SYNOPSIS: Harry, le disc-jockey subversif d’une radio-pirate, met en émoi tous les étudiants d’un campus. Son cynisme et sa rage trouvent un écho chez les collégiens frustrés d’une petite ville. Harry tient à garder l’anonymat. Nora, jeune étudiante fascinée par la personnalité d’Harry, entreprend de découvrir sa véritable identité. Elle n’est pas la seule, l’école et les forces de l’ordre aimeraient bien faire taire cette voix insolente.
Le teen movie et les problématiques qui y sont généralement rattachées – les premiers émois, la découverte, la prise de décision, l’affirmation de soi… – ont donné lieu à des dizaines de films cultes. La force d’identification à des sujets auxquels chaque adolescent est un jour ou l’autre confronté et qui fait que chacun y retrouve peu ou prou de ces émotions universelles explique pour beaucoup la popularité de ces histoires et, par ricochet, d’un genre qui n’en finit pas de se renouveler. Si Breakfast Club (John Hughes, 1985) est un film pivot dont l’empreinte est indélébile, d’autres œuvres ont profondément marqué ceux qui les ont découverts à l’âge où la vie génère encore des promesses. Sorti en 1990, Pump up the Volume symbolise pourtant le début d’une ère où les adolescents sont désormais sans illusions et sont confrontés à des problématiques beaucoup plus dramatiques que celles des films antérieurs, plus potaches et moins profonds. Écrit de concert par le réalisateur Allan Moyle (Empire Records) et le producteur Sandy Stern (ce dernier n’est pas crédité comme scénariste malgré son extrême contribution au script comme le reconnait lui-même Allan Moyle, du fait que la writer’s guild est très pointilleuse pour créditer un producteur à ce poste), Pump up the Volume a impressionné durablement ceux qui l’ont découvert au moment de sa sortie de par sa radicalité qui tranchait avec le teen movie en vogue à l’époque et de par sa relative subversion qui, avec le recul, apparait finalement assez sage.
Et pourtant, Pump up the Volume est véritablement un film vindicatif dont la rébellion est la thématique principale et qui est en cela en prise directe avec cette caractéristique typique de l’adolescence. La politique des auteurs donne la coudée franche à ces derniers pour pouvoir s’exprimer comme bon leur semble et ils ne se privent pas pour le faire, même si Allan Moyle confie que » le film devait être plus sombre, plus poétique, plus intense. » La collaboration entre Moyle et Stern durant la période d’écriture se passe relativement bien : « Allan et moi avons développé le scénario ensemble et ça nous a probablement pris un an de travail. Allan écrit très vite , il adore collaborer. On s’est très bien entendus pendant cette phase d’écriture. » Moyle est d’ailleurs conscient de ce qu’il doit à son co-auteur: « Sandy a eu l’intelligence et l’habileté de me pousser vers un film avec une histoire plutôt qu’un ensemble de circonstances. « Cette histoire, c’est celle de Mark Hunter (Christian Slater) nouvel arrivé dans une petite ville, qui vit ce déracinement dans un mal être existentiel qu’il exorcise sous le pseudonyme d’Harry la Trique au micro d’une radio pirate dans la cave de la maison familiale (un endroit là aussi très symptomatique de l’adolescence où il est bon d’avoir son petit monde à soi, son endroit réservé). Le scénario insiste sur le fonds du message du film qui est que la rébellion passe par la liberté d’expression et ce sous-texte est matérialisé par le mantra de Mark / Harry la Trique : « Dites des horreurs ».
