SYNOPSIS: Dans cette nouvelle aventure Axel Foley va mener l’enquête dans le célèbre parc d’attractions de Wonderworld à Beverly Hills. Il recherche le dangereux commanditaire d’une bande de voleurs de voitures responsable de la mort de son ami Todd.
Qui a vraiment envie de découvrir prochainement un quatrième opus du Flic de Beverly Hills ? Ce n’est pas que l’idée soit mauvaise en soi, mais une attente si prolongée depuis presque deux décennies n’était pas gage de rassurement (ceux qui ont se souviennent encore des Bronzés 3 ou de la suite des Trois frères, suivez mon regard…), qui plus est quand la star de la franchise en question ne cessait de retarder l’échéance et de passer pour un has been entre deux prestations d’acteur mémorables chez Bill Condon (Dreamgirls) et Craig Brewer (Dolemite is my name). En attendant que le projet se concrétise prochainement sur Netflix, revoir la trilogie d’origine laisse un sentiment mi-figue mi-raisin, parce qu’un paradoxe s’est installé : c’est étrangement son troisième volet, à savoir le plus décrié de la saga, qui apparaît aujourd’hui comme le plus amusant et le plus rafraichissant à revoir, quand bien même il découlait lui aussi d’un development hell assez édifiant (pas moins de sept années d’attente après deux gros succès au box-office !) et aura offert à Eddie Murphy l’un des plus gros échecs financiers de sa carrière. Mais avant de rentrer dans le vif du sujet, mieux vaut se faire un petit check-up des faits en ce qui concerne le passé de la franchise.
Ce que l’on avait retenu du Flic de Beverly Hills ne se limitait qu’à peu de choses : une ambiance chaude de Beverly Hills en décalage par rapport à celle de Detroit (ville d’origine du protagoniste), un thème musical culte de Harold Faltermeyer à base de quelques beats de synthétiseur, et bien sûr la tchatche décontractée d’Eddie Murphy qui fait quasiment tout le boulot. Mais en dehors de cela, ce projet conçu au départ pour Sylvester Stallone ne brillait ni par son intrigue (une vendetta lambda qui fut pourtant nominée aux Oscars !) ni par ses seconds rôles (tous bouffés par le charisme de Murphy) ni par sa mise en scène (Martin Brest illustrait son scénario au lieu de lui offrir un quelconque relief). Sympathique mais poussif, ni très intense ni très drôle dans sa dimension de film populaire, Le Flic de Beverly Hills ne s’écartait donc pas des canons du tout-venant de la comédie policière ricaine, et faisait même pâle figure face au très réussi 48 heures qui lorgnait vers la recette payante du buddy-movie pour dynamiser ses propres enjeux de récit. Quant au Flic de Beverly Hills 2 tourné trois ans plus tard, c’était un peu kif-kif : le scénario restait aussi épais que du fil dentaire, et l’humour d’Eddie Murphy stagnait hélas au ras du lino face à une action plus prononcée. Tout juste pouvait-on reconnaître que le spectre de la resucée n’était atténué que par deux atouts pas négligeables : d’une part la présence de la sculpturale Brigitte Nielsen en « big bitch » ; d’autre part celle du brillant Tony Scott à la réalisation, lequel apporta à la franchise sa patte visuelle (Scope rutilant, Californie iconisée, filtres à gogo…). Un diptyque estampillé 80’s qui, malgré des bribes de culte qui ne se discutent pas, n’arrivait pas à pousser les curseurs du genre aussi loin que voulu.
On mentirait en prétendant que le troisième opus a réussi à changer la donne. Ce serait même plutôt le contraire : cette nouvelle enquête de l’électrique Axel Foley ne repose là encore que sur une énième vengeance, avec un vilain bad guy à traquer (Timothy Carhart, alias le violeur de Thelma & Louise), toujours dans un lieu très caractéristique de la côte californienne. Dès la scène d’ouverture, où Axel assiste à l’assassinat de son supérieur, on sent que le scénariste Steven E. DeSouza (bourrin à qui l’on devait les scripts de Commando et de Die Hard) essaie de rendre l’intrigue un tant soit peu dramatique et humaine. Mais le jeu d’Eddie Murphy ne fait rien pour crédibiliser cela : totalement inexpressif durant la mort en question (rien ne se dégage de son jeu), le personnage enchaîne les grimaces et les roulages d’orbites pendant la poursuite en voiture qui suit, comme si rien de tragique ne s’était passé. C’est qu’on sent surtout qu’Eddie Murphy, alors sur le coup d’une carrière d’acteur accusant des signes de faiblesse, a été lâché en roue libre dans le film, sans doute même pas dirigé par celui avec qui il avait déjà tourné Un fauteuil pour deux et Un Prince à New York. Car, oui, c’est le très sympathique John Landis que l’on retrouve ici aux commandes de cet opus 3. Et le bonhomme, qui faisait alors ses débuts dans le « blockbuster », s’est clairement contenté d’un rôle d’exécutant, laissant derrière tout relief de mise en scène avec la seule envie de s’amuser avec ses acteurs et (surtout) son décor.
