

© Tetra media Fiction – Monogo
SYNOPSIS: Les routes croisées, rythmées et imprévisibles de trois couples, trois hommes et trois femmes en quête de ce qu’on appelle le bonheur quand on est jeune, l’équilibre quand on l’est moins. Que faut-il sacrifier pour réussir son couple ?
On avait laissé Frédéric Krivine mettre un point final à son Village Français il y a déjà près de deux ans après nous avoir bouleversé sept saisons durant et on se doutait que son prochain projet serait observé à la loupe, scruté tant et si bien qu’il semblait inconcevable qu’il ne soit pas jugé un tant soit peu à l’aune du précédent. C’est pourtant -même avec toute la mauvaise foi du monde-, quasiment impossible tant Une Belle Histoire (forcément un clin d’œil en opposition directe à la Grand Histoire d’Un Village Français) et la série historique de France 3 n’ont à priori rien en commun si ce n’est de faire s’entrecroiser une galerie de personnages sans avoir de réel héros en lead. Nous voilà bien dépourvu donc au moment de parler de cette nouvelle série sans pouvoir l’ancrer dans les précédents travaux de fiction de Frédéric Krivine (P.J aussi était une série chorale mais là encore aucun autre point commun de décelé ). D’autant qu’Une Belle Histoire est la libre adaptation de la série britannique Cold Feet, le seul constat certain que l’on puisse faire au moment de découvrir ces deux premiers épisodes étant que Krivine est un touche-à-tout qui aime changer d’univers à chaque fois et que sa science du dialogue et des trames narratives qui s’entrecroisent lui permettent de raconter brillamment des histoires différentes et de prendre le pouls de la vie avec une acuité toujours aussi pertinente.
Une Belle Histoire c’est donc celle de trois couples en recherche du bonheur et des sacrifices auxquels il faut consentir pour y parvenir. En faisant s’entrecroiser les fils narratifs, en faisant surgir le burlesque ou l’émotion, en actionnant tantôt les leviers de la comédie, tantôt ceux du drame (avec parcimonie sur ces deux premiers épisodes ceci dit, hormis la séquence d’ouverture, réellement glaçante) et en reliant tout cela par l’amitié qui lie ces six individus, la série exhale un charme diffus que la qualité d’interprétation décuple. On est sous le charme de ces scènes de séduction, de ces engueulades, de ces petites trahisons, de ces mensonges, des promesses que le scénario essaime. Pourtant, aussi réussie qu’elle soit, Une Belle Histoire surprend par l’impression qu’elle laisse de ne pas vraiment dépasser sa fonction première de divertissement, de ne pas parvenir à transcender totalement son sujet et de ne pas parvenir réellement à faire entendre une voix totalement inédite. Sans doute la faute à Krivine qui nous a habitué à du caviar et qui là nous sert un plat tout à fait délicieux mais un peu moins sophistiqué. Ces légères réserves mises à part, Une Belle Histoire nous apparaît vraiment réussie et il faudra voir si la suite de cette première saison embrasse un peu plus les tourments de ses personnages que la légèreté qui les imprègne.
Produite par Emmanuel Daucé et Jean-François Boyer pour Tetra Media Fiction avec Frédéric Krivine en producteur associé (comme pour Un Village Français) Une Belle Histoire a, comme la série historique de France 3, bénéficié de l’utilisation d’un atelier d’écriture composé de six auteur.e.s et même d’une consultante en psychologie des personnages. Les 4 premiers épisodes sont réalisés par Nadège Loiseau (Le petit locataire) qui s’acquitte de sa tâche avec humilité et efficacité sur ces deux premiers segments (les scènes d’escalade où les séquences aériennes notamment sont magnifiquement filmées). Mais si la série fonctionne c’est aussi parce que la distribution y est vraiment impeccable. Depuis Irresponsable on adore Sébastien Chassagne et notre sentiment ne fait que s’amplifier avec ce qu’il fait dans Une Belle Histoire. Drôle et attachant malgré une tristesse qu’il porte en bandoulière, il déploie une bonhommie et un véritable charisme qui le rendent indispensable. Son tandem avec Tiphaine Daviot (HP) est vraiment séduisant, la comédienne au regard pétillant étant elle aussi très attachante et leur complicité patente. Les deux autres couples interprétés par Ben et Louise Monot (toujours aussi juste l’un comme l’autre) et Juliette Navis et Jean-Charles Clichet (atypiques mais réjouissants) ainsi que les apparitions de Thierry Neuvic et d‘Andréa Ferreol achèvent de conférer à Une Belle Histoire une impression de sincérité et de vérité. Et comme on en a l’habitude avec le travail de Frédéric Krivine la série touche au coeur par sa force évocatrice et le bloc d’humanité que le scénariste et créateur apporte à ses créations.
Catégories :Critiques, Festival de la Fiction TV de la Rochelle 2019, Séries