Cependant la gestation du film n’est pas un long fleuve tranquille. La société de production qui devait le produire insiste pour que le personnage du jeune gay soit supprimé du scénario. Stern refuse catégoriquement et doit alors trouver de nouveaux capitaux mais fort heureusement, très vite, de nouveaux investisseurs apparaissent. Le casting n’est pas évident à finaliser. Allan Moyle pensait à John Cusack pour le rôle mais celui-ci venait d’arrêter les rôles adolescents. Il n’arrivait pas à voir Christian Slater pour jouer Mark/Harry car il le trouvait trop beau mais Stern lui a rétorqué « On lui mettra des lunettes ». Au Sunset Marquis pour un déjeuner, Moyle et Stern voient le comédien et c’est la seule rencontre qu’ils feront avec un acteur pour ce film, car à l’issue du repas, Slater est catégorique et annonce avec conviction: « Je veux faire le film ». Pour lui adjoindre une partenaire féminine à la hauteur, c’est Samantha Mathis qui est choisie, au terme d’un casting où de très nombreuses actrices sont auditionnées. La jeune comédienne remporte le rôle en réussissant une audition parfaite. Le tournage se déroule sans fausses notes comme le rapporte Stern : « On a tourné le film à Valencia là où tous les professionnels de Los Angeles doivent tourner. C’est à 45 mn du centre-ville. Le tournage a été fantastique grâce à l’enthousiasme d’Allan Moyle et à l’implication qu’il a demandé à chacun, technicien compris. » Le titre du film est trouvé à la toute dernière minute. Pour Pump up the Volume, les projections test sont très révélatrices. Durant l’une d’elles, la scène pivot de l’échange téléphonique entre Christian Slater et un jeune garçon gay et suicidaire ne fonctionne pas. Stern remarque alors un garçon dans le public qui parle de la scène et à qui elle posait problème et il fait passer un mot à Moyle disant en substance « « il nous faut ce gamin » et le garçon qui est dans la scène qui figure dans le film… c’est ce jeune gars ». «
Plutôt un film indépendant qu’un film de studio, Pump up the Volume sort dans les salles américaines le 22 août 1990 et malgré de bonnes critiques c’est un échec cuisant au box-office. Pourtant, avec le temps, le film se taille une réputation flatteuse qui rehausse son crédit. Il reçoit notamment le Prix du public lors du Festival du film américain de Deauville 1990. Si il est resté dans les mémoires et se regarde encore aujourd’hui avec un certain plaisir c’est que le fonds et la forme du film se confondent avec bonheur. La musique de Cliff Martinez joue un rôle déterminant dans le ressenti du film mais surtout les musiques additionnelles et notamment le Everybody Knows de Leonard Cohen, achèvent de conférer à l’ensemble une ambiance en parfaite adéquation avec le propos. Christian Slater est parfait dans ce personnage double qui à un moment donné, se retrouve submergé par les réactions que ses actions engendrent. Il parvient à apporter des nuances très subtiles à son interprétation. Sa manière de ne regarder personne dans les yeux, de mal s’exprimer au lycée alors que lorsqu’il est dans sa cave en train de faire son émission, il exulte littéralement et est totalement décomplexé, est particulièrement pertinente. Samantha Mathis joue un personnage au départ attiré par Harry la Trique, par sa voix, par son propos, mais dès qu’elle croise Mark Hunter, il ne lui est malgré tout pas indifférent. La jeune actrice -qui vivra avec Slater pendant le tournage une idylle passionnée- est pleine d’aplomb et tient la dragée haute à son partenaire. Leur duo est très homogène et participe conséquemment à la réussite du film. La mise en scène d’Allan Moyle est très efficace mais n’a pas l’ambition de révolutionner le genre. La dualité du personnage principal est représentée en terme de photographie par une lumière forte au lycée et par la pénombre dans la cave. C’est simple et carré et on n’en attend pas vraiment plus pour être contenté. Si le film peut sembler dater pour les jeunes générations, il n’en reste pas moins un objet singulier qui parle encore à la jeunesse d’aujourd’hui par le message contestataire qu’il délivre et son incantation à ouvrir les vannes à une libre expression. Il témoigne du mal être d’une jeunesse incomprise en proie à un légitime questionnement identitaire et dans lesquels chaque adolescent toute époque confondue peut se retrouver. Ce n’est pas la moindre de ses qualités.
Titre Original: PUMP UP THE VOLUME
Réalisé par: Allan Moyle
Casting : Christian Slater, Samantha Mathis, Cheryl Pollak …

Catégories :Critiques Cinéma