Critiques Cinéma

L’ANNÉE DU REQUIN (Critique)


SYNOPSIS: Maja, gendarme maritime dans les landes, voit se réaliser son pire cauchemar : prendre sa retraite anticipée ! Thierry, son mari, a déjà prévu la place de camping et le mobil home. Mais la disparition d’un vacancier met toute la côte en alerte : un requin rôde dans la baie ! Aidée de ses jeunes collègues Eugénie et Blaise, elle saute sur l’occasion pour s’offrir une dernière mission… 

L’année dernière, le frenchie Teddy avait accompagné la réouverture des salles sur tout le territoire. Et même si le box-office a difficilement suivi, le film des frères Boukherma (Zoran et Ludovic, de leurs prénoms) était parvenu à tordre la figure mythique du loup-garou pour la faire rentrer dans les Pyrénées, au milieu de villageois trop occupés par leur bingo communal pour prendre le temps de s’inquiéter du monstre. Un humour décapant balisé sur un malaise palpable, et un petit déluge de sang dans son acte final : bref, Teddy était une sensation qui dressait un potentiel immense derrière ses petites imperfections stylistiques. C’est pour cette raison que cette Année du Requin était attendue de pied ferme. Exit le loup-garou, place au requin. Les frères Boukherma revisitent à leur singulière façon Les Dents de la Mer de Tonton Spielberg (et autres ersatz hollywoodiens type The Meg), avec toujours autant d’aplomb. L’Année du Requin accompagne les derniers jours de Maja, gendarme maritime à La Pointe, avant sa retraite anticipée. Son mari a tout prévu : ils vont « poser leurs culs dans le sable » et couler des jours heureux au Cap-Ferret en écoutant la seule et unique chanson diffusée à la radio. Mais La Kiffance de Naps attendra : un requin est détecté aux abords de la plage et ses attaques provoquent un vent de panique. Pour le maire et pour les locaux, il est inconcevable de fermer les plages. C’est donc à Maja et à son équipe de choc (composée par ses jeunes collègues Eugénie et Blaise) de stopper le requin pour de bon.



Dans ce « remake » décalé et revitalisé à la française des Dents de la Mer, les frères Boukherma présentent un film littéralement coupé en deux, comme sectionné par les mâchoires de leur requin. Après une première partie abreuvée par un humour absurde à l’écriture délicieuse et millimétrée, L’Année du Requin pivote à 180° pour nous faire voir l’aileron qui se cachait derrière ce beau soleil estival. Lorsqu’une scène majeure frappe au milieu du film, celui-ci se drape de noirceur et de thématiques bien plus sérieuses. La lumière du jour laisse place à la peur de la nuit, suivant le personnage de Maja à travers ses remises en question. Car c’est elle qui est au centre de tout, Marina Foïs livrant une performance brillante qui oscille habilement entre tous les genres qu’explore le film. Maja est donc un personnage fort, à la fois déterminé et désemparé, permettant de guider le long-métrage dans l’établissement de sa structure narrative. Oui, c’est hilarant, très malin et particulièrement absurde. Mais c’est aussi dense, piquant et bien plus sombre dans sa deuxième moitié qui essaye clairement de convaincre les non-convaincus que ce film n’est pas un énième navet francophone qui cherche à se frotter aux classiques étrangers sans pouvoir exister par lui-même. L’Année du Requin existe bel et bien par lui-même dans un océan cinématographique français un peu timide, réveillant à la fois les amateurs de genre et ceux de comédies généreusement malines.



Derrière Marina Foïs, Jean-Pascal Zadi et Christine Gautier campe le jeune duo de gendarmes à la dynamique très réussie, parvenant à donner au personnage de Maja encore plus de substance et même une dimension épique dans le final nocturne du film. Kad Merad, Ludovic Torrent et Philippe Prevost complètent le casting très hétéroclite du film, entre comédiens chevronnés et visages débutants qui donnent au film des échanges particulièrement savoureux.



En bref, L’Année du Requin est une curiosité brillante et solaire qui dégage un vrai amour du genre en même temps qu’un attachement global à la France et à ses contradictions. En développant dans son intrigue de vrais sujets politiques (on y parle de réchauffement climatique comme déclencheur de catastrophe et surtout d’un climat paranoïaque et terriblement actuel qui file une parfaite métaphore de la crise du Covid à travers la menace de ce requin) tout en réussissant un numéro enthousiasmant et généreux qui fournit humour décapant, casting impeccable et final spectaculaire. Le loup-garou avait fait son carnage dans la salle des fêtes, le requin est sur le point de faire le sien à La Pointe, et en bons amateurs de ravages sanguinolents à l’ironie absurde et débordant de personnages locaux aux accents à couper au couteau, on a déjà hâte de faire connaissance avec la prochaine bête des frères Boukherma.

Titre Original:  L’ANNÉE DU REQUIN

Réalisé par: Ludovic Boukherma, Zoran Boukherma

Casting: Marina Foïs, Kad Merad, Jean-Pascal Zadi…

Genre: Comédie

Sortie le: 3 août 2022

Distribué par: The Jokers / Les Bookmakers

EXCELLENT

 

 

 

 

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