Critiques Cinéma

ONLY LOVERS LEFT ALIVE (Critique)

4 STARS EXCELLENT

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Le tweet de sortie de projo:

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SYNOPSIS: Dans les villes romantiques et désolées que sont Détroit et Tanger, Adam, un musicien underground, profondément déprimé par la tournure qu’ont prise les activités humaines, retrouve Eve, son amante, une femme endurante et énigmatique. Leur histoire d’amour dure depuis plusieurs siècles, mais leur idylle débauchée est bientôt perturbée par l’arrivée de la petite sœur d’Eve, aussi extravagante qu’incontrôlable. Ces deux êtres en marge, sages mais fragiles, peuvent-ils continuer à survivre dans un monde moderne qui s’effondre autour d’eux ?

Only Lovers Left Alive, inspiré du roman de Mark Twain, Journal d’Adam et journal d’Eve  est le douzième long-métrage du cinéaste Jim Jarmusch. Sélectionné en compétition officielle au dernier Festival de Cannes, ce film fantastique, qui compte parmi ses rangs Tom Hiddleston, Tilda Swinton, Mia Wasikoswka, John Hurt ou encore le jeune Anton Yelchin, est reparti bredouille malgré des critiques enthousiastes. Qu’en est-il réellement ? En près de quarante ans de carrière, le dandy américain Jim Jarmusch s’est constitué une filmographie éclectique, s’emparant de genres cinématographiques bien calibrés pour composer des œuvres étonnantes, à des kilomètres de ce qui se produit ordinairement. Après le carcéral Down by law, le western Dead Man, les films à sketches Night on Earth et Coffee and Cigarettes, la comédie dramatique hommage à Jean Eustache, Broken Flowers, place au film de vampires.

ONLY LOVERS LEFT ALIVE 1Le couple jarmuschien s’appelle ici Adam et Eve, deux êtres éternellement liés d’Amour et rongés par le temps. Adam domicilie à Détroit – ville industrielle liquidée par le capitalisme exsangue – collectionne des guitares antiques, lit en boucle ses maîtres (Mary Shelley, Mark Twain, Byron …), écoute des vinyles démodés et s’ennuie dans son appartement. Eve, son amante, fréquente l’auteur Christopher Marlowe à Tanger, capitale mondaine, et souffre d’une vie tout aussi moribonde. Les deux créatures nocturnes, désabusées, en veulent au monde entier, et en premier lieu aux « zombies », surnom accordé aux humains qui peuplent la Terre. Soucieux de leur santé (et donc pas si dépressifs), ils s’approvisionnent en sang frais dans un hôpital. Décrit ainsi, Only Lovers Left Alive est un film nonchalant, voire hautain et hipster, où deux élitistes se plaignent du monde d’aujourd’hui en passant leur temps, du moins les deux heures de bobine, à citer des auteurs qui n’ont eu naguère de cesse de les inspirer et les nourrir psychiquement parlant. Soyons honnête, c’est un peu vrai, même si Jarmusch appuie grossièrement les traits des personnages, érudits face aux humains incultes, pour mieux dresser en filigrane une sorte de pamphlet contre l’industrie artistique contemporaine – musicale, littéraire, théâtrale, cinématographique – davantage axée sur l’entertainment que sur les attributs.

only lovers left alive 2A travers une démarche honnête, intime et surtout lucide, le cinéaste tisse une ode à la créativité, à la science universelle et intemporelle, et rend ainsi hommage aux vertus de l’Art [et d’époques désenchantées], à la manière de Wes Anderson avec The Grand Budapest Hotel, