aaron Taylor-Johnson et Elizabeth Olsen seront les héros, ainsi que – grosse surprise – la frenchy Juliette Binoche. L’attente est montée d’un cran après parution en ligne d’une bande-annonce impressionnante dévoilant peu le monstre pour se concentrer davantage sur l’aspect dramatique et l’impact psychologique d’une attaque grande ampleur sur une poignée d’êtres vivants. En somme, la promesse d’un film catastrophe comme on les aime, un spectacle poignant, respectueux du genre et de ses conventions.

GODZILLA 1Et le joyeux pressentiment devint réalité : Godzilla n’a rien d’un produit ciné lambda. Première heure surprenante au cours de laquelle Gareth Edwards prend judicieusement son temps pour développer une histoire humaine émouvante, bien soutenue par des réflexions intéressantes et pertinentes sur la perte d’un être cher, les cachotteries gouvernementales, la montée en puissance d’une menace, le besoin d’exorciser le trauma de la seconde guerre mondiale et de la bombe atomique. Dans ce cadre, Bryan Cranston et Aaron Taylor-Johnson, respectivement un physicien hanté par un psychotrauma et des secrets d’Etat, et son fils, militaire ayant quant à lui surmonté la tragédie. Tous deux se lancent, du Japon aux Etat-Unis, dans une croisade pour la vérité. Au programme : ambiance conspirationniste, analogie entre le monstre et les catastrophes naturelles, sous-texte écologique alarmant sur l’utilisation irréfléchie du nucléaire avec un propos fataliste et glaçant : Peu importe les mesures protectionnistes gouvernementales mises en place, la menace grandit et nous dépasse. Dès lors que le monstre surgit, Edwards nous rappelle en effet sans cesse où se situent les humains en prenant soin de cadrer l’action à hauteur d’homme et démontre avec virtuosité que la nature est indomptable. Dangers imminents, destruction massive, Godzilla se déploie.

GODZILLA 2Défendu par le jeune prodige Edwards comme une lettre d’amour au célèbre entertainer Spielberg – on comprend désormais pourquoi – Godzilla prend heureusement à contre-pied la tendance actuelle d’en mettre systématiquement plein la vue en s’amusant de la profondeur, de la même manière que Les Dents de la Mer ou Cloverfield, et en jouant à fond sur la frustration du spectateur pour iconiser son monstre. Idée couillue et tout à fait admirable. Les Dents de la Mer, parlons-en. Une cellule familiale en crise, faite d’être ordinaires déstabilisés par l’avènement d’un récit extraordinaire, le nom Brody utilisé en hommage à l’inoubliable « chef Brody », l’excellente composition musicale de Desplat, basée autour de notes très proche de celles de John Williams, la gestion incroyable des espaces avec un jeu hallucinant de perspectives et d’échelles pour intégrer la bête, les images dans l’image … on ne compte plus les références au chef d’oeuvre d’horreur du senseï Spielberg dans Godzilla. On pense aussi à La Guerre des Mondes évidemment, notamment cet absolu de noirceur dans le ton, décelable avec la dimension planétaire du génocide ou via le symbole de la machine plus forte que nous. Un plan somptueux où l’on aperçoit, à flanc de colline, un ciel bombardé de fumigènes est d’ailleurs éloquent pour comparer les deux œuvres. À l’instar de La Guerre des Mondes, Godzilla recèle de fait d’une vision du chaos et de l’apocalypse très picturale, à la beauté quasi crépusculaire : On ne parle pas ou à peine, on est fasciné, fatigué ; le spectacle est total, massif, et Aaron Taylor-Johnson reflète un spectateur ramené à lui-même face à un gigantisme dominant.

GODZILLA 3Authentique ode à l’imagination infantile, comme l’ont été Jurassic Park il y a presque 20 ans et Pacific Rim l’an dernier, Godzilla provoque l’émerveillement de l’éternel gamin qui sommeille en nous grâce à ses nombreux morceaux de bravoure. Exemple probant avec une magnifique scène de chute libre bercée par le célèbre Requiem de Györgi Ligeti – immortalisé grâce à 2001 : l’odyssée de l’espace – et indéniablement inspirée des tableaux de Gustave Doré. Outre l’hommage à tout un pan de la culture japonaise (Godzilla est le porte-drapeau du genre kaiju ega) et aux meilleurs spectacles estivaux (Spielberg, J.J. Abrams, Guillermo del Toro), c’est donc la vision d’un enfant rêveur qui se déroule sous nos yeux. Un enfant capable toutefois de métaboliser son fantasme sur grand écran grâce aux moyens octroyés : mise en scène accrocheuse, boulot considérable sur les effets spéciaux et les mouvements de Godzilla (le motion capturer Andy Serkis est crédité consultant, ceci explique cela), photo somptueuse aux accents funèbres, acting très juste (mention pour Elizabeth Olsen, touchante). Seul bémol peut-être, empêchant Godzilla d’être un chef d’œuvre : la dramaturgie du climax, qui aurait mérité un travail d’écriture plus fourni pour qu’il gagne en tension. S’il fait preuve d’une véritable richesse dans la forme (maestria formelle), Godzilla cuvée 2014 subjugue également l’audience par son propos de fond et sa mécanique, fidèle et respectueuse des codes du genre.

GODZILLA AFFICHE MINITitre Original: GODZILLA

Réalisé par: GARETH EDWARDS

Casting: Aaron Taylor-Johnson, Bryan Cranston, Elisabeth Olsen,

Juliette Binoche, Ken Watanabe, Sally Hawkins…

Genre: Science-Fiction, Action, Aventure

Sortie le: 14 Mai 2014

Distribué par : Warner Bros. France

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2 réponses »

  1. Séduit et convaincu par ce film également. Je n’avais pas réfléchi à l’hommage Spielbergien, mais maintenant que tu le dis, il y a effectivement des clins d’œil.
    En tous cas, Edwards a oublié son délire à la Monsters pour nous offrir un vrai film de monstres e je suis donc défenseur du film.

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