La rupture avec les deux premiers films semble consommée en tous points : exit le Scope luxueux de Tony Scott (on revient à du format 1:85 avec un filmage banal et une photo impersonnelle), bye-bye la présence du tandem Simpson/Bruckheimer à la production (ce sont les pontes de la saga Jack Ryan qui prennent le relais), au revoir Harold Faltermeyer et ses synthés (on a ici demandé à Nile Rodgers de revisiter le thème culte de la franchise en mode symphonique !), hasta la vista les seconds couteaux les plus emblématiques (où sont passés John Ashton, Ronny Cox et Paul Reiser ?). Ne reste donc plus que l’agent Axel Foley, lâché cette fois-ci dans un parc d’attractions à thèmes calqué sur Disneyland, et dont le seul nom (« Wonder World ») devrait suffire à vous remettre dans la tête – et pour un bon moment ! – une très entêtante chansonnette. Rien de bien sorcier en soi, puisque le décor n’est jamais clos (ce qui nous prive de la moindre tension) et que le personnage passe tout le film à faire des allers-retours entre l’intérieur et l’extérieur du parc. C’est pourtant dans l’exploitation même des recoins du parc d’attractions que le film marque de sacrés points : John Landis traite chaque composante du décor (attraction, déguisement, coulisse, structure en carton-pâte…) comme une articulation précise du récit, parallélise ainsi le parcours de Foley avec celui d’un héros de fantaisie qui joue les éléphants dans un magasin de porcelaine, et lâche même à quelques reprises de petites piques sur la dimension capitaliste de ce genre d’endroit (l’hypocrisie de ses dirigeants, l’envers du décor de l’ »usine à rêves », cette satanée chanson qui reste dans la tête…). Nul doute que le grand taquin qu’il a toujours été ne s’est pas privé d’y glisser un lien avec le fonctionnement du système hollywoodien.
Là où les deux opus précédents avaient ainsi tendance à obéir à un programme trop cousu de fil blanc (on s’ennuie toujours quand « rien ne dépasse »), ce « cinéma d’attraction » dans lequel se place John Landis permet à la franchise d’obtenir la surcharge d’humour qui lui manquait. On le sent surtout quand Eddie Murphy se lâche pleinement, que ce soit dans une cérémonie de récompense ou dans une estrade de Wonder World. On le sent également quand le rescapé Bronson Pinchot – aperçu dans le premier film – refait son apparition en galeriste efféminé et reconverti en marchand d’armes : son invention, le fameux « Annihilateur 2000 » (sorte de croisement invraisemblable entre l’arme d’assaut, le couteau suisse et le Thermomix !), donne naissance à l’une des scènes les plus drôles du film. On le sent enfin quand ce cher Billy Rosewood, toujours joué par Judge Reinhold, joue les DDO-JSIOC (on vous laisse découvrir la signification de ce sigle !) au sein des forces de police de Los Angeles, comme toujours en se croyant moins benêt et maladroit qu’il ne l’est. Sans parler du gros « plus » du film : une avalanche de caméos classieux, en réalité des potes cinéastes que Landis s’est amusé à caser un peu partout tout au long du récit (George Lucas, Arthur Hiller, Martha Coolidge, Barbet Schroeder, John Singleton, Joe Dante, Ray Harryhausen…). Ça ne sert à rien, mais ça fait vraiment sourire de voir tous ces personnages du parc d’attractions Hollywood faire un petit coucou au public cinéphile que nous sommes. Rien que pour ça, ce troisième épisode mérite d’être réhabilité un minimum. Par contre, surtout, s’il vous plait… ARRETEZ CETTE PUTAIN DE CHANSON A LA CON !!!
Titre Original: BEVERLY HILLS COP III
Réalisé par: John Landis
Casting : Eddie Murphy, John Saxon, Hector Elizondo …
Genre: Policier, Comédie, Action
Sortie le: 17 août 1994
Distribué par: United International Pictures (UIP)
BIEN
Catégories :Critiques Cinéma