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Manon 20 ans (Critique) Un écrin sublime pour une étoile éblouissante

SYNOPSIS: Loin du Centre éducatif fermé, Manon a désormais 20 ans et un BTS de mécanique en poche. En amour, Manon espère, hésite, se lance, une passion la déborde, l’autre l’enferme. Manon se trompe, réussit, résiste, avec une force de vie exceptionnelle, une violence parfois qui menace de jaillir quand l’injustice est trop forte. La suite multi-primée de 3 X MANON, tout aussi juste et intense.

D’abord le choc. Fort. Intense. Qui tord les boyaux, qui secoue. Une fiction à la fois belle et triste, forte et tendre, intense et émouvante qui laisse sur le carreau, exsangue, broyé d’émotions. Manon 20 ans est une immense réussite, de celles qui vous restent en mémoire et dans le cœur, qui travaillent en vous et qui s’insinuent dans les interstices de votre âme pour poser son empreinte et aspirer votre tentative de résistance. Après l’incroyable première saison qui nous avait déjà mis une claque monumentale, cette seconde salve de trois épisodes où cinq années se sont passées dans la vie chaotique de Manon (mais seulement trois ans après 3 x Manon), nous a totalement et irrémédiablement emportée.

Manon a désormais 20 ans, un BTS de mécanique en bandoulière. Elle n’est plus tout à fait la même et pas encore tout à fait une autre mais elle est sortie de l’adolescence et aborde la vie d’une jeune femme de son âge, escortée par tous les tourments et les interrogations qui sont l’apanage de cette période de la vie. Sa confrontation au milieu du travail (elle postule pour mettre les mains dans le cambouis dans un garage et on la cantonne à l’accueil) est à la fois rude et formatrice. Elle y découvrira les turpitudes et la cruauté dont chacun est capable pour garder sa place ou pour se faire une place au soleil mais elle y trouvera également un éveil amoureux inattendu. Si la colère qui la rongeait est parcimonieusement en sommeil, Manon bouillonne toujours d’une souffrance qu’elle contient avec difficulté, tentant maladroitement de supporter la pression sociale. Portrait d’une jeune femme qui se cherche, qui tente d’avancer et trébuche avant de dompter avec plus ou moins de difficultés ses démons, Manon 20 ans est une subtile dose de poésie dans un monde brutal, le miroir réfléchissant d’une âme torturée qui s’ébat dans des montagnes russes émotionnelles.

Si la relation fondatrice de toute la série est celle unissant Monique (Marina Foïs) et Manon et que les six épisodes forment un ensemble homogène et cohérent explorant la totalité de cette relation, Manon 20 ans grimpe encore d’un cran dans l’intensité. La violence psychologique de cette relation permet à Marina Foïs d’être à nouveau extrêmement juste même si elle a peu de scènes à son crédit. Tout le casting de ces nouveaux épisodes est d’ailleurs remarquable que ce soit Yoann Blanc en chef d’atelier (La Trêve) Théo Cholbi en jeune homme amoureux prêt à tout donner ou la formidable Déborah François, à la fois sensuelle et tendre qui est d’une subtilité impressionnante. Grâce à l’écriture juste et sensible de Antoine Lacomblez et de Jean-Xavier de Lestrade et grâce à la délicatesse et aux trésors de précaution de ce dernier pour filmer son héroïne, Manon 20 ans est remarquable de bout en bout, une série qui sans faire beaucoup de références à l’actualité est pourtant une œuvre furieusement moderne et très ancrée dans la réalité. En reprenant l’itinéraire de Manon après un hiatus de cinq ans, on pense à la construction du Boyhood de Richard Linklater qui filmait un jeune garçon de ses 6 ans jusqu’à sa majorité et parvenait à saisir les pulsations de la vie au travers d’une myriade de petits détails et parvenait ainsi à être un écho vibrant, honnête et juste d’une existence en devenir.

Pour faire passer tout ce magma de sentiments il fallait une comédienne rare, belle, évidente. Alba Gaïa Bellugi faisait déjà des merveilles dans 3 x Manon et nous avait fait exploser d’amour. Mais ici, rarement une comédienne nous aura autant ébloui par la grâce d’un potentiel hors normes et une capacité proprement exceptionnelle à faire passer une multitude d’émotions. Elle irradie l’écran de sa moue boudeuse, de son sourire timide, de ses élans amoureux, de sa puissance féline, de ses douleurs sourdes… Alba Gaïa Bellugi est une étoile éblouissante qui confirme sa puissance dramatique et un talent sans limites, dont l’immense déflagration n’a pas fini de se faire ressentir. Elle ouvre un champ des possibles étourdissant et se dire qu’on n’a pas fini de la revoir est la meilleure nouvelle qui soit.

Crédits : Arte

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