Critiques Cinéma

FREE GUY (Critique)

SYNOPSIS: Un employé de banque, découvrant un jour qu’il n’est en fait qu’un personnage d’arrière-plan dans un jeu vidéo en ligne, décide de devenir le héros de sa propre histoire, quitte à la réécrire. Evoluant désormais dans un monde qui ne connaît pas de limites, il va tout mettre en œuvre pour le sauver à sa manière, avant qu’il ne soit trop tard… 

Le cinéma et les jeux vidéo entretiennent une relation d’amour-haine particulièrement colorée, suffit-il de connaître les détails des péripéties de chaque adaptation d’une saga vidéoludique sur grand écran pour le voir. Les exemples sont innombrables, et malheureusement rarement mémorables. Resident Evil par Paul WS Anderson, Assassin’s Creed par Justin Kurzel, Sonic par Jeff Fowler : en voilà des cas de figure industriels passionnants à disséquer et à analyser, bien que l’adaptation de jeu vidéo ne soit clairement pas un genre maudit aux vues d’une poignée de produits réussis (y compris dans les œuvres citées précédemment). Mais si cette transition est aussi compliquée, c’est certainement dû en grande partie aux différences fondamentales de format entre les deux médias, proposant chacun à leur façon des manières radicalement opposées de raconter des histoires. Ainsi, chaque adaptation a son lot de règles à suivre pour être bien accueillie par le public : arriver à s’émanciper de son origine tout en assurant une retranscription fidèle de l’univers pour parvenir à séduire autant les néophytes que les fans hardcore qui pardonnent difficilement le moindre écart narratif ou visuel. Pourtant, le cinéma est tout autant en droit de se passionner pour le genre vidéoludique qu’à la littérature qu’il adapte depuis sa naissance. C’est pour cette raison que depuis quelques années, les salles obscures accueillent des films s’inspirant du monde des jeux vidéo sans en adapter un précis. Dans Les Mondes de Ralph, un bad guy d’un jeu d’arcade en a marre de sa position de méchant et décide de quitter son jeu. Dans Pixels, des extraterrestres utilisent nos propres figures de jeux vidéo pour planifier leur invasion. Dans Ready Player One, un monde virtuel est rapidement devenu la seule échappatoire pour toute la population, et devient au moment de la mort de son créateur la clé qui permettra de prendre le contrôle de la société toute entière. Et en 2021, Ryan Reynolds incarne Guy, un PNJ (Personnage Non-Joueur) d’un jeu vidéo qui, en découvrant la nature artificielle de son existence, se retrouve au centre d’une guerre industrielle entre un patron complètement hystérique et déluré et un duo de programmeurs en quête de la vérité. C’est de ce Free Guy, le nouveau long-métrage de Shawn Levy, dont il est question aujourd’hui, promettant un spectacle jubilatoire à l’humour destructeur dont Reynolds sait parfaitement bien nous inonder.



Première chose à constater à la sortie de la salle de cinéma : Free Guy est indiscutablement hilarant, parvenant avec une aisance démentielle à jongler entre les tons et à maintenir ce décalage constant entre ce protagoniste qui n’a aucune idée qu’il est un personnage fictif dans un jeu vidéo et ces personnages issus du monde réel qu’il croise à chaque coin de rue. Free City (le jeu en question) prend alors des formes rappelant l’anarchie des modes multijoueurs de GTA V où tout le monde se tire dessus sans sommation, frappe des passants au hasard, braque des banques avec les plus grosses armes possibles, et échappe à des accidents de voiture improbables. En y ajoutant cette touche de fantaisie et de couleur qui sort tout droit de Fortnite, la direction artistique du film se recouvre de cette allure de chaos désorganisé qui fait tout exploser pour au final se centrer sur Guy, probablement le personnage le moins intéressant de ce roaster de figures charismatiques et hautes en charisme que présente l’intrigue. Alors, à l’instar de La Grande Aventure Lego (avec qui Free Guy partage beaucoup de points communs), l’intrigue propulse ce nobody à la vie mécanique habituelle d’un personnage non jouable programmé pour faire des allers-retours millimétrés en délivrant ses deux-trois répliques uniques dans une quête existentielle où ce « Blue Shirt Guy » sera très vite désigné comme la véritable clé de la victoire de nos protagonistes. Guy est ainsi particulièrement attachant par son aspect lisse qui se dissipe derrière une remise en question touchante et très juste donnant à ce protagoniste absurde dans un monde régi par les règles les plus arbitraires possibles des aspérités tragiques qui accompagnent alors les changements de registre du film. Car Free Guy, loin d’être un blockbuster concon empilant gratuitement les clins d’œil lourdauds aux plus gros jeux vidéo modernes, est une véritable réussite scénaristique, menant son chaos atmosphérique vers des finalités et des résolutions toujours plus originales qui concluent avec une grande réussite ce spectacle jubilatoire qui ne se refuse rien pour raconter son histoire.



Et tout cet équilibre remarquablement mis en place tient aussi beaucoup sur les épaules de son casting, mené par un Ryan Reynolds exemplaire de self-control, donnant corps à un protagoniste touchant et paradoxalement très humain tout en laissant aux véritables héros du film une place de luxe. Eux, d’ailleurs, sont interprétés avec beaucoup de talents par Joe Keery et Jodie Comer qui possèdent à leur tableau certains des meilleurs moments du film à travers leur quête. Mais un tel film serait vain sans un bon bad guy, celui-ci prenant les traits d’un Taika Waititi improbablement hyperactif, donnant à son Antwan un air de geek ambitieux et manipulateur qui parvient, entre deux répliques sublimement délicieuses, à construire une réelle menace pour nos protagonistes.



Shawn Levy signe avec son Free Guy une réussite indubitable qui se dévoile petit à petit comme un divertissement grand public brillamment malin et redoutablement inventif, aussi jouissif et jubilatoire que lumineux. Cette plongée dans sa Free City chaotique et décomplexée est l’aventure estivale idéale, un feel-good movie lumineux et inventif. Aux manettes de ce champ de bataille au centre duquel il dévoile un cœur immense et beaucoup d’émotions, Levy signe un film dense et épique qui parvient à s’affranchir de ses inspirations pour se créer sa propre place. Free Guy n’est ni La Grande Aventure Lego, ni Ready Player One, ni le Truman Show. Free Guy, c’est un blockbuster hilarant et ultra plaisant qui place un grand sourire sur le visage tout en permettant à son public de s’évader pendant deux heures dans un monde inarrêtable. Et même si s’enfermer dans des mondes virtuels a pour beaucoup été notre quotidien pendant ces derniers mois, on ne peut que se réjouir de ce Free Guy terriblement dans l’air du temps qui fera plaisir aux petits comme aux grands. Cet été se teinte du bleu de la chemise de Guy et révèle sous ses airs absurdement démesuré un véritable monde bien moins virtuel qui lui aussi a cruellement besoin de cœur, d’humanité et de héros malgré eux.

Titre Original: FREE GUY

Réalisé par: Shawn Levy

Casting : Ryan Reynolds, Jodie Comer, Lil Rel Howery …

Genre: Comédie, Aventure, Action

Sortie le: 11 août 2021

Distribué par: The Walt Disney Company France

EXCELLENT

1 réponse »

  1. Je craignais un pute et simple remake de Truman show. Apres la lecture de ton article j’irais y jeter un oeil. J’aime bien ryan reynolds meme s’il a un tres gros soucis dans son choix de films, jamais catastrophiques mais jamais geniaux non plus…

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