J'ai quelque chose à vous dire...

J’ai quelque chose à vous dire… Louis de Funès

Cher Monsieur De Funès,


D’aussi loin que je m’en souvienne vous avez fait partie de ma vie. Autant vous dire que vous êtes un familier de mes dimanches soirs en famille et que jamais, vous ne les avez plombé avec un film d’auteur ennuyeux ou avec un drame qui m’aurait fait plonger dans des abîmes de souffrance et de tristesse. Avec vous ça a toujours été des rires, des barres de rire, des rires francs et massifs, un plaisir indescriptible, enfantin, qui m’a apporté tant de bonheur que je ne m’en suis jamais lassé. C’est, comme beaucoup des enfants des années 70/80 et des générations suivantes, grâce au cinéma du dimanche soir de la Première chaîne de télévision que nos chemins se sont croisés pour ne plus jamais se quitter. Je ne saurais évidemment pas dater ni me souvenir avec précision du premier film dans lequel je vous ai vu mais j’aurais tendance à croire qu’il s’agit du Gendarme de Saint-Tropez, raison sans doute pour laquelle j’éprouve toujours pour ce film une tendresse indescriptible. Ce n’est pas votre meilleur rôle, mais sans doute l’un des plus emblématiques de votre carrière, où, avec ce personnage veule, arriviste, carriériste mais tellement pétri d’humanité qu’il en devient le miroir de nos propres mesquineries, vous avez fait votre place en première ligne dans les acteurs que j’aime, voire même j’ose le dire, à qui je voue un culte.

Le premier véritable rôle qui vous a permis sur le tard d’accéder à la gloire, celui de Jambier, l’épicier du marché noir de La traversée de Paris, j’étais trop jeune pour en prendre toute la mesure à l’époque où je l’ai découvert, c’était je crois dans un extrait de l’émission La Séquence du Spectateur, mais quelle présence folle vous aviez déjà, vous voliez la vedette à Bourvil et Gabin dans ces quelques minutes mythiques. J’ai mis un certain temps, je le confesse, à aimer et à appréhender vos films avec la troupe des Branquignols comme Ah!, les belles bacchantes La belle américaine ou Le Petit Baigneur, mais vous y réalisiez de tels numéros d’équilibriste, vous étiez toujours si expressif, si génial dans vos inventions et votre sens du burlesque que j’y trouvais pourtant toujours un vrai plaisir. J’en ai vu beaucoup de vos films à l’âge où l’on se forge des idoles pour la vie, mais c’est avec la « Sainte-Trinité » Pouic-Pouic , Le Gendarme de Saint-Tropez et Faites sauter la banque, tous trois de votre complice Jean Girault, que je suis devenu accro à votre jeu, à vos grimaces, à vos mimiques, à votre sens du rythme, à la musicalité de vos tirades, à votre débit. Vous êtes entré dans mon cœur à ce moment-là de ma vie de petit garçon pour ne plus jamais en sortir. Car hormis les trois films cités plus tôt, j’ai aussi vu, revu et rerevu nombre des suivants jusqu’à plus soif, de la trilogie Fantômas (« Tu mens, tu mens, il ment ») au Corniaud (« alors là il m’épate, il m’épate, il m’épate« ), du Grand Restaurant à La Grande Vadrouille, d’Oscar aux Grandes Vacances, de La Folie des Grandeurs aux Aventures de Rabbi Jacob, de L’Aile ou la Cuisse à La Zizanie, j’en passe évidemment, mais ces films-là sont entrés dans mon cœur et s’y sont faits une place au soleil parce que vous les habitiez de votre génie.

Vous êtes de ces comédiens qui appartiennent au patrimoine du cinéma français et que les générations successives se sont appropriés comme des icônes, à l’instar d’un Jean-Paul Belmondo ou d’un Pierre Richard. Vous n’avez pas et n’aurez sans doute jamais de réel successeur (Christian Clavier a un temps été pressenti pour endosser cette étiquette qui s’est avérée trop lourde à porter sur la durée) et c’est tant mieux tant vous étiez unique et irremplaçable. Votre emploi au cinéma personne ne l’a porté comme vous. Vous pouviez être irascible, faux-jeton, menteur, manipulateur, raciste, exécrable on vous aimait quand même car vous donniez à vos personnages ce soupçon d’humanité qui en faisaient aussi des êtres friables. Rien n’était gratuit mais tout prêtait à rire. Les sujets les plus graves devenaient par la grâce de votre présence des histoires drôles qui faisaient se gondoler des salles entières. Ah ça oui je vous admire cher monsieur, que ce soit en tandem avec Bourvil dans les deux triomphes où Gérard Oury vous avait réunis ou seul en tête d’affiche pour Les Aventures de Rabbi Jacob, certaines de vos performances restent ancrées fortement dans mon disque dur interne. Ce dernier, sans doute mon préféré, me fait toujours rire aux larmes, que ce soit quand vous glissez dans la cuve à chewing-gum où que vous vous exclamez « C’était Farès? c’est effarant« . Je me régale à chaque fois, j’embarque dans votre sillage à chaque fois, je marche à vos exagérations à chaque fois. Alors que la Cinémathèque va vous honorer (Qui l’aurait cru?) et que des livres sortent à votre sujet, je me dis que vous êtes partis bien trop tôt alors que vous aviez encore tant à nous offrir. J’avais tout juste 11 ans et je vous regardais des étoiles plein les yeux égayer mes jours ternes et tristes. Je vous regarde encore avec ces mêmes étoiles dans les yeux. Le petit garçon que j’étais alors vous doit beaucoup. Qu’est-ce qu’on s’est marrés !

Votre dévoué Fred Teper.

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Actualités:

La sortie en édition collector limitée et numérotée de La Belle américaine chez LCJ Editions est un évènement. La troupe des Branquignols, fleuron de l’humour français des années 40 aux années soixante-dix dont Louis de Funès était l’un des membres a marqué de son empreinte la comédie française. Ici, Robert Dhéry le réalisateur (et fondateur des Branquignols) égratigne gentiment la bonne société, déroulant quiproquos et gags pour mieux déboulonner quelques préjugés, sa véritable intention est simplement d’amuser en s’amusant, et sa Belle américaine rend au cinéma populaire… toutes ses lettres de noblesse.

Plus de détails ici

SYNOPSIS: En achetant pour une somme dérisoire une superbe voiture, un petit ouvrier a fait l’affaire de sa vie. Cette « belle américaine » va néanmoins lui causer de nombreux déboires

SUPPLÉMENTS INÉDITS : – Interview d’Yves Calvi par Henri-Jean Servat qui revient sur la musique de Gérard Calvi

Livret de 40 pages sur l’histoire du film

EN BONUS : le DVD du film en version colorisée

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