SYNOPSIS : Louison, 38 ans, mère célibataire récemment séparée, découvre qu’elle présente un trouble du spectre de l’autisme lorsqu’on diagnostique son fils Guilhem, 11 ans, qui a blessé un camarade de classe le jour de la rentrée. À peine se sent-elle libérée par cette révélation qu’une enquête sociale démarre pour savoir si elle doit conserver la garde de son enfant. Louison décide alors d’apparaître la plus « normale » possible aux yeux de l’enquêteur social. Mais ni elle, ni sa famille ne sait vraiment ce qu’être normal signifie.
Quel bonheur de voir une nouvelle création originale OCS débarquer prochainement sur nos écrans. Il faut dire que nous avons toujours été des fervents défenseurs de la plateforme mais que ces derniers temps nous n’avions pas forcément été conquis par les nouveautés proposées. Seule l’excellente seconde saison de la petite pépite 3615 Monique nous avait récemment tapé dans l’œil…mais il ne s’agissait donc pas d’une nouveauté. Si la ligne éditoriale de la plupart des créations originales semble assez uniformisée depuis un petit moment, nous espérons que le récent rachat d’OCS par Canal+ ne signera pas le glas des quelques douceurs encore en activité, souvent conçues sur un plan en trois saisons. Le 6 avril ce sera donc au tour d’Aspergirl de faire son trou avec un slogan accrocheur » Normal c’est quand personne te regarde « . Vous l’aurez sûrement déduit de son titre mais la série se concentre principalement sur deux personnages, Louison (Nicole Ferroni) et son fils Guilhem (Carel Brown), tous deux diagnostiqués tardivement autistes. L’autisme est d’ailleurs de plus en plus fréquemment utilisé scénaristiquement au sein de séries qui ont pignon sur rue comme Good Doctor ou Atypical, avec le folklore et les fantaisies d’écriture qui peuvent graviter autour. Aspergirl n’échappe pas à la règle même si l’on sent qu’il existe une volonté de bien faire les choses et d’apporter un peu de pédagogie à la démarche (en témoigne notamment le texte explicatif dans le générique de fin).
Louison est une mère de famille assez délurée (tellement à vrai dire qu’on a du mal à croire qu’elle n’ait jamais été diagnostiquée auparavant) qui élève son fils Guilhem avec le support un peu diffus de son ancien compagnon Reza (Mustapha Abourachid). Le comportement de cette petite famille apparaît d’emblée atypique : Louison est passionnée par la météo et semble être comme un poisson dans l’eau lorsqu’il s’agit de reconnaître les configurations d’organisation attribuées à chaque semaine via une couleur spécifique tandis que Guilhem, obnubilé par les volcans et les pierres, refuse de manger des aliments qui ne sont pas de couleur blanche. C’est d’ailleurs à cause de ce dernier point que tout va basculer. Alors qu’un tout nouveau camarade, Houcine (Wassim Loqmane) prend le dernier riz au lait à la cantine, Guilhem, effaré de ne voir aucun autre dessert blanc sur le présentoir, commence à stresser et à s’énerver avant d’enfoncer sa fourchette dans la main d’Houcine. L’incident n’en restera pas là et toute la famille se retrouve de fil en aiguille à passer des tests puis à faire l’objet d’une enquête sociale. C’est d’ailleurs Arthur Lemonial, incarné par un amusant Benjamin Tranié affublé de sa bonhomie naturelle (on adore Benjamin Tranié depuis ses débuts), qui est chargé de cette enquête. La série va donc se focaliser sur deux arcs simultanés. Le premier consiste à entrer dans la vie et les têtes de Louison et Guilhem pour voir comment avant et après le diagnostic ils vont faire face. Le second s’attarde sur la façon dont Louison va essayer de prouver à l’enquêteur social qu’elle peut conserver la garde de son fils alors qu’elle fait pourtant gaffe sur gaffe.
Aspergirl a ce petit quelque chose en plus qui manquait dans les récentes créations originales OCS, même si au sein des séries feel good réussies qui n’ont (pour l’instant) qu’une saison au compteur elle n’atteint pas non plus le niveau d’une Jeune et Golri. C’est d’ailleurs aussi là où nous voulions en venir plus haut lorsque nous parlions de ligne éditoriale assez uniformisée de plusieurs séries de la plateforme : assez légère et ancrée dans le quotidien, Aspergirl est une série qui peut s’avérer touchante mais qui est ponctuée de tellement de pitreries et de mini-intrigues un poil loufoques, mais paradoxalement soit trop dans la retenue, soit trop dans l’artifice, qu’elle peine malgré l’originalité de son sujet à nous accrocher drastiquement. C’était un peu le cas des dernières séries OCS du même genre. Certaines choses tombent un peu à plat ou manquent de développement et l’on ne peut s’empêcher de penser que des membres du casting sont vraiment sous-exploités (Benjamin Tranié en tête). Là où Aspergirl arrive par contre à trouver un équilibre c’est en évitant de faire du remplissage (les épisodes sont assez courts et durent parfois à peine plus d’un quart d’heure) et en proposant une galerie de personnages au mieux attachants, au pire tout à fait sympathiques. C’est une série bienveillante qui sait apporter de la tendresse lorsqu’il le faut en partie grâce à son casting extrêmement bien choisi. Tout le monde semble heureux d’être là, Nicole Ferroni en tête. Malgré le côté parfois exagéré des situations, on y croit, on a envie d’y croire et surtout on se laisse prendre la main pour savoir où tout cela va nous mener. Ajoutons à cela des compositions musicales inspirées pour enrober le tout et nous arrivons à un spectacle solaire et divertissant qui nous pousse à vouloir admirer ce qui se cacherait dans le futur, derrière ce qui semble finalement faire office de grande introduction à une histoire que nous supposons prévue plus dense.
Aspergirl est une série globalement trop convenue qui peine à donner scénaristiquement un véritable essor à sa situation de départ ou à créer la surprise tant le chemin est balisé du début à la fin. Le fait d’avoir placé l’histoire sur un fond d’enquête sociale, même si nous reconnaissons que sur le papier cette dernière donne un enjeu de taille à Louison, essouffle parfois le récit en lui faisant miroiter une carotte artificielle, la série ne sachant pas quoi faire de cette idée. Sans jamais être une véritable menace, et sans jamais exploiter à sa juste valeur un Benjamin Tranié pourtant brillant et nuancé dont le personnage dévoile un peu trop rapidement qu’il ne faut pas se fier aux apparences, cette épée de Damoclès au-dessus de Louison et Guilhem n’en est finalement jamais une tangible. Les relations entre les membres de la famille le confirment d’ailleurs à la fin : la vraie menace elle vient de l’intérieur. Dommage pour accentuer le coup de surprise final de ne pas avoir fait de l’enquête sociale un véritable nemesis pour ensuite mieux nous surprendre quant à l’issue des premières pérégrinations de cette petite famille. Malgré cela Aspergirl propose des situations amusantes, un casting talentueux (y compris, et il faut le souligner, les enfants qui sont excellents) et a un indéniable talent pour insuffler de l’innocence et de la tendresse dans son récit. Même si la portée pédagogique de l’ensemble apparaît au final assez relative, et que comme nous venons de le voir la structure scénaristique ne manque pas de défauts, nous serons au rendez-vous avec grand plaisir si une saison 2 voit le jour.
Crédits: OCS
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