Critiques Cinéma

PARIS – WILLOUBY (Critique)

1 STARS TRES MAUVAIS

PARIS - WILLOUBY affiche

SYNOPSIS: Les Guilby Lacourt forment une famille recomposée typique de notre époque. Entre père, belle-mère, petite sœur, frère, demi-sœur, ou encore demi-oncle, ils ont parfois du mal à s’y retrouver ! Un soir, ils apprennent la mort d’un grand-père avec qui ils ont coupé les ponts depuis une dizaine d’années. Fatalement voués à cohabiter le temps d’un long voyage pour se rendre à son enterrement, ils vont tous très vite devoir s’adapter au concept du « vivre ensemble » dans l’espace exigu de la voiture familiale. Pour le meilleur et pour le pire ! 

Si, à longueur d’année, je m’énerve régulièrement devant mon écran, qu’il soit petit ou grand, je n’ai pas souvenir de la dernière fois où je suis ressortie d’une séance de cinéma en étant aussi en colère. Car si les raisons de s’agacer du cinéma aujourd’hui sont légion – tout autant que celles de s’en réjouir – il arrive un moment, je crois, où l’on arrive à saturation. Et en matière de films français, Paris-Willouby se place directement comme l’anti-exemple à ne surtout pas suivre. La copie à brocarder, raturée rageusement de rouge de partout, rendue par deux bonnets d’âne du fond de la classe. Qu’il s’agisse d’un premier film n’excuse rien, bien au contraire. Resucée de l’excellent Little Miss Sunshine (entre autres références qui estampillent le film sans que celui-ci parvienne jamais à s’en affranchir), Paris-Willouby se pose comme un énième road-trip à vocation de thérapie familiale, censé recoller les morceaux d’une famille recomposée dont la mosaïque ne tient plus. Déjà, à la lecture du pitch, on réfrène à grand peine son envie de sauter au plafond tant c’est enthousiasmant. Que l’idée de base soit usée jusqu’à la corne, passons. Les idées neuves, c’est compliqué à trouver, parce qu’il n’y en a sans doute pas/plus. En revanche, s’appliquer de toutes ses forces à proposer un traitement nouveau à une vieille idée, c’est quand même le contrat que devrait signer la jeune génération de cinéastes qui mettent un pied dans le métier. Las ! De ce côté-là, pas de feux d’artifices non plus, loin s’en faut.

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Sur le papier, tout part très mal. On a déjà la galerie archétypale de personnages : la femme délaissée en proie à ses angoisses de quadra (Isabelle Carré) ; le mari qui peine à communiquer avec sa fille aînée, sa femme, tout le monde (Stéphane De Groodt) ; le demi-frère un peu falot en bute contre le monde entier et la consommation de viande en particulier, mais qui ne rêve que de se taper sa demi-sœur (Solal Forte) ; la demi-sœur en bute contre le monde entier , l’autorité en général, son père plus précisément, et qui envisage de se taper son demi-frère (Joséphine Japy) ; la petite dernière qui ne vit que pour les vaches, Lara Fabian, et dans l’attente de faire un 95C (Aminthe Audiard) ; l’oncle écrivain raté, attentiste, irresponsable, aigri jusqu’à la moelle (Alex Lutz). L’élément perturbateur Ô combien galvaudé : le père, avec lequel les enfants étaient en froid depuis des années, vient de mourir. Et, comme ils n’ont que 24h à peine pour rejoindre Willouby, allez savoir pourquoi, un road-trip dans la vieille Chrysler pourrie paraît bien plus indiqué qu’un aller confortable en train. Même en additionnant tous ces éléments, il y avait matière à faire quelque chose de bon. Mais aucun écueil n’aura été évité. S’accumulent, pêle-mêle, des problèmes de rythme, avec des séquences amorcées et aussi vite avortées, des enchaînements répétitifs, très vite lassants (on est dans la voiture, on regarde le paysage défiler, on somnole, on arrête la voiture, on regarde le paysage, on attend, on remonte en voiture…), avec une tentative de poésie déconcertante (la vallée des vaches perdues). Une utilisation un peu gauche des stéréotypes du genre : un motel pourri, une bouffe infecte, des autochtones étranges, auxquels on n’ajoute rien. Des analyses sur la dynamique familiale balancées au p’tit bonheur, façon « la thérapie familiale pour les nuls ». Et des éléments de récit lancés un peu à l’aveuglette, qui n’aboutissent sur rien (le vol de la peluche, l’étreinte entre le demi-frère et la demi-sœur, le mec déguisé en super Willouby…). Tout ça manque de liant, d’une réelle vision qui tiendrait le film de bout en bout. Au lieu de cela, il s’éparpille sans cesse. Tout fait très artificiel, très emprunté. Jusqu’à ce passage, censé être émouvant, qui prend littéralement le spectateur en otage avec son enfilade de couloirs remplis de photos souvenirs, et cet insupportable piano, bien lourdingue, venu rançonner nos larmes, qui s’attarde à n’en plus finir. Les dialogues même sonnent creux, bien que dits avec conviction. Car, si tous les reproches peuvent être faits au film, aucun ne peut s’appliquer au casting, impeccable (à part, peut-être, le caméo maladroitement amené de Guy Marchand), mais desservi par des rôles superficiels.

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Atteindre un tel niveau d’amateurisme, a fortiori quand on est deux à l’écriture, à la mise en scène et à la réalisation, je trouve ça assez préoccupant. Que Quentin Reynaud et Arthur Delaire aient eu à le réécrire, faute d’un budget suffisant, et donc dû revoir leurs ambitions à la baisse, on peut le comprendre. Mais alors ce qu’on leur reprochera volontiers, c’est de ne pas avoir su rebondir avec originalité, de n’avoir pas su transformer cette énième difficulté à faire leur film en une opportunité de sortir quelque chose de résolument différent. Ou, a tout le moins, de consistant. Et si, sait-on jamais, cette non-originalité dans le traitement leur a été imposée, sous peine de non financement tout court, dans ce cas, c’est plus grave encore de la part des décisionnaires d’avoir osé proposer un film aussi ballot. Un ratage en bonne et due forme.

PARIS - WILLOUBY affiche

Titre Original: PARIS – WILLOUBY

Réalisé par:  Quentin Reynaud et Arthur Delaire

Casting : Isabelle Carré, Stéphane De Groodt, Alex Lutz,

Joséphine Japy, Solal Forte, Aminthe Audiard…

Genre: Comédie dramatique

Sortie le: 20 janvier 2016

Distribué par: Mars Distribution

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