documentaire

ORELSAN, MONTRE JAMAIS CA A PERSONNE (Critique)

SYNOPSIS: Cette série documentaire revient sur le chemin parcouru par Orelsan depuis ses débuts, à travers une immersion intime dans les coulisses de sa vie racontée et filmée en majeure partie par son frère Clément qui l’a suivi pendant près de 20 ans avec sa caméra. A travers de nombreuses archives personnelles et des vidéos filmées et conservées par Clément, Orelsan – Montre jamais ça à personne dévoile l’ascension de l’artiste filmé avec ses proches tels que Skread, Ablaye, Gringe et certains membres de sa famille. La série documentaire comporte aussi des témoignages de plusieurs guests, à l’instar de Soprano, Akhenaton, Oxmo Puccino, Stromaé ou GIMS. Orelsan – Montre jamais ça à personne est le témoignage touchant de Clément, qui a toujours cru que son frère réaliserait son rêve de devenir l’un des rappeurs français les plus reconnus.

Clément Cotentin, petit frère d’Orelsan, convaincu dès le début du talent de son frère, dévoile ici 20 ans d’archives complètement inédites, avec 3000 heures de rushes dans ce documentaire Orelsan, montre jamais ça à personne. Document façon « punchline party » qui démontre si besoin en était le talent fou du rappeur normand, comme jamais on ne l’a vu, en mode construction de l’artiste disséquée ; Y compris avec toutes ces portes dans la gueule, et avec l’humilité absolue de l’auto-dérision, avant un avènement amplement mérité. Au-delà de la réussite insolente d’un petit gars d’ici, qui vient casser les codes et archétypes d’une époque où dans le rap, la pseudo virilité verbale confinait au pathétique ; C’est ici une incroyable leçon de résilience, et une plongée anthropologique dans un espoir fou. Un docu qui se binge watch comme une série, sur 6 épisodes d’en moyenne 40 minutes. Avec une narration évidemment riche et empathique pour la chorale d’Orelsan et un art du Twist pleinement déployé qui en fait une petite pépite à l’écran. Qui mieux que son frère pour filmer cette ahurissante trajectoire, et surtout, mais surtout, les gamelles un peu ridicules du début. C’est le plus fou dans cette histoire, au moment où il passe de la cave à l’usine, d’être le témoin privilégié de cette ascension à la fois fulgurante publiquement, et passionnante dans l’intime.


Sorte de biopic mais en vrai, qui en fait un objet unique, qui de l’intérieur, souvent en direct live, dissèque les galères, d’un boulot de nuit à l’hôtel, d’un appart d’ado éternel, sorte de squat où trainent et trônent du linge, des canettes, des mégots de clopes ou autres, des potes dans les placards, et du talent dans tous les tiroirs. Tout nous est montré, les brimades personnelles, les galères infinies, les humiliations, les doutes familiaux, en passant par des séquences hilarantes à l’Hôtel où ce travail de nuit lui permet de peaufiner ses textes. « Tout le monde dort, et moi j’écris«   à la terrible désillusion du Unkut Contest en 2006, tournoi de clash avec les plus grands noms du rap Français, où persuadé que son talent va éclabousser à la face du microcosme, et où il se fera piteusement jeter au premier tour. Durant ces deux décennies, ce qui fait magistralement commun, du canapé pourri, qui sert de studio aux potes, au faste de Bercy, est la force de l’indicible et invincible lien à ses potes, sa famille, son clan, sa team, sa chorale. Les potes de galère, Skread, Ablaye, Gringe, tout amène alors à l’empathie. On a tous connu ces amitiés folles, repensez à ces fraternités amicales inoubliables. En cet objet, le documentaire tape en plein cœur. Cette clique est une claque avec une sensibilité artistique façon dinguerie totale, mais complètement étrangère aux codes en vigueur du « Show must go on »…


Orelsan, c’est tout un univers, des textes, une voix, un flow, une sensibilité si singulière… Il fait partie de ces quelques artistes qui donnent autant qu’ils reçoivent… Toute l’idée de ce documentaire est de comprendre ce parcours délirant, enjoué, parfois chaotique, fait d’humiliations, de rebonds, mais surtout d’une folle créativité et d’un talent de chaque instant. « Dès fois, on oubliait qu’il fallait faire le clip… », « Cette chanson-là, c’est Mamie qui l’a écrit » dans les loges de Bercy… ils sont toujours un peu en train de déconner. Accumulation de ce genre de moments de bravoure, où la famille d’Orel si elle doute parfois, demeure dans sa simplicité et son intelligence du quotidien, un soutien sans faille pour le rappeur normand. « Des gamins derrière les gaillards ». Ils sont terriblement connectés avec leurs galères passées, ce qui donne à ces personnages si attachants une authenticité totale, une insolence crasse et une insouciance de chaque instant. Qu’il s’agisse de «  la sale pub sur sale pute  », chanson qui créa pour Orelsan une lessiveuse médiatique, comme de l’improvisation avant son premier Zénith, qui aurait pu tout planter, en passant par l’oubli d’allumer son micro au premier concert à la Boule Noire, ce qui l’en a sorti est sa générosité et son honnêteté. Cette sincérité est comme cultivée par Orelsan, qui semble avoir gardé une mentalité pleinement identique de son premier job de nuit à ses 9 récompenses aux victoires de la musique. Là où parfois tout le monde s’enflamme autour de lui, dans des récupérations politiques, financières, télévisuelles ou autres, lui, intelligent et humble, il se marre et comprend tout avant tout le monde, sans le dire tout de suite.


Ce talent fou s’entend entre autres dans Suicide social, morceau de 6 minutes sans refrain, à écouter, lire, mais en tous les cas à découvrir. Il y aurait tant à citer ici entre La peur de l’échec, L’odeur de l’essence, Défaite de famille, avec un clip hilarant de justesse et de perfidie ordinaire, La terre est ronde, et l’émotion collective qu’elle suscite en live, ou le succès fou de Basique. Mais subjectivement, et romantiquement, Paradis avec ce « Ça fait sept ans qu’on sort ensemble depuis deux s’maines » ou encore « J’comprends pas pourquoi tu t’inquiètes quand tu prends du poids, pour moi, c’est ça d’pris, ça fait toujours plus de toi », est sans doute ce qui s’est fait de mieux en termes de déclaration d’amour écrite et chantée depuis quelques décennies. Cette véritable rétrospective introspective à travers le temps fait parfois penser au très réussi  Play  de 2018 sur l’aspect générationnel, qui parlera certes à tout le monde, mais beaucoup quand même aux quarantenaires, et vient en tout cas consacrer le talent familial, tant la réalisation du petit frère, Clément est ici en dentelles. Orelsan, montre jamais ça à personne filme caméra à l’épaule l’épopée d’un artiste honnête et sensible, qui dans les codes d’aujourd’hui fait invariablement penser aux Brassens et Renaud d’hier. Que l’on soit fan ou pas, un documentaire aussi rare dans sa précision et dans ce qu’il raconte de la force des rêves, se consomme avec une jubilation de tous les instants. Avec de surcroît cette obsédante question…. Et si cette histoire c’était que le début ?…

Crédits: Amazon Prime Video

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