SYNOPSIS: Alors qu’il est sur le point de trouver un moyen de communiquer avec les dauphins, un biologiste ne soupçonne pas que sa découverte puisse être détournée à d’autres fins.
Le jour du dauphin de Mike Nichols s’inspire d’un roman de Robert Merle, Un animal doué de raison, paru en 1967. C’est le cinquième long métrage de Mike Nichols, qui avait notamment au préalable réalisé le culte Le lauréat (1967), lançant la carrière d’un certain Dustin Hoffman. Le jour du dauphin n’a pas rencontré à sa sortie un grand succès ni critique, ni public, et pourtant… Pourtant, ce qui se joue entre les dauphins et les hommes, et plus particulièrement ici entre Alpha et Docteur Jake Terell (George C Scott), portés par les sublimes images sous-marines de William A. Fraker et la musique envoutante de Georges Delerue, apportent au film une véritable et intense conation poétique et même un peu charnelle dans une forme de constante parade romantique aquatique. On comprendrait même mieux les pulsions de Jean-Marc Barr en Jacques Mayol qui au tout dernier moment du Grand Bleu (1988) va quand même choisir un dauphin en lieu et place de Rosanna Arquette. Les premiers moments où Alpha se met à parler sont à la croisée des chemins entre science-fiction, burlesque et onirisme. Ce dernier sentiment s’imposera largement à mesure que Le jour du dauphin avance tant le caractère empathique est prégnant et nous ramène assez délicieusement à nos doux rêves enfantins. C’est particulièrement surprenant et attendrissant quand Jake diffuse ce qu’il nomme lui-même les enregistrements du « Hit-parade » d’Alpha avec les sons les plus significatifs qu’il a pu émettre. On est en quelque sorte dans un croisement entre Gremlins (1984) et Les dents de la mer (1975).
Les dauphins Fe et Be se disent bonjour. La mise en scène est au service des dauphins, et sous l’eau comme au-dessus, les plans caméra, les sons, les images sont déployées, pour en faire les héros de l’œuvre. Et il faut reconnaître une véritable inventivité et de l’étonnement régulier dans l’alternance des cadres. Le dauphin est humanisé au possible à moins que nous soyons nous-mêmes « dauphinisés ». Quoi qu’il en soit, le rapprochement est ici une quête assouvie, le partage est total, et ça on aime tellement. Après les quelques jours heureux, le temps que l’on se prenne d’affection pour l’île hors du temps, loin de la folie des hommes, organisée par Jake, son épouse et les autres accompagnateurs des utopies environnementales, arrive le temps de la lutte. Ce paradis est perdu, un peu comme dans le livre Le grand secret (1973) de Barjavel ou le film de Danny Boyle The Beach (1999). On y est tellement bien que l’on sait que ça ne peut durer. Lutte donc, dans ce combat assez classique finalement, et avec une résonance toute singulière, entre le culte du vivant et celui du profit. Ce qui peut paraître assez manichéen ou binaire, mais pourtant très intemporel et donc actuel. La dernière partie devient un thriller avec quelques rebondissements bien sentis… Même si on préférait justement l’île magique du bonheur avant que des considérations politiques, égotiques très humaines et meurtrières s’en mêlent salement. Et puis le » Oh shit » avant une explosion, c’est toujours un moment de grâce un peu comme ce qui arrive à Gary Oldman vers la fin de Léon (1994) de Luc Besson.
Pour le casting, on pourrait dire dans un jeu de mot vaseux que la palme revient à Fe et Be. Plus sérieusement, leurs respectives humanités sont bouleversantes et portent le film. L’excellent Paul Sorvino, Curtis Mahoney dans le film, au début, porte belle une terrible vulgarité dans des yeux d’une grande et rare perversité, avec ce regard en biais, ce sourire niaiseux dans le moment où l’on pense qu’il va devenir le roi des salauds. Lui sait que non, et nous induira en erreur, semblant nous donner là une leçon de bienveillance, sur les trompeuses apparences. Georges C. Scott est un Jake renversant de convictions humanistes. Il représente l’espoir, la force d’une croyance que l’on ne peut se résoudre à penser comme révolue. Il porte avec force cet optimisme, ce dessein d’une rêverie contrariée. On est avec lui, on est toutes et tous un peu lui.
Le jour du dauphin, au-delà de son caractère parfois quasi expérimental, presque une sorte d’ovni sous-marin, est clairement une ode animaliste touchante et troublante, qui, si elle n’a pas trouvé son public à l’époque, pourrait aujourd’hui le rencontrer tant son message pour la période semblait finalement anticipatrice, annonciatrice. C’est un film un peu fou dans son originalité, son concept mais très attachant et prenant. Il parle de cette communion possible entre l’homme et son environnement, entravée par…. L’homme avec un tout petit h…. Le jour du dauphin, très poétique, vous apportera en ces jours de records de chaleurs si inquiétants dans ce qu’ils disent de notre rapport destructeur à la nature, une véritable fraicheur à tout point de vue salutaire.
Titre Original: THE DAY OF THE DOLPHIN
Réalisé par: Mike Nichols
Casting: George C. Scott, Trish Van Devere, Paul Sorvino…
Genre: Thriller, Drame, Science Fiction
Sortie le: 15 Mars 1974
Distribué par: Lost Films
EXCELLENT
Catégories :Critiques Cinéma, Les années 70