SYNOPSIS: Dans un Paris caniculaire, Tristan, directeur de campagne d’une candidate aux législatives, reçoit un courrier anonyme contenant un test de grossesse positif. Parce qu’il est peut-être atteint d’une maladie génétique mortelle et incurable, il devient obsédé par l’idée de retrouver la femme qui lui a envoyé ce test. Mais a-t-il affaire à une blague morbide, une vengeance froide, un appel à l’aide ou à une manœuvre politique ? Tristan décide de mener l’enquête, au péril de sa vie professionnelle et affective. 

C’est bien malgré nous que le sujet de la collapsologie est devenue omniprésente dans nos échanges politiques, sociaux et quotidiens. Le fameux « effondrement » dont certains parlent avec mépris et nonchalance quand d’autres le voient avec inéluctabilité, se place maintenant comme un sujet de fond qui s’en vient depuis peu à s’immiscer à travers l’écran de cinéma. S’il n’apparaît jamais frontalement dans le cadre de l’image, Alice Zeniter et Benoît Volnais lui laissent une place prépondérante dans leur Avant l’Effondrement qui, comme son nom l’indique, dépeint un monde en pleine transition peinant à entrevoir un avenir radieux pour les futures générations. Le film suit Tristan, jeune directeur de campagne de la candidate de gauche Naïma Bouhoune, alors que Paris est sujette à une canicule majeure. Un jour, il reçoit par la Poste un test de grossesse positif. Avec le soutien de sa meilleure amie Fanny, Tristan va partir à la rencontre des femmes susceptibles d’être son expéditrice mystère, dans une quête qui va menacer à la fois sa carrière professionnelle, sa santé mentale, ses convictions politiques et ses relations affectives.

Privilégiant une narration un brin théâtrale sous une structure découpée en actes pour raconter son histoire, Avant l’Effondrement commence comme une quête intimiste prolongée avec justesse et quelques traits d’humour bien placés dans une version politico-trentenaire du Broken Flowers de Jim Jarmusch. En tête d’affiche, Niels Schneider est excellent à chaque instant, figure de l’humain tragique qui cherche l’équilibre dans sa vie. Son Tristan, dont le monde se fracture au fur et à mesure de son aventure, porte alors les premiers actes du film, lesquels se focalisent sur les femmes qui ont marqué les récentes histoires de cœur de son protagoniste. Cette dynamique permet de mettre en exergue à la fois son personnage principal, mais aussi les figures qui l’entourent, ainsi que l’espoir qui lui manque cruellement. C’est dans son dernier acte, lorsque Tristan et Fanny arrivent dans la communauté de l’ex-compagne du jeune homme, Pablo, qu’Avant l’Effondrement se prend les pieds dans le tapis.

Brisant le rythme par le biais d’une scène de dialogue à rallonge sur l’imminence d’une révolution que tout le monde veut mais que personne ne veut provoquer, le long-métrage semble dissoner complètement dans son virage de clôture qui, par manque de clarté dans l’élaboration et la finalité de son propos, s’effondre gentiment sur l’ensemble. Cette décision scénaristique, qui laisse un brin perplexe malgré toutes les questions d’ordre politique qu’elle soulève volontiers, constitue le plus gros défaut du film, qui semble dès lors ne pas réellement savoir où exactement il souhaite nous emmener. Mais loin d’être entièrement vain de A à Z, Avant l’Effondrement reste une proposition globalement réussie, dont l’imperfection et la maladresse structurelle servent alors de base à un propos immédiat sur les questions qu’il ne rechigne pas à poser.

Car Avant l’Effondrement est avant tout une comédie dramatique d’ordre intimiste, où l’on se plonge dans les angoisses de paternité et d’héritage aux générations futures d’un trentenaire qui tente à son échelle de bouger les choses. Mais à force de trop vouloir dire et de trop nuancer son message, le film se tire lui-même dans les pattes pour aboutir quelque peu en queue de poisson. Pourtant, au casting, Schneider et Ariane Labed sont tous les deux excellents dans ce duo de fortune, accompagnés par une excellente Myriem Akheddiou et les très bons seconds rôles de Souheila Yacoub, Séphora Pondi, Younès Boucif, Elsa Gedj et Ana Blagojevič. Zeniter et Volnais signent un film qui bouillonne d’envie de faire naître des interrogations chez son spectateur, même si sa vocation se fait parfois au dépit de sa structure. En reste pourtant un long-métrage souvent plaisant à suivre, dont la fragilité fait sûrement écho à l’humanité et à cet effondrement dont on ne cesse d’apercevoir les prémices.