SYNOPSIS: Les vacances, tout le monde le sait, ne sont pas faites pour s’amuser. Tout le monde le sait, sauf Monsieur Hulot qui, pipe en l’air et silhouette en éventail, prend la vie comme elle vient, bouleversant scandaleusement au volant de sa vieille voiture Salmson pétaradante la quiétude estivale des vacanciers qui s’installent avec leurs habitudes de citadins dans cette petite station balnéaire de la côte atlantique. Il promène dans l’ennui balnéaire, le plaisir émerveillé des châteaux de sable. Et, d’un seul coup, l’ennui éclate de rire, tandis que les châteaux de sable s’ouvrent sur la belle au bois dormant et qu’aux cris des enfants, la petite plage pétarade et reluit comme un quatorze juillet… Mais voilà septembre. Monsieur Hulot, inconscient du scandale, rentre… Où rentre-t-il au fait ? Dans les nuages sans doute, dont il n’était, d’ailleurs, jamais sorti. Mais les enfants, après qu’il ait disparu, ont regardé le ciel longtemps.
Les vacances de Monsieur Hulot, deuxième long-métrage de Jacques Tati, sort à Paris le 25 Février 1953. C’est l’acte de naissance de monsieur Hulot. Un héros autant iconique que récurrent dans ensuite tous les films de Jacques Tati. En 1962, puis en 1978, le réalisateur retravaillera son œuvre. Il remonte le film, supprime ou rallonge certains plans, réorchestre la musique et refait le mixage sonore. Il poursuit ainsi le processus de création autour de son personnage pendant plus de 25 ans. Les vacances de Monsieur Hulot recevra de nombreuses récompenses l’année de sa sortie dont le Prix Louis-Delluc et le Prix de la critique internationale du festival de Cannes. Tati connaît par cœur la station balnéaire de Saint-Marc-sur-Mer et son hôtel de la plage où se loge l’action, y amenant régulièrement sa petite famille pour ses propres vacances. Ainsi, va t-il filmer au scalpel les us et coutumes des estivants, comme des autochtones, prenant ce malin et tendre plaisir à les rendre fous.
Un hommage qui sera d’ailleurs réciproque car il existe désormais une place Jacques Tati et une statue grandeur nature (donc très grande !!) du cinéaste. Tati étant à Saint-Marc-sur-Mer ce que le boudin blanc est à Rethel !! A jamais associés. Tati, c’est évidemment le burlesque érigé en art. Il en est question en permanence dans Les vacances de Monsieur Hulot. Le moindre de ses mouvements va être le prétexte à la pire des abracadabrantesques gaffes qui vont incommoder toutes celles et ceux qui vont croiser son chemin sans bien sûr que lui ne s’en émeuve et surtout ne s’en rende compte. C’est le pair et père des Pierre Richard ou autres Peter Sellers. Le longiligne physique de Tati qui joue Hulot l’importun malgré lui, traîne sa carcasse tel un enfant, dans l’insouciance géniale des grands dadais rêveurs. Il est excentrique loufoque, gêneur en chef, mais jamais impoli ou désagréable.
Les chapeaux qui se lèvent, le couinement répétitif ridicule d’une porte, il se passe toujours quelque chose dans cette inventivité permanente de mise en scène. La série de tableaux ainsi proposé avec ces vacanciers qui aspirent au repos, nous ramènent évidemment pour un film de 1953 à notre propre rapport au temps. Déjà le farniente en général permet en principe de nous mettre en pause, mais ici tout semble littéralement comme figé, si léger, dans des préoccupations basiques et primaires. Sauf que Hulot, dans la douce inconscience qui est la sienne, va venir tel un menhir dans un bac à gravillons faire turbuler cette quiétude estivale toute franchouillarde. C’est aussi la prédominance du gag un peu caché, parfois carrément hors champ, ou en arrière-plan. Nous ne sommes pas dans la tarte à la crème qui prend tout le cadre. Tati est exigeant car il demande au spectateur finalement d’aimer le cinéma, d’écouter tout le temps, tant chaque son est un chant, et de regarder partout, tant chaque image est un film. Qu’il s’agisse d’un canoé transformé en requin, de l’art du mime et aussi du clown, de la voiture Salmson pétaradante, du bottage de popotin malheureux d’un vacancier, d’un feu d’artifice improvisé, le rythme comique est effréné, haletant.
A cet égard, Les vacances de Monsieur Hulot est l’air de rien un film très politique, qui porte un hommage souvent corrosif à une forme d’anticonformisme, un refus de se prendre au sérieux, presque une ode à l’enfance, à l’utopie érigée en mode de vie. Film politique, et forcément aussi poétique au rythme de la douce mélodie d’Alain Romans. Tati est aussi désopilant derrière que devant la caméra. Cette nonchalance, qu’il porte physiquement est son meilleur costume. Il ne s’exprime presque jamais, mais son corps parle si bien pour lui. Il n’est que tendresse et romantisme. Cette interprétation physique, cette façon de faire discourir le mouvement est un modèle inoubliable et qui s’exportera encore pour des siècles. Et puis, il y tous les autres, tous ces figurants qui deviennent finalement centraux, car chaque personnage est un peu une scène, et permet à Tati de révéler ce qui est en chacun de nous, particulièrement quand nous sommes en vacances. Leurs perplexités au mieux, leurs agacements réguliers, face à ce qui fait différence, est un ressort comique inépuisable, mais toujours dans l’affection. Au-delà d’une immense et intemporelle farce burlesque, Les vacances de Monsieur Hulot est un film d’une grande sensibilité et quelque part de l’amour de l’autre. Jamais mesquin ou cynique, ce qui est si précieux. C’est une légèreté de l’atmosphère, c’est la contemplation mélancolique d’une époque, c’est l’univers d’un génie.
Titre Original: LES VACANCES DE MONSIEUR HULOT
Réalisé par: Jacques Tati
Casting : Jacques Tati, Nathalie Pascaud, Micheline Rolla…
Genre: Comédié
Sortie le : 25 Février 1953
Reprise le : 06 Août 2014
Distribué par: –
EXCELLENT
Catégories :Critiques Cinéma, Les années 50