Critiques Cinéma

BLONDE (Critique)

SYNOPSIS : Adapté du best-seller de Joyce Carol Oates, BLONDE est une relecture audacieuse de la trajectoire de Marilyn Monroe, l’une des icônes hollywoodiennes les plus atemporelles. De son enfance tumultueuse à son ascension fulgurante et à ses histoires d’amour complexes – de Norma Jeane à Marilyn –, BLONDE brouille la frontière entre réalité et fiction pour explorer l’écart de plus en plus important entre sa personnalité publique et la personne qu’elle était dans l’intimité.

Marylin est martyre, dans cette adaptation sulfureuse d’Andrew Dominik du roman éponyme de Joyce Carol Oates publié en 2000. C’est ici comme un baroque contre-biopic, qui plonge dans l’intimité bien tourmentée d’une des plus grandes icônes de tous les temps. Le cinéaste dit de son œuvre que c’est un film « exigeant« , en ajoutant « Si le public ne l’aime pas, c’est leur problème. Il n’est pas fait pour plaire à tout le monde ». Il se veut en tout cas défendre la star en filmant avec une forme d’horrifique virtuosité, ses pires souffrances. Alors, forcément, le postulat est déchirant, il est quasi psychiatrique, et évidemment fait polémique, du fait de la violence de certaines scènes, notamment sexuelles, qui ne parlent pas de dépravation, mais de souffrances traumatiques irrémédiables, d’une déchéance, d’une décrépitude. L’antithèse d’un conte de fée, mais ici une trajectoire assez monstrueuse, ou quand strass et paillettes sont une bombe à fragmentation, quand la gloire n’est qu’une couverture qui vous laisse les pieds gelés. Un film glaçant sur le mythe dans sa variation la plus cauchemardesque. C’est un postulat choc, un paradigme sacrément audacieux, qui attise toutes les curiosités.

 

Avant Marilyn objet de désir et de fantasme, il y avait Norma Jean, enfant face à ces adultes inconstants, inconséquents et finalement assez inconscients, qui négligent ce qui devrait pourtant faire l’objet de la plus sacralisée des attentions, les enfants, ces anges innocents, qui ne demandent qu’amour, rêve et que l’on fait grandir de nos yeux émerveillés. C’est terrifiant l’idée de n’imaginer son enfant que comme un prolongement, voire une malédiction dans le cas de la petite Norma, et pas comme un être plus qu’à part entière, ceux qui vont compter le plus au monde, les plus importants, les plus beaux. Pour Norma, ce n’est pas une enfance, mais une déchirure. On lui ment, elle n’existe pas, ou du moins pas plus qu’un chien qu’on abandonne lâchement au bord de la route… à l’orphelinat pour Norma.

Forcément, bien des années après, Marylin va donner son corps n’importe comment, car celui-ci ne vaut rien. C’est le prisme scénaristique et le parti pris de l’auteur qui se déploient, car avec cette introduction si violente et maltraitante pour Norma, toutes les meurtrissures de Marylin prennent ensuite corps et forme. Elle est ici montrée tel un objet de foire, et la violence se situe surtout dans les attentes viles, misogynes et assez dégueulasses de ceux (et celles) qui l’encensent sans la comprendre, comme au zoo, comme une représentation fantasmée d’eux-mêmes, mais sans jamais d’authentique considération pour celle qui est toujours un objet et jamais un sujet. C’est toute la violente férocité des années Hollywoodiennes 50-60… Toute la violence des représentations. L’enfer c’est définitivement les autres dans Blonde. Une mise en scène à la Orson Welles, avec forcément moins de puissances métaphoriques que le maître. On y retrouve cependant des corps qui diffèrent en permanence dans le cadre, entre petitesse et démesure, fonction du propos qui est tenu et défendu. L’image ici est tel un chaos saccadé, très mobile, hyper changeante, et pas que dans les mouvements de couleurs, noirs et blancs, mais aussi ultra déstabilisante dans ses coupes et alternances mais finalement assez enivrant. Le son est tantôt hurlant, tantôt silencieusement réflexif. Formellement, Blonde est un délire très intriguant et somme toute assez fascinant. Il est aussi tourmenté que celle dont il nous peint le sombre tableau de l’intérieur. C’est aussi vertigineux que fatiguant par moment… Les délires psychanalytiques, ses confusions, ses hallucinations sont touchantes, mais aussi éreintantes.

Évidemment, la prestation de Ana De Armas est totale…. Comment sortir indemne d’une telle composition? C’est une immersion dans la faille, dans la béance affective de Marylin. L’actrice d’aujourd’hui est l’actrice d’hier. La performance restera dans l’histoire, et pourrait bien être couronnée de tous les succès. Mais c’est de toute façon la récompense du talent, avant peut-être celle de la statuette. Blonde est un monstre de 2H46. Évidemment il y a ceux qui crieront au génie, et les autres au scandale. A l’image de ce destin tragique et passionnel qui exacerbe une forme d’universalité tant il rend palpable et visible la folie du trauma et ses ravages. C’est parfois épuisant, mais c’est tout le temps bouleversant. C’est incontestablement à voir.


Titre original: BLONDE

Réalisé par: Andrew Dominik

Casting: Ana de Armas, Julianne Nicholson, Bobby Cannavale …

Genre: Drame, Biopic

Sortie le: 28 Septembre 2022

Distribué par : Netflix France

EXCELLENT

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