SYNOPSIS: Anderson, un quartier déshérité de Los Angeles. Le lieutenant Bishop est chargé d’assurer la dernière nuit de garde dans le commissariat du treizième arrondissement, qui va être fermé. Il s’y installe avec un inspecteur, trois gardes, un agent et deux secrétaires, ainsi que deux prisonniers en attente de transfert. C’est alors qu’un homme hagard fait irruption. Il est pourchassé par des tireurs qui prennent d’assaut le poste de police. Alors que la tension monte, le lieutenant Bishop doit pactiser avec les prisonniers. Sans aucun moyen de communication avec l’extérieur, puisque le téléphone a été coupé, les occupants du commissariat vont subir un véritable siège…
John Carpenter dans sa jeunesse aura été sacrément influencé par le cinéma d’Howard Hawks, et d’ailleurs, Assaut, son deuxième long métrage, tourné en seulement 20 jours est directement inspiré de Rio Bravo (1959). Le film recevra un accueil critique glacial et empreint de mépris outre atlantique mais le festival du film de Londres en 1977, va le révéler et fera dire à de nombreux puristes quelques années plus tard, que le film devenu culte, est un des meilleurs de l’œuvre prolifique et fantastique (dans les nombreux sens du terme) du réalisateur fou. Le huis clos Assaut se positionne en cinéma d’auteur sur un mode ultra minimaliste. Tout va commencer par un crime absolument odieux, avec un gang de méchants très méchant qui va croiser le chemin de l’innocence incarnée par cette fillette à qui il va manquer la fraise sur sa glace. Si ce satané marchand à la chemise avec les motifs aux ballons gonflables (on veut la même !!) n’avait pas oublié le deuxième parfum, on n’en serait pas là. Cet affichage de l’heure, quasi minutée avec la petite voix off le signifiant, installe avec une simplicité déconcertante, dans son mode épuré, une terrible angoisse, une impression immédiate que le drame va arriver. Et comme on sait que l’on regarde un « Carpenter« , on devine très vite que ce drame peut toucher les confins de l’horrifique, et on ne sera pas déçus…
C’est ici les débuts non balbutiants de Carpenter, qui au carrefour de multiples influences va dans Assaut croiser avec maestria de nombreux genres, entre western contemporain, thriller, et cinéma horrifique. En trouvant même le moyen de caser l’air de rien un romantisme aussi discret qu’il est puissant. Si ces personnages et le cheminement général donnent parfois un sentiment de schématisme, propices à de nombreuses caricatures, et souvent très drôles par ailleurs c’est surtout un geste cinématographique intentionnel de la part d’un auteur. C’est le calme plat avant la tempête qui est ici vertigineux… Ce moment de la mise en place dramaturgique ferait presque penser à la réplique inoubliable « J’aime l’odeur du Napalm au petit matin » entendue dans Apocalypse Now (1979) dans ce saisissant contraste entre cette quiétude apparente et ce qui va se jouer dans cette latente ambiance de chaos. Wilson le prisonnier qui cherche surtout à avoir « un » clope et dont la seule certitude semble qu’il va prendre 90 ans de taule. Avec une des multiples répliques cultes d’une des multiples scènes d’anthologie de cet Assaut : « Dans ma situation, les journées c’est comme les femmes, chacune est sacrément précieuse et elle vous quitte à toute allure « … Qui d’emblée vient nous montrer une redoutable qualité stylistique et littéraire du cinéma de Carpenter. Clairement le héros « Carpenterien » n’est pas autre chose qu’un potentiel cadavre, un mort sursitaire. Tout le monde va converger vers le commissariat au chiffre maudit… Ces différents transferts s’opèrent dans une forme de dénuement scénaristique voulu d’un naturalisme extrême, diablement efficace et terrifiant.
De la première à la dernière minute, dans des assauts forcément très brefs, c’est flippant, captivant et prenant. C’est une forme de poésie dans ce que Carpenter nous dit de la violence des hommes. L’angoisse rode partout avant l’assaut. Le réalisateur ne boude pas son plaisir en prenant le temps de l’installer et ainsi faire frissonner son spectateur. Se met alors en place l’alliance de circonstance entre les prisonniers, la police, les secrétaires, face aux gangs (Carpenter himself y fait d’ailleurs une furtive apparition), qui offre une régalade autant qu’un déchaînement de balles qui sifflent. Ces gangs sont désincarnés, et sans paroles, zombifiés à souhait, ils sont l’incarnation du mal absolu tel La nuit des morts vivants (1968), effet voulu par le réalisateur, la caricature en moins. Dans une des scènes les plus intenses, Laurie Zimmer, dans le rôle d’une des secrétaires nous fait un numéro fou face aux pires des crapules… Elle n’a pas froid aux yeux, qui sont par ailleurs sublimes, y compris quand ils croisent ceux de Darwin Joston (dans le rôle de Wilson). L’humour à froid de celui-ci est piquant, et il finira par avoir « son » clope. Le sens de la narration de Carpenter porte déjà les germes d’un génie en devenir. La musique synthétique d’époque vient en rajouter. Incroyable ce que la peur et l’angoisse viennent dire de nous-mêmes… Entre folie, courage sacrificiel, peur panique, et exacerbation des névroses.
Le casting sera au rendez-vous de ce mix émotionnel. Acteurs peu connus à l’époque mais très expérimentés. Austin Stocker, en chef des assiégés, est touchant d’humanisme, Darwin Joston incarne un Wilson qui prendra finalement le lead, et son intrication émotionnelle est génialement incarnée. Laurie Zimmer quant à elle, livre une spectaculaire prestation d’authenticité dans sa détermination et jouant celle qui va se révéler au monde. Dans Assaut, s’exprime déjà ce qui guidera Carpenter ensuite dans la complexité de son œuvre et l’esthétisme maléfique de celle-ci avec cette poésie macabre, ses idées viles, et ses fantasmes malfaisants. Carpenter, C’est inlassablement inoubliable, c’est un genre à lui seul, c’est sincère, pur et brut, et malgré la peur et la violence à l’écran, ça fait un bien fou… C’est pas le tout, mais… « Z’auriez pas un clope ? »
Titre Original: ASSAULT ON PRECINT 13
Réalisé par: John Carpenter
Casting: Austin Stoker, Darwin Joston, Laurie Zimmer…
Genre: Policier, Action, Thriller
Sortie le: 05 Juillet 1978
Distribué par: –
EXCELLENT
Catégories :Critiques Cinéma, Les années 70