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MISSIONS (Critique Saison 3) Un voyage plus satisfaisant que l’arrivée…

SYNOPSIS: Sam Becker a quitté Mars en laissant Jeanne Renoir et l’équipage à leur sort. Mais son retour est plus difficile qu’il ne l’imaginait. Sur Terre, personne ne l’attend. Il comprend qu’il est revenu dans un monde différent. Un monde où personne n’est jamais parti sur Mars. Ceux qui le retiennent désormais prisonnier s’interrogent sur sa véritable identité. Une seule personne, Peter Kaminski, finit par croire à son histoire et se mettre à la recherche des membres de la mission décrite par Sam. Débute alors une enquête autour d’une question obsédante: qui a modifié le Temps, et pourquoi ?

Environ deux ans après la conclusion de sa deuxième saison (ça fait décidément beaucoup de deux cette histoire), Missions nous revient enfin avec sa suite et fin. Cette saison 3 a en effet la lourde tâche de boucler toutes les intrigues encore en suspens et surtout de révéler enfin les grands desseins qui attendent Jeanne (Hélène Viviès) et ses comparses d’infortune. Pour ceux qui ne connaîtraient pas la série il n’est jamais trop tard pour se rattraper : show de science-fiction français (c’est suffisamment rare pour le re-souligner et attiser la curiosité non ?) d’OCS, la série emmène le téléspectateur sur la planète Mars à travers une mission spatiale qui va très vite dégénérer. Du moins c’est le postulat de départ dans la mesure où la série a bien évolué depuis cet état de fait et qu’elle n’hésite plus, comme en témoigne toujours cette troisième saison, à s’essayer à diverses expérimentations géographiques et temporelles. Si les deux premières salves contenaient chacune une dizaine d’épisodes d’environ 26 minutes, la troisième et dernière change de format pour l’occasion de son grand départ : il s’agira cette année de 5 épisodes d’environ 45 minutes. Cette mutation est d’ailleurs amorcée et exécutée avec brio, sans dépaysement ni manque de rythme particulier. Toujours en regardant le générique très esthétique de la série dont les images sont portées par la magnifique musique Genèse de Janski Beeeats (ces dernières années nous avons saigné ce morceau en boucle), il est temps de prendre la direction de ce dernier voyage pour mars…ou ailleurs.

Assez paradoxalement, cette nouvelle saison s’ouvre avec l’un de ses meilleurs épisodes, si ce n’est le meilleur et ce pour plusieurs raisons. La première est que le mystère n’y est pas à échelle humaine, mais que l’action si. Nous connaissons les travers de la série qui peut avoir un certain côté Lost dans la mesure où, en s’inspirant énormément de Prometheus, elle a prolongé son idée afin de dévoiler ce que nous n’avons jamais pu voir avec la franchise avortée de notre cher Ridley Scott (notamment suite à la débâcle Covenant) tout en préservant égoïstement un certain nombre de résolutions de mystères…et ce quitte à nous balader copieusement et à nous balancer de grandes généralités philosophiques et métaphysiques pour parfaire de nous endormir et gagner du temps. Le premier épisode s’affranchit de ces dérives (mais ça ne durera malheureusement pas) afin de poser le concept de la saison : Samuel Becker (Ralph Amoussou) réussit à rentrer péniblement sur Terre en échappant de peu au trépas. A son réveil il est retenu captif dans une étrange base secrète et doit enchaîner les interrogatoires. Plus étrange encore, il semble être revenu dans un monde semblable au sien mais…qui n’est pourtant pas celui d’origine (décidément après Spider-Man : No Way Home, cela semble être l’année du multivers). Dans ce monde parallèle personne ne semble être parti sur mars, ni lui, ni ses anciens compagnons. Peter Kaminski (le fascinant et brillant Lucas Englander, sans aucun doute un acteur extrêmement prometteur à suivre de très près, qui se révèle d’ailleurs être l’un des piliers de cette nouvelle saison) en charge de poser les questions et d’analyser les éventuels mensonges de Becker comprend très rapidement que l’explication dépasse l’humanité toute entière. Ce premier épisode, très centré sur Peter Kaminski (et pas seulement Becker donc) est brillamment exécuté, tant en termes d’écriture, d’interprétation, de réalisation, de montage que de composition. Missions nous rappelle d’ailleurs lors de certains morceaux (dont celui qui clôture l’épisode 1) qu’Etienne Forget est capable de nous proposer un habillage musical parfois très beau, toujours élégant et tout en sobriété.

Cette saison et cette confrontation d’univers permettent donc de ramener un certain nombre de personnages, y compris quelques-uns laissés précédemment pour morts et nous n’allons pas nous en plaindre dans la mesure où le casting est de haute volée : outre Hélène Viviès nous avons par exemple été très heureux de retrouver le brillant Mathias Mlekuz en William Mayer, la puissante Barbara Probst en Alice Meyer (dans le rôle de sa fille donc), ou le magnétisant Vincent Londez (Ivan Goldstein).

Mais passé le premier épisode, la promesse est-elle tenue ? Pas tout à fait. Missions est incontestablement une production dont nous pouvons être fiers mais elle nous a démontré par le passé qu’elle ne semblait pas tout à fait maîtriser sa direction scénaristique, ou en tout cas que cette dernière manquait sûrement de suffisamment de consistance pour avancer sans nous esbroufer. Missions est ambitieuse, au même titre que l’était Prometheus dont elle reprend certains grands axes : dès lors, quand une expédition spatiale d’apparence presque banale se retrouve à confier à ses protagonistes la découverte des origines de l’univers et le sort de la Terre tout en questionnant la moralité et le mysticisme de chacun, forcément il y a de quoi se perdre en chemin. Cette dernière saison ainsi que son épisode final (assez décevant nous devons bien l’avouer) sont donc scénaristiquement en dents de scie tandis que cela démarrait pourtant sous les meilleurs auspices. La série propose trop d’esquisses d’explications, de théories générales et ce par rapport à des enjeux eux aussi très généraux. Le show, pourtant plein d’idées, semble s’embrouiller dès lors que le curseur cesse de s’attarder sur les personnages et embrasse l’angle bien plus vaste de la Terre, de Mars et de l’avenir de ces dernières. A l’image de la saison 2, la série avance dans l’exploration de ses aspirations tout en pédalant dans la semoule de temps à autre. Le dernier épisode est ainsi un florilège de choses qui, derrière un aspect d’apparentes révélations, ne dévoile finalement que des concepts et questionnements beaucoup trop nébuleux et redondants pour aboutir à une offrande réellement généreuse malgré le parti pris de la conclusion. Le voyage est donc bien plus satisfaisant que l’arrivée, mais cela a souvent été le cas avec Missions et nous pouvons dire qu’au bout du compte elle sera toujours restée fidèle à elle-même.

Malgré un scénario qui aurait gagné à être peaufiné, Missions achève de convaincre du savoir-faire de son équipe à tous les autres niveaux. Au passage nous réitérons que Lucas Englander est vraiment la découverte de la saison tant son interprétation et son charisme sont électrisants. Adieu Missions, peut-être aurons-nous l’occasion de nous recroiser un jour sur Mars ou dans un autre univers, et peut-être que cette version de la série aura réellement réussi à être le coup d’éclat qu’elle aurait pu être en touchant les étoiles du bout des doigts.

Crédits: OCS

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