Critiques Cinéma

CRIMSON PEAK (Critique)

4,5 STARS TOP NIVEAU

crimson peak affiche

SYNOPSIS: Au début du siècle dernier, Edith Cushing, une jeune romancière en herbe, vit avec son père Carter Cushing à Buffalo, dans l’État de New York. La jeune femme est hantée, au sens propre, par la mort de sa mère. Elle possède le don de communiquer avec les âmes des défunts et reçoit un étrange message de l’au-delà : « Prends garde à Crimson Peak ». Une marginale dans la bonne société de la ville de par sa fâcheuse « imagination », Edith est tiraillée entre deux prétendants: son ami d’enfance et le docteur Alan McMichael.

Guillermo Del Toro est l’un des réalisateurs actuels dont l’univers est immédiatement reconnaissable, parsemé de monstres (Le Labyrinthe de Pan, Hellboy), de fantômes, d’insectes, de lieux sombres et de personnages torturés. Il est également un producteur (La Légende de Manolo, Mama, Les 5 Légendes..), un scénariste (La trilogie du Hobbit aux côtés de son ami Peter Jackson notamment), et un écrivain hyperactif, à la fois impliqué dans le cinéma, la télévision et les jeux vidéos. Crimson Peak, son dernier ouvrage, est à ce jour  son chef-d’œuvre, synthèse de ce que le bonhomme sait faire de mieux, pour un film esthétiquement au-dessus de tout ce que l’on a pu voir cette année. Crimson Peak est un film difficilement vendable, dans les critères habituels du marketing des grands studios. Si les bandes-annonces laissent entrevoir un film d’horreur gothique où les fantômes tiennent une place importante, à la sortie de la projection on a surtout l’impression d’avoir assisté à une incroyable histoire d’amour dans un contexte de révolution industrielle, le tout plongé dans une ambiance que H.P. Lovecraft n’aurait pas reniée. Il est compliqué de parler du film sans dévoiler quelques éléments clés (et surprises !) de l’intrigue, d’autant plus qu’il comprend deux parties distinctes. Mais chacune de ces parties est une leçon de maîtrise des décors et des costumes, doublées d’un scénario bien plus dense que ce qu’il laisse apparaître au premier abord. Plongée dans l’Amérique industrielle du début du 20e siècle, avec ses mœurs et ses personnages emblématiques (Carter Cushing, le père du personnage de Mia Wasikowska, un capitaine d’industrie qui a bâti sa fortune à la force de ses mains) Crimson Peak devient un huis-clos étouffant dès que nous nous retrouvons dans le manoir familial de Thomas et Lucille Sharpe (Tom Hiddleston et Jessica Chastain). Surtout, quel travail incroyable des décorateurs, qui ont reconstruits quasiment toute la bâtisse délabrée en ne négligeant absolument aucun détail ! Personnage à part entière, ce décor (et ses fantômes !) vous hantera longtemps après le générique de fin. Maître des ambiances qui n’a plus rien à prouver, Del Toro affine ici un style parfois tape à l’œil, comme c’était par exemple le cas dans Pacific Rim, son dernier film qui a divisé les fans en ne trouvant pas vraiment sa place entre la série B et la série Z, tout en abusant un peu trop des effets digitaux. Le réalisateur a plus que compris la leçon, puisque Crimson Peak affiche un nombre de plans en 3D particulièrement bas pour les normes actuels des blockbusters (en gros, seuls les fantômes bénéficient d’un traitement digital). L’ambiance n’en est que plus lourde et angoissante, surtout lorsqu’elle est sublimée par des acteurs en totale maitrise de leur art.

