Critiques Cinéma

UN VAMPIRE A BROOKLYN (Critique)

SYNOPSIS: Maximillian appartient à une longue lignée de vampires exilée depuis des siècles aux Caraïbes. Pour assurer sa descendance, il gagne New York avec l’espoir d’y trouver sa semblable, qui lui donnera descendance. Très vite, il découvre l’élue : une femme, policier de son état, répondant au nom de Rita Veder…

Au rayon des projets improbables, le film qui nous intéresse ici en tient une sacrée couche au sein de la filmo plus qu’inégale du regretté Wes Craven. Car le papa de Freddy Krueger, érudit et philosophe avant d’être abusivement qualifié de « maître de l’horreur », s’est toujours efforcé durant sa carrière de se diversifier et d’explorer de nouveaux horizons. Bien avant de donner dans le mélo à Oscars avec Meryl Streep (La Musique de mon cœur) ou dans le thriller aérien sous Lexomil (Red Eye), Craven avait pris soin de sa caler un projet sacrément étrange entre son chant du cygne du meilleur boogeyman du 7ème Art (Freddy sort de la nuit, toujours son meilleur film) et son triomphe au box-office avec le premier Scream. Quel projet ? Ni plus ni moins qu’un film avec Eddie Murphy en tête d’affiche, écrit par le frère et le cousin de celui-ci ! Et dès le départ, il y avait de quoi se dire que le projet était sinon maudit, en tout cas destiné à coincer. Fan des films de Craven, la star du Flic de Beverly Hills, alors au sommet de sa carrière, rêvait depuis longtemps de jouer le méchant d’un film d’horreur. Quant à Craven, l’envie d’investir la comédie populaire en compagnie d’une star hollywoodienne n’était pas pour lui déplaire. On voit d’ici le tableau : un acteur connu pour faire rire, un cinéaste connu pour faire peur, et l’un et l’autre qui, à trop vouloir faire l’inverse de ce qu’ils font d’habitude, se retrouvent contraints de miser sur un compromis pas toujours adroit ! Ajoutez à cela un scénario qui ne cessa d’hésiter entre la comédie délirante et l’horreur pure durant ses innombrables phases de réécriture, et cela explique parfaitement l’incroyable schizophrénie du résultat final.



Savoir que Wes Craven s’est attelé à réécrire le script en compagnie de ses propres scénaristes explique en partie l’absence de direction claire du film. En y injectant de la romance (le vampire Maximilian cherche ici à s’accoupler avec sa « descendante » en l’occurrence une femme-flic noire du quartier de Brooklyn), en installant l’histoire dans un cadre social en vue d’évoquer la condition des Noirs aux Etats-Unis (chose que le film ne traite jamais) et en mettant l’accent sur la dégradation physique d’un escroc devenu l’esclave zombiesque du vampire (cela file moins de frissons que de grimaces dépitées), le cinéaste tente un grand écart qu’il ne maîtrise pas très bien. Comme coincé entre les impératifs d’un studio inquiet et ceux d’une star désireuse de ne plus faire le pitre, il joue ici les illustrateurs de luxe, limité à soigner le très beau décorum et les rares mouvements de caméra pour donner à son film un minimum de classe visuelle. Ce qui cloche – et ce qui suffit à couler le projet – réside dans l’absence totale de ton. Cela pourrait être un avantage, mais pas ici. En fait, Craven fait la même erreur que beaucoup de cinéastes avant et après lui : accorder une trop grande liberté d’action à Eddie Murphy. Ce dernier fait certes de très beaux efforts dans le rôle de Maximilian : toujours cruel et suave, souvent sensuel et brutal, l’acteur montre ici une autre facette de son jeu d’acteur en coupant la déconnade de son registre habituel (c’est au sidekick Kadeem Hardison que revient la tâche d’être drôle, ce qu’il n’arrive jamais à être). Mais à côté de ça, quel dommage que la sortie voisine du Professeur Foldingue l’ait conduit à se grimer dans deux rôles supplémentaires – un pasteur possédé par le vampire et une petite frappe à gros pif. Deux rôles secondaires où il en fait des caisses sous une couche de latex trop épaisse (on sait désormais que les maquillages de l’atelier K.N.B n’avaient pas encore été testés au moment du tournage !), et à travers lesquels le gag le plus inspiré se résume à entendre un pasteur gospel dire que « le Mal c’est bien » à une assistance médusée !


Au vu de tout cela, Un Vampire à Brooklyn subit le plus gros claquage qui soit, tiraillé entre des tentatives d’humour qui tombent systématiquement à plat et des velléités pseudo-horrifiques qui plafonnent au plus bas niveau (l’approche de la mythologie vampire fait ici un gros pas en arrière cinq ans après le Dracula de Coppola !). Pour autant, le film n’a pas les contours d’un navet. La seule signature de Wes Craven au générique suffit à rendre le résultat singulier quand on connait le reste de sa filmographie, tout en se satisfaisant de voir le cinéaste sortir un minimum du genre dans lequel on l’a enfermé (ce genre de tentative, même inaboutie, a quelque chose de foncièrement sympathique). Et puis surtout, la présence d’Angela Bassett constitue le gros point fort du film. Culte à point depuis la sortie de Tina et de Strange Days, et toujours d’une hallucinante beauté, l’actrice joue ici un personnage suffisamment consistant et torturé pour que l’on suive le récit avec un minimum d’intérêt. C’est pour elle que l’on accepte de pomper le sang de ce drôle de ratage, en étant conscient que notre soif d’audace et de nouveauté ne sera pas rassasiée pour autant. Il faudra attendre le film suivant de Craven pour obtenir satisfaction…

Titre Original: VAMPIRE IN BROOKLYN

Réalisé par: Wes Craven

Casting : Eddie Murphy, Angela Bassett, Allen Payne

Genre: Fantastique

Sortie le : 22 mai 1996

Distribué par: –

PAS GÉNIAL

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