SYNOPSIS: Alex, petit garçon gracieux de 9 ans qui navigue joyeusement entre les genres, a un rêve : être un jour élu Miss France. 15 ans plus tard, Alex a perdu ses parents et sa confiance en lui et stagne dans une vie monotone. Une rencontre imprévue va réveiller ce rêve oublié. Alex décide alors de concourir à Miss France en cachant son identité de garçon. Beauté, excellence, camaraderie… Au gré des étapes d’un concours sans merci, aidé par une famille de cœur haute en couleurs, Alex va partir à la conquête du titre, de sa féminité et surtout, de lui-même…
Le cinéma (mondial, mais aussi français) commence depuis quelques années à mettre en lumière des représentations (plus ou moins juste à chaque fois, on en conviendra) de certaines minorités sociétales jusqu’alors oubliées des médias. Si bien qu’il n’est pas étonnant de voir aujourd’hui un projet comme Miss voir le jour. Miss raconte l’histoire d’Alex, un jeune garçon qui rêve depuis sa tendre enfance de gagner le concours Miss France. Il fait alors taire son désir lorsque ses parents décèdent tragiquement. Alex, maintenant vingtenaire, en retrouvant une vieille connaissance qui, elle, a réussi à atteindre son rêve, s’autorise à y repenser. Avec l’aide de la famille qu’il s’est construite autour de lui, il va se lancer corps et âme dans une aventure qui le mènera vers le concours Miss France, cachant ainsi son identité à tout le monde.
Là où Miss vise juste, c’est qu’il est avant tout un récit d’initiation, une quête d’identité de notre protagoniste plus qu’un message social. Avec tendresse, Miss dessine la vie d’Alex, en pleine réflexion sur ce qu’il est et sur ce qu’il veut être. Et c’est aussi une réflexion sur sa part de féminité, celle qu’il doit embrasser pour être enfin cette personne qu’il veut être depuis l’enfance. Si tous ces thèmes sensibles et sérieux sont traités assez frontalement dans le film, c’est bien son humour et sa bonne humeur qui nous sautent aux yeux lors du visionnage. Grâce à des personnages hauts en couleurs, Miss arrive à transmettre une lumière et une joie qui permet de passer un très bon moment, tout en douceur. On pensera notamment à cette famille, complètement dysfonctionnelle au début du récit, composée de rebuts de la société, rejetés qui se sont trouvés malgré eux. Une famille par défaut qui va devenir au gré des aventures une vraie Famille, avec un grand F. Celle qui nous accompagne jusqu’au bout de nos projets les plus fous. Lola, une prostituée travestie, Yolande la mère de substitution à cheval sur ses principes, Ahmed et Randy, les deux dealers lunaires et Padini, une jeune femme d’origine pakistanaise : toutes et tous vont chacun à leur manière, soutenir Alex dans son aventure.
Ruben Alves met en scène un film constamment sur le fil. On aurait pu avoir peur de la glorification de ce genre de concours, jusqu’à tomber dans un spectacle tape-à-l’œil et clinquant qui n’aurait rien dit de son propos. Mais comme le récit se centre vraiment sur Alex, tout le contexte reste là pour soutenir son arc narratif, et pas contre lui. Ainsi, les personnages qu’il rencontrera lors de ce concours le déstabiliseront, le feront douter, craquer, mais ils le feront surtout grandir et le construiront. Amanda, la responsable de la « promotion » Miss France 2020, en est le parfait catalyseur. Même si elle se montre dure et froide, elle n’en reste pas moins la seule personne qui croit en lui et qui le pousse à ne pas lâcher, quitte à lui faire perdre ses repères et à le sortir de sa zone de confort. Car Miss construit un parallèle entre le combat pour atteindre son rêve et celui qui se tient sur un ring de boxe. Ainsi, Alves évite de tomber dans la superficialité en montrant des personnages qui doutent, qui sont sur le point d’abandonner, avant de les montrer en train de renaître, flamboyants.
Si le film réussit ce qu’il entreprend, on pourra malgré tout regretter que par instant, il n’ose pas aller plus loin que son propos de surface. Il n’impose parfois pas un point de vue concret et déterminé sur son récit, et on pourra être frustré de la représentation qui nous est faite de cette histoire et de ces personnages. Mais passé ces quelques réticences thématiques, Miss s’avère être un joli moment, plein de lumière. Car oui, lumineux semble être le qualificatif adéquat pour ce film. En commençant par l’étoile qui le fait briller, à savoir non pas les strasses et les paillettes des robes de nos candidates, mais bien le comédien principal du film, Alexandre Wetter. Son physique androgyne et sa beauté naturelle liés à sa sensibilité habilement maîtrisée le rendent excellent dans ce film et dans ce rôle. Il brille littéralement, et on s’attache très rapidement au personnage, tout en croyant aux démons intimes qu’il combat et au rêve qu’il cherche à atteindre. A ses côtés, on retrouve un Thibault de Montalembert délicieusement à contre-emploi, qui nous régale dans un rôle aussi hilarant que touchant. Isabelle Nanty apporte elle une bonne partie de l’aspect dramatique du film, en la montrant souvent en opposition aux choix d’Alex, ce qui la rend assez indispensable dans l’arc narratif du film. Elle y est très touchante également. Et on trouve aussi Pascale Arbillot, incarnant une Amanda toute en nuances parfois étrangement pas très loin du personnage de JK Simmons dans Whiplash, qui apporte autant un soutien qu’un antagonisme pour Alex. En conclusion, Miss est une jolie fable nuancée qui navigue aisément entre les scènes comiques et dramatiques. Contant un récit bien construit et bien amené, Ruben Alves met en scène une histoire lumineuse, poétique et qui transmet une bonne humeur contagieuse. A travers le personnage d’Alex, il évoque une quête d’identité importante et touchante.
Titre original: MISS
Réalisé par: Ruben Alves
Casting: Alexandre Wetter, Pascale Arbillot, Isabelle Nanty…
Genre: Comédie
Sortie le: 28 octobre 2020
Distribué par : Warner Bros. France
TRÈS BIEN
Catégories :Critiques Cinéma