SYNOPSIS: Quand Rose arrive en France, elle emménage en banlieue parisienne avec ses deux fils, Jean et Ernest. Construction et déconstruction d’une famille, de la fin des années 80 jusqu’à nos jours.
Deuxième long-métrage de Léonor Serraille après son obtention de la Caméra d’Or pour son Jeune Femme en 2017, et première incursion de la réalisatrice au sein de la Compétition Officielle du Festival de Cannes à la dernière édition en date, Un Petit Frère accompagne les trajectoires de Rose, mère de 2 fils, Jean et Ernest, qui décide de quitter sa famille en Côte d’Ivoire pour venir s’installer en France à la fin des années 80. Récit d’intégration, portrait de famille et fresque intimiste, Un Petit Frère est un film multiple qui compose une très jolie peinture de ses personnages, toujours en nuances et en humanité. Pour ce long-métrage, Serraille s’entoure de la directrice de la photographie Hélène Louvart (dont on a pu déjà apprécier le travail chez Agnès Varda, Jacques Doillon, Wim Wenders, Alice Rohrwacher ou encore Eliza Hittman) et du compositeur Thibault Deboaisne pour mettre en image et en musique cette histoire transgénérationnelle qui déploie une narration en forme de triptyque. Le film s’ouvre d’abord sur Rose, la mère, la première protagoniste du film. La caméra accompagne à hauteur d’humain le parcours de cette petite famille en quête de points d’accroches et de repères dans cette France qu’ils découvrent et où ils cherchent à s’intégrer. Le film prend alors le temps de se poser avec ses personnages, d’accompagner les joies et les galères de Rose à travers son parcours de mère célibataire, ses histoires de cœur, ses questionnements familiaux et ses obligations professionnelles. Tout ce petit monde, serré dans des petits appartements, habitués à être tout le temps déplacés d’un lieu à un autre, vit en orbite de la mère, véritable personnage pivot qui laisse à la fin du premier tiers ses deux autres protagonistes grandir et prendre leur indépendance au sein même du film.
Car Serraille met ensuite sa caméra sur Jean, adolescent brillant qui nourrit de grandes ambitions quant à son futur. Mais son rôle d’aîné de la famille pèse alors lourd sur ses jeunes épaules, et met en place une illustration très précise des mécanismes influés par les traumas générationnels, les pressions familiales et la difficulté de grandir. Jean est un personnage complexe et tortueux qui génère beaucoup d’empathie et de douleur dans le segment qui lui est consacré, ce qui lui permet alors de laisser dans le dernier tiers du film une place centrale au protagoniste cité dans le titre du film. Car même si Rose et Jean sont autant importants que lui au sein de cette histoire, c’est bien Ernest qui pose le point final au long-métrage, concluant cette fresque intimiste et à la fois douce et violente, en dégageant une profonde humanité et une belle lumière donnant naissance à l’espoir au-delà des complications, des drames et des erreurs passées.
Grâce à la mise en scène délicate de Léonor Serraille qui signe un film impeccablement dosé et particulièrement juste sans jamais paraître démagogique, Un Petit Frère est un exercice de style précisément touchant, très délicat dans son exécution et ponctué de beaux moments de cinéma. Le casting fait aussi gagner des points de prestige au long-métrage, en donnant aux merveilleux Annabelle Lengronne, Stéphane Bak, Kenzo Sambin et Ahmed Sylla (en tête de proue) des rôles à fleur de peau leur permettant de s’établir durablement en tant que comédiens et comédiennes à suivre dans le registre sentimental.
Un Petit Frère est une vraie réussite par son récit multiple de fresque multigénérationnelle qui peint les histoires de famille d’une mère immigrée et de ses deux enfants promis à de grandes choses. Serraille, elle aussi promise à de grandes choses, propose un film remarquable de tendresse, de colère et de précision par son talent évident qui lui permet de capter de beaux moments de cinéma, ces moments qui font vaciller le cours des choses ou qui sont au contraire faits de petits riens magnifiques. Le drame familial ne s’en trouve pas réinventé, mais Un Petit Frère a le grand mérite de réussir à se dresser à la hauteur de ce qu’il prétendait offrir. Pour ça, et pour les belles émotions qu’on prend en chemin, l’histoire de Rose, Jean et Ernest paraît suffisamment importante dans le cinéma français actuel pour qu’on vous conseille d’aller faire leur connaissance en salles.
Titre original: UN PETIT FRÈRE
Réalisé par : Léonor Séraille
Casting: Annabelle Lengronne, Stéphane Bak, Kenzo Sambin …
Genre: Drame
Sortie le: 1er février 2023
Distribué par : Diaphana Distribution
EXCELLENT
Catégories :Critiques Cinéma, Les années 2020