SUPER-HEROS MALGRE LUI (Critique Blu-Ray)

Par JM Aubert le juin 9, 2022 • ( Poster un commentaire )

SYNOPSIS: Apprenti comédien en galère, Cédric décroche enfin son premier rôle dans un film de super-héros. Un soir, alors qu’il emprunte la voiture de tournage, il est victime d’un accident qui lui fait perdre la mémoire. A son réveil, vêtu de son costume de justicier et au milieu des accessoires du film, il est persuadé d’être devenu le personnage du film avec une mission périlleuse à accomplir. Mais n’est pas héros et encore moins super-héros qui veut… Et encore moins Cédric.

Philippe Lacheau est un sale gosse, qu’on se le dise. Autant fan qu’influencé par l’univers des frères Farrelly, à qui l’on doit par exemple l’hilarant et culte Mary à tout prix  (1998), dans l’art du burlesque, des vannes qui claquent et des situations visuelles décalées et délirantes tous les 30 secondes, « Fifi » concède : «  Quand nous préparons un film, les gags visuels nous rassurent plus que les plaisanteries des dialogues, parce que nous nous disons « Bon, là, si tout se passe bien, les spectateurs devraient éclater de rire », alors que les réactions à une « punchline » sont beaucoup plus difficiles à prévoir. ». Belle lucidité, qui démontre que Fifi et ses potes ont bien assimilé que l’humour est une haute et sérieuse affaire de subjectivité, que faire rire est plus dure que faire pleurer. Ainsi, dans la bêtise assumée abyssale qui se caractérise par l’univers qu’ils ont su créé, tout est bien sûr très écrit. Tel Bernadette qui soufflait à l’oreille de Nicolas, on a envie de susurrer à Philippe Lacheau : «  Heureusement qu’on vous a  ». Car son cinéma défriche et réinvente les règles de la potacherie, et même si l’influence est clairement outre-Atlantique, lui et ses potes en font une sauce qui tâche bien frenchie, et il n’y a aucune honte à aimer cet humour dynamique façon dynamite, qui a de surcroît le mérite de faire venir dans les salles, et vu la sinistrose du moment, rien que ça, on prend. Le populaire n’est pas uniquement source de mépris, n’en déplaise aux adorateurs permanents de la déchéance. Fifi et sa bande ont aujourd’hui une place à part entière et bien singulière dans le cinéma français et c’est très bien ainsi.

Le culot de la séquence télé culte sur la chaîne cryptée, avec Kate Winslet, ou avec la bande originale de Titanic (coucou Céline) en fond, Lacheau qui n’est à ce moment que le bouffon cathodique du roi se pointe, grimé en Jack dégueulasse, sorte de Di Caprio crade et malaisant qui a survécu aux eaux gelées du Titanic, et qui sort un poulpe immonde de son futal, embrasse Kate «  My ka kate » ».. comme il dit, avec des fausses dents immondes… Celle-ci joue le jeu et racontera partout après dans d’autres interviews qu’elle est tombée sur un Français un peu taré, mais tellement drôle… Une anecdote qui dit tout et une jolie récompense. L’humour à la truelle de Lacheau et ses copains fait du bien entre deux films intellos !!! Il n’y a pas à s’auto-flageller en cachette pour l’assumer. Super héros malgré lui  dans la droite ligne de leur filmographie, pourrait être résumé par les qualificatifs : Bourrin, potache, absurde, pourri, lourd, tous les adjectifs du registre de l’humour gras défile, mais le truc c’est qu’on se marre quand même tellement souvent, on se bidonne, on se poile, et comme c’est l’unique but recherché, tout se passe bien…

C’est régressif et irrévérencieux au possible, et avec des vannes toutes les 15 secondes, dont certaines ne dépassent pas le stade anal, mais d’autres qui sont quand même des trouvailles jubilatoires. Pour ce faire, on remercie l’intelligence de Philippe qui en faisant durer sa grosse blague 1H22 trouve le format idéal, au regard de l’avalanche de vannes et du trop-plein de tout. Au final, Super-héros malgré lui passe comme un souffle. Peut-être un peu moins écrit que le dernier en date Nicky Larson et le parfum de cupidon (2019), l’énergie de la bande à Fifi est tellement efficace que quasi tout passe. Il fait rentrer ses vannes et ses répliques qui sont presque toutes des punchlines au tractopelle massacrant l’argenterie, mais si on aime le bourinnage en règle, on est rassasiés. La mise en scène est sur-vitaminée, les vignettes qui se succèdent, qu’il s’agisse des interactions simples, des scènes d’action, de cascades ou autres effets visuels sont très pros et n’ont rien à envier aux modèles du genre. La musique est également pensée dans des alternances originales, au service de la narration. Quelques morceaux piochés au hasard, tant la boîte de crottes…. en chocolat déborde comme la vanne du prêtre en arrière-plan, qui peste, car une fois son colis trouvé, la poupée gonflable n’est pas à la bonne dimension, vu que c’est taille adulte…. Fallait oser…. Rire gras, mais rire quand même…

Il s’agit bien d’un super héros, avec aucuns super pouvoirs et que des supers gadgets… La scène de baston finale est quand même assez épique, et incarne parfaitement ce que peut être un super héros… à la française… Le casting rassemble la bande habituelle et comme à chaque fois, qu’il s’agisse de Philippe Lacheau, Julien Arruti, Tarek Boudali, Elodie Fontan, leur engagement est total, même si leur registre manque parfois un brin d’originalité. La force du réalisateur est d’aller chercher des « noms » parfois surprenant comme il l’a fait aussi bien avec Gérard Jugnot et Clotide Courau dans Babysitting  (2013) ou Pamela Anderson dans Nicky Larson et le parfum de cupidon (2019) !! Ici, c’est particulièrement Jean Hugues Anglade en papa flic, et Chantal Ladesou, en productrice bien cynique qui se démarquent et nous font aussi beaucoup marrer. Au final, Super héros malgré lui , caractéristique de « l’univers Lacheau » complètement déjanté, est une véritable promesse de rire familial, il n’y pas d’autres objectifs. Oui c’est parfois « un peu » lourd, mais tellement plus inventif et ruisselant que bien de comédies fades, dont la bienséance et la sagesse extrême sont exaspérantes. Ici, on se marre, on sait pourquoi, et Philippe Lacheau s’impose en super-héros d’une lourdeur très jubilatoire !!