SYNOPSIS: Mariée à un mineur et mère de deux enfants, Wanda vit coincée entre la grisaille de sa vie familiale et la tristesse des terrils pennsylvaniens. Tournant une page de sa vie, elle décide de partir et se lie à un petit gangster, Mr Dennis. Pour la première fois de sa vie, elle croise l’ambition.
Sorti en 1970 et totalement passé sous les radars à l’époque en France, Wanda jouit dorénavant d’un petite hype depuis sa ressortie en 2015. Barbara Loden est l’interprète principale, la scénariste et la réalisatrice de ce qui constituera son unique film. En effet, elle fut emportée dix ans plus tard par un cancer laissant cette œuvre qui fête ces 50 ans cette année et une très courte filmographie derrière elle. Elle joua simplement dans deux longs-métrages réalisés par l’ultra renommé Elia Kazan : Le Fleuve Sauvage et La Fièvre dans le sang en 1960 et 1961. Ce même Kazan deviendra son mari en 1968 et on ne peut que regarder Wanda à l’aune de sa relation avec son réalisateur de mari. D’entrée, Barbara Loden décide de casser les barrières entre le réel et la fiction : on se croirait durant les cinq premières minutes dans un documentaire sur la vie prolétaire américaine avec un film fait de manière rustique, caméra à l’épaule, avec un grain d’image crasseux. Doté d’un budget famélique, on sent que l’actrice-réalisatrice a dû bricoler son film avec des bouts de ficelle à l’opposé de L’Arrangement de Kazan sorti un an plus tôt avec Kirk Douglas et Faye Dunaway. Le film s’ouvre sur la vision d’un chantier avec ses grues et ses camions, le tout filmé de manière très lente et sans musique. Loden choisit l’austérité et, il faudra que le spectateur accepte ce parti pris assez radical. La scène suivante nous immerge dans cette famille où on découvre notre héroïne Wanda, mariée à un mineur avec leurs enfants. Wanda est une femme léthargique, qui passe son temps à dormir, qui ne s’occupe pas de ses enfants et de son mari. Ce dernier souhaite d’ailleurs divorcer sans que cela ne l’atteigne.
Car Wanda n’a aucune raison de se lever le matin et n’a aucun amour à donner à ses proches. C’est une femme totalement indépendante qui attend patiemment qu’un événement lui arrive pour sortir de sa torpeur. « She don’t care about anything » se plaint son mari devant le tribunal. Loden parait tellement aspirée par ce rôle qu’on peut à juste titre imaginer son état d’esprit de l’époque et donc de sa relation avec ses proches et plus spécifiquement son mari. N’étant plus apparu sur les écrans depuis 9 ans, on peut considérer ce film comme un grande thérapie où la réalisatrice règle ses comptes avec son entourage. Une fois que l’abandon de sa famille est actée, elle commence une longue errance dans les rues de sa petite ville entre les bars, le cinéma, les motels et les boutiques des centres commerciaux, tous ces symboles de l’american way of life. Elle croisera par hasard lors d’une de ses virées M.Dennis (Michael Higgins), petit escroc notoire qui va la prendre sous son aile.
Contrairement à ce qu’on pourrait croire, M.Dennis (Elia Kazan?) n’est pas un voyou au grand cœur mais un petit être assez minable qui traite Wanda de manière irrespectueuse en la violentant et en la méprisant à la moindre occasion. Ils parcourent les routes américaines afin de commettre des petits méfaits et s’apprivoiser à l’image de Bonnie and Clyde. Cette relation est particulièrement ambiguë mais c’est bien tout l’intérêt de ce film. Alors que le début du récit nous présentait une femme indépendante, elle décide tout de même de rester auprès de cet individu médiocre. On sent d’ailleurs qu’elle ne l’admire pas plus que cela : elle aura continuellement son air taciturne et son phrasé apathique. Mais c’est bien dans cette relation que l’actrice veut faire naitre un espoir dans la vie de Wanda. La fin du film nous apporte finalement un élément de réponse sur l’état relationnel entre Loden et Kazan et visiblement les deux conjoints étaient déjà à un point de non-retour. On peut sentir toute sa douleur lors du drame final avec ce visage déconfit et perdu. On ne sait comment Wanda/Loden s’en remettra mais elle laisse à son personnage une porte de sortie qui nous permettra de finir le film plus apaisé. Avec Wanda, on aura rarement vu un film aussi personnel et il faut vraiment souligner le courage de Loden pour s’être battue pour réaliser une œuvre aussi intime et bouleversante.
Titre Original: WANDA
Réalisé par: Barbara Loden
Casting : Barbara Loden, Michael Higgins, Dorothy Shupenes …
Genre: Drame
Sortie le: 26 Novembre 1970
Distribué par: –
EXCELLENT
Catégories :Critiques Cinéma