Critiques Cinéma

DE BATTRE MON CŒUR S’EST ARRÊTÉ (Critique)

SYNOPSIS: À 28 ans, Tom semble marcher sur les traces de son père dans l’immobilier véreux. Mais une rencontre fortuite le pousse à croire qu’il pourrait être le pianiste concertiste de talent qu’il rêvait de devenir, à l’image de sa mère.
Sans cesser ses activités, il tente de préparer une audition. 

Remake du film de James Toback Mélodie pour un tueur avec Harvey Keitel de 1978, le quatrième film de Jacques Audiard sorti en 2005 reçut pas moins de 8 césars dont ceux de Meilleur Film et de Meilleur Réalisateur lors de la cérémonie de 2006. Une petite polémique naitra car ce fut Michel Bouquet qui reçut le César du Meilleur Acteur pour Le Promeneur du Champs de Mars au détriment de Romain Duris. Cependant, le réalisateur déclara lors de sa montée au micro : « Il est pour toi Romain, sans toi, il n’y a pas ça. » Treize ans après sa sortie en salles, est-ce que le film méritait tous ces louanges ?

Audiard a toujours su s’entourer et il le prouve à nouveau avec au scénario le romancier Tonino Benacquista, la musique du doublement oscarisé Alexandre Desplat et Stéphane Fontaine à la photographie. A l’image de son précédent film Sur mes lèvres, réalisé quatre ans plus tôt, Audiard, également scénariste, s’attaque au film noir sur fond cette fois-ci de relation père-fils autodestructrice. La première réussite qui nous saute aux yeux est la performance du duo Duris/Arestrup. Le premier semble habité par ce rôle de petit magouilleur antipathique toujours sur le fil qui cherche à tout prix à s’évader de cette « petite » vie. Quant au second (césar du Meilleur Second Rôle), il est parfait en vieux et pathétique escroc complétement dépassé par les événements qui ne peut compter que sur son fils pour se sortir de ces errements. Le film nous interroge sur le devoir que l’on doit à ses parents, jusqu’à quand est-il possible de supporter la tyrannie familiale. Non seulement, Tom est entrainé dans une spirale de violence à cause de son père mais ce dernier fait preuve d’une vraie méchanceté et d’un véritable mépris à son égard lorsqu’il lui parle de son envie de refaire du piano. Chacun peut y voir un miroir déformant : le fils voit ce qu’il deviendra s’il ne quitte pas cette vie, le père y voit ce qu’il aurait pu devenir. Ces face-à-face sont d’une très grande dureté tant on sent cette amour/haine qui traversent les deux personnages.

Le film nous questionne également sur les coups de pouce du destin que l’homme doit saisir afin d’en devenir maître. Alors que ses deux compères de boulot se complaisent dans leur sale besogne en expulsant les immigrés d’immeubles insalubres afin de faire de la revente, on sent chez Tom un mal-être évident quant à cette situation. En témoigne sa grande nervosité envers ses proches et une grande agressivité envers des inconnus. La seule échappatoire est son casque de musique qui l’isole temporairement du monde. La rencontre fortuite avec l’ancien imprésario de sa mère va lui permettre de retrouver sa première passion : le piano. Audiard croit en la force du destin mais il nous montre aussi que l’homme devra le prendre en main en saisissant les opportunités qui se présentent à lui. Le chemin sera parsemé d’embûches et, le personnage principal devra s’affranchir à la fois de la figure paternelle et de ses nocifs collègues pour trouver une certaine rédemption et a fortiori un sens à sa vie.

 

A l’image de son film suivant Un Prophète, la mise en scène d’Audiard, le plus souvent caméra à l’épaule, est régulièrement faite de ruptures de ton qui vient donner ce côté à la fois physique mais aussi très poétique. Alternant les plans larges et les plans très rapprochés sur les visages, le metteur en scène utilise sa caméra pour accentuer le côté binaire du film et qui le rend encore plus intéressant. Les scènes de violence physique ou mentale s’enchainent au gré des séances de piano et de l’amour naissant entre le maître et son élève. Et, c’est dans son dernier quart d’heure que le film parvient à nous émouvoir après avoir suivi pendant une heure trente le parcours de ce banal personnage qui réussira à se transcender. On notera également la grande qualité d’interprétation de Linh-Dan Pham qui gagna le César du Meilleur Espoir Féminin. Ce quatrième film d’Audiard reste donc treize ans après sa sortie en salle une totale réussite du fait de sa maîtrise thématique et artistique.

Titre Original: DE BATTRE MON COEUR S’EST ARRÊTÉ

Réalisé par: Jacques Audiard

Casting: Romain Duris, Niels Arestrup, Linh-Dan Pham

Genre: Drame

Sortie le: 16 mars 2005

Distribué par: UGC

CHEF-D’ŒUVRE

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