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TALES FROM THE LOOP (Critique Saison 1) Presque huit heures de bonheur…

SYNOPSIS: Un petit village se trouve à proximité d’une machine nommée « The Loop » (« La Boucle »), dont la fonction est d’explorer les plus grands mystères de l’univers. Un récit fantastique, profond et poignant sur la condition humaine…

Ce vendredi débarquent sur Amazon, avec une discrétion à toute épreuve, huit épisodes d’une nouvelle série intitulée Tales From the Loop. La base de cette dernière est plutôt originale puisqu’il s’agit de dessins de l’artiste suédois Simon Stålenhag qui représentent des paysages à l’allure apocalyptique où ont été incrustés des éléments futuristes ou anachroniques tels que des robots, des vaisseaux ou des dinosaures. Partant de cela, et comme vous l’aurez compris à la lecture du synopsis, la série est une œuvre de science-fiction qui va s’approprier certains desdits éléments afin de bâtir un univers et une forme de mythologie autour. Mais attention, nous conseillons à ceux qui rechercheraient de l’action ou des affrontements technologiques de repasser plus tard car en dépit de cet aspect science-fiction, Tales From The Loop est une série qui mise tout sur l’émotion, l’onirisme, le contemplatif et la poésie. Et c’est extrêmement beau, car oui, Tales From The Loop c’est presque huit heures de bonheur.


La structure de la série est extrêmement intéressante puisqu’elle navigue aux frontières de l’anthologie. Si les premiers épisodes, avant que nous n’ayons réellement appréhendé où la série voulait en venir, laissaient penser dans leur construction à des séries comme Eerie Indiana, Metal Hurlant Chronicles ou La Quatrième dimension, il apparaît rapidement bien au contraire que tout est subtilement lié. Chaque nouveau chapitre se concentre ainsi sur un ou plusieurs personnages mais nous constatons qu’un habitant faisant office de second couteau lors d’un épisode peut très bien devenir l’élément central du suivant. C’est d’ailleurs en cela que Tales From The Loop est brillante : chaque épisode est complémentaire des autres, les histoires étant entremêlées par le biais de leurs protagonistes même si cela ne saute pas tout de suite aux yeux. Chaque parcelle donne ainsi des éléments afin d’appréhender la suivante sous un nouvel angle : il est donc inutile et totalement déconseillé malgré l’aspect anthologique de la série, de regarder les épisodes dans le désordre car ce qui apparaît au début comme une rupture (changement de protagonistes) n’est finalement qu’une inébranlable continuité avec un réel fil rouge. Étant donné que l’action se situe dans un petit village vous serez de toute manière amenés à recroiser régulièrement les mêmes têtes et en découvrirez à chaque fois un peu plus sur leurs histoires. Tales From The Loop est d’ailleurs globalement une histoire familiale à travers le temps, la plupart des habitants mis en avant étant connectés les uns aux autres par les liens du sang.

Les magnifiques décors naturels où la série est tournée sont particulièrement hypnotisant et mis en valeur par des plans larges qui permettent de profiter de l’espace dans lequel évoluent les personnages et de les laisser respirer malgré les épreuves étouffantes auxquelles ils vont être confrontés. Le monde qu’ils arpentent est d’ailleurs extrêmement vintage tandis qu’ils disposent pourtant de technologies très évoluées (bras mécanique pour remplacer un membre amputé, robots élaborés etc.). Mais la série n’a rien laissé au hasard, bien au contraire. Elle donne ainsi du sens à tout ce qu’elle propose : il n’y a pas des robots juste pour le plaisir d’avoir des robots, ni des bras mécaniques juste pour se donner un air de Star Wars. D’ailleurs passé le pitch initial assez énigmatique nous découvrons, un peu à la manière d’une The Leftovers, qu’il n’est nullement question ici de s’intéresser aux origines des évènements contre-nature mis en avant dans la série mais de voir leurs conséquences souvent dramatiques sur la vie des gens du village. La série confronte ainsi des personnages à des problématiques de la vie (construction identitaire, acceptation de la mort, de la différence, relations familiales etc.) mais toujours avec une approche originale et assez inédite (mais nous vous laissons la surprise).

Dans la série force est de constater que les enfants sont au cœur des évènements dans une atmosphère comme nous le disions assez vintage malgré les éléments futuristes qui la parsèment. Nulle ambiance racoleuse à la Stranger Things toutefois ici, bien au contraire. La musique occupe une place de premier choix mais cette dernière est gorgée de piano et de violons (encore une fois un peu à la manière d’une The Leftovers). D’ailleurs si les compositions vous rappellent de bons souvenirs de The Truman Show, c’est tout à fait normal puisque que c’est le grand Philip Glass qui est aux commandes, accompagné de l’excellent Paul Leonard-Morgan ; les deux artistes accouchent ainsi d’une partition extrêmement belle et inspirée qui sublime les images et les drames de la vie qui s’y jouent. De nombreux longs passages étant dénués de dialogues, la musique est si omniprésente qu’elle est une actrice à part entière. Côté réalisation pour mettre en boîte ces magnifiques images remplies d’émotions, la série créée par Nathaniel Halpern (notamment scénariste sur la série Legion) s’est payée des noms prestigieux : Mark Romanek, So Yong Kim, Dearbhla Walsh, Andrew Stanton, Tim Mielants, Charlie McDowell, Ti West et Jodie Foster. Le rendu final est irréprochable.


Tales From The Loop est le genre de série qu’on ne voit que trop rarement : une œuvre brillante aussi bien sur le fond que sur la forme, qui marque l’esprit et qui à n’en pas douter prendra une autre dimension en la visionnant à nouveau. Le genre de série qui va probablement et malheureusement perdre du monde en route. Tales From The Loop c’est accepter de ne pas tout comprendre et de ne pas avoir de réponses à des questions qu’au final nous ne devrions pas forcément nous poser eu égard au partis pris du show de se focaliser sur l’humain et les épreuves de sa vie et non sur les mystères autour des évènements perturbateurs. Une étonnante et déroutante surprise servie par une magnifique écriture, une superbe distribution, une musique envoûtante et une réalisation qui fait mouche : à ne pas louper.

Crédits: Prime Video France

2 réponses »

  1. J’ai été très surprise par la série, que je n’attendais pas si onirique, si déroutante au premier abord sous cette forme d’anthologie. Je me suis laissée charmer avec plaisir au fil des épisodes, fascinée par la musique de Glass que j’adore, la poésie des plans, les silences des personnages… Ce fut une très belle découverte et qui m’a bien tiré quelques larmes à la fin ! Il est clair que la série ne plaira pas à tout le monde, mais elle offre un changement, une respiration bienvenus parmi les séries actuelles, nous invitant toujours à réfléchir et à laisser l’émotion parler. Je ne peux qu’approuver tout de ton article, tu retranscris très bien l’essence et l’enjeu de cette série !

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