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En effet, Mia Wasikowska, Tom Hiddleston et Jessica Chastain, le trio central du film, dévorent la pellicule. Les relations à la fois complexes et mystérieuses que leurs personnages nourrissent les uns par rapport aux autres sont soigneusement construites par un réalisateur qui n’a pas peur de prendre son temps. Et pour le mieux ! Mia Wasikowska est ainsi Edith Cushing, une jeune fille moderne et au caractère trempé qui jamais ne tombe dans la caricature. L’actrice, qui, de mémoire, n’a jamais commis une seule faute de parcours dans sa jeune et déjà foisonnante carrière, apporte à la fois sa fragilité et la force de son caractère à un personnage dont le spectateur ne se lasse jamais d’accompagner les faits et gestes. Face à elle, qui de mieux que Tom Hiddleston pour incarner à la perfection un aristocrate Anglais issu d’une grande famille dont il représente le dernier mâle, et dont le talent d’ingénieur représente le dernier espoir de voir se pérenniser le nom. L’acteur joue une partition subtile, que son charme et son implication empêchent de tomber dans les nombreux pièges tendus sur sa route. Jessica Chastain quant à elle est tout simplement extraordinaire en sœur vénéneuse, rôle à la profondeur noire que le physique à la fois attirant et effrayant de l’actrice (teinte en noir corbeau pour l’occasion) porte aux nues. Charlie Hunnam, en second rôle éclatant, nous convainc encore un peu plus de tout le bien que l’on pense de lui depuis qu’il a refusé le rôle de Christian Grey dans l’adaptation guimauve du livre fameux sorti sur nos écrans un peu plus tôt cette année. Autour d’un scénario à la mécanique particulièrement tortueuse mais efficace, Guillermo Del Toro tisse une œuvre éclatante de maîtrise, que ce soit dans sa direction d’acteur, dans le tour de force visuel qu’il nous offre, ou dans la maturité de son art, où, enfin, le fond et la forme se confondent au service d’une histoire haletante. Film somme de ses thématiques, Crimson Peak est à ce jour le chef-d’œuvre du cinéaste. Espérons qu’il saura, par l’avenir, nous donner tort ! 

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Titre Original: CRIMSON PEAK

Réalisé par: Guillermo Del Toro

Casting: Mia Wasikowska , Jessica Chastain, Tom Hiddleston,

Charlie Hunnam, Leslie Hope, Jim Beaver…

Genre: Epouvante-Horreur, Drame, Romance

Sortie le: 14 octobre 2015

Distribué par: Universal Pictures International France

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3 réponses »

  1. Jamais je n’ai été autant en désaccord avec une critique sur votre site, dites donc ! Comme quoi, comme toujours, les goûts et les couleurs… 😉
    Ce film m’a profondément déçu et je n’en retiens, effectivement, que les décors absolument sublimes. Le seul point positif d’un film ennuyeux… L’histoire : d’un classicisme total, qui se déroule lentement et qui ne raconte qu’un ramassis de clichés déjà mille fois vus/lus. Je ne veux pas de twists dans tous les films que je regarde, hein, mais je demande juste que l’histoire raconte autre chose qu’un truc ultra prévisible ! Je n’en reviens pas qu’on puisse ne pas avoir vu les choses 20 minutes à l’avance, c’est dingue…
    Les acteurs, oui, ils sont bons, mais au service de personnages blindés de clichés. La palme revenant à Chastain, tellement caricaturale que ça devient ridicule. L’héroïne, oui, certes beauté diaphane, mais jamais on ne ressent de menace pour elle… et j’avoue, même, que sur la fin je n’avais qu’une envie c’était qu’elle trépasse tant elle prend des décisions d’une débilité profonde (le coup de la machette qu’elle pose, tranquille, alors que cette gourdasse sait que l’autre peut venir s’en emparer…). Charlie Hunnam, tout l’arc narratif qui l’entoure, ne sert qu’à apporter une conclusion attendue. Et son enquête est d’une mollesse……mandieu mandieu…

    bref, pas d’accord du tout avec toi mais c’est pas grave.
    Ce film est pour moi le pire Del Toro et je préfère revoir Le labyrinthe de Panpan.

    • Je ne serais pas aussi négative qu’Evilash, mais je dois avouer que, autant les décors, grandioses, m’ont enchanté, autant le casting, impeccable, m’a hypnotisé, autant l’intrigue, elle, m’a particulièrement déçue par son manque de suspens total. En effet, je trouve étonnant que pas d’avantage de personnes ne comprennent de quoi il retourne dans le premier quart du film. Tout est annoncé à des kilomètres avec, de surcroît, peu de finesse dans le traitement de clichés vus et revus, qui plombent considérablement le magnifique spectacle pensé par Guillermo. C’est très dommage de ne pas avoir joué d’avantage avec les ressorts d’une intrigue pourtant prometteuse pour peu qu’on en adapte l’angle de vue. Je reste enchantée par l’ambiance, mais peu convaincue par le déroulé narratif.

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