EN TOUTE LIBERTÉ – UNE RADIO POUR LA PAIX (Critique)

Par William François le mars 7, 2023 • ( Poster un commentaire )

SYNOPSIS: Le média qui donne de la voix à ceux qui n’en ont plus, c’est la radio. Au nord de l’Irak, sept jeunes journalistes, musulmans, chrétiens et yézidis, tendent leurs micros à ceux qui veulent la paix. Ils travaillent pour Radio Al-Salam, antenne affranchie d’influences politiques et religieuses. En toute liberté, des voix s’élèvent sur les ondes et font renaître le lien au sein d’une nation.

Deuxième volet documentaire de la trilogie La Vie après Daesh après avoir suivi la reconstruction de Raqqa dans 9 jours à Raqqa l’année passée, En Toute Liberté est le nouveau long-métrage de Xavier de Lauzanne qui, narré par Sophia Aram, se dirige vers l’Irak – et plus précisément à Erbil, la capitale du Kurdistan Irakien. En Toute Liberté suit les hommes et les femmes, tous de confessions et d’origines différentes, qui composent la nouvelle Radio Al-Salam. Ces journalistes profitent alors de ne dépendre d’aucun média national ni d’aucune religion particulière pour faire le bilan du passage de Daesh sur le territoire irakien et pour donner à ceux qu’on n’entend pas un endroit où parler. Si dans son 9 Jours à Raqqa Xavier de Lauzanne évoquait par ses images impressionnantes et son approche éclairée les stigmates de la guerre, de la destruction et du terrorisme par le biais d’une reconstruction qui s’amorce, ce En toute Liberté se concentre alors sur les cicatrices humaines. D’une part, la narration du documentaire permet de mettre en relief les figures qui composent l’équipe de Radio Al-Salam, donnant à chacun et chacune l’occasion d’évoquer son histoire, sa relation avec la religion, la politique nationale et la libre parole. D’autre part, ces mêmes journalistes dirigent alors leurs micros vers les oubliés. Les déplacés, les survivants, les chrétiens, kurdes, arabes, yézidis : tous ont leur mot à dire sur les tragiques évènements et sur le monde qui les entoure. Celui qui est détruit, en reconstruction ou laissé pour compte, celui qui les ignore ou celui qui tente de les faire taire.

Chaque nouvelle interview cherche alors à trouver dans la différence la singularité qui rend leurs histoires nécessaires à faire entendre. La caméra de Xavier de Lauzanne tente, de la même façon et en restant toujours particulièrement pudique, de souligner l’humanité de ces âmes diverses qui ne souhaitent que la paix et le vivre-ensemble.

En Toute Liberté est alors un récit tantôt passionnant tantôt instructeur, qui s’élève surtout dans le message qu’il porte, tourné vers l’espoir d’une réconciliation entre les peuples (lesquels ont été monté les uns contre les autres – selon les populations locales – par les politiques récentes et leurs médias attitrés). Prônant alors la liberté et l’authenticité de l’expression tout en portant les lourds stigmates des drames humains abominables qui ont eu lieu sur leur territoire, la Radio Al-Salam se fait alors transmettrice d’espoir et – plus que ça – d’une certaine lumière.

En Toute Liberté, par son approche sensible et son propos libertaire élégamment dosé, est alors une réussite toute particulière qui essaye de laisser toute la place à l’écran à ses interlocuteurs qui modèlent chacun leur tour le film par leurs interventions. Tout cet ensemble fournit alors un œil nouveau, interne et éclairé sur ces évènements obscurs et sur la reconstruction qui se met doucement en place en laissant la parole totale à ceux qui mènent le combat. En résulte un joli film empreint de nuance et d’optimisme pour venir panser les plaies de nombreux peuples qui recherchent inlassablement et définitivement la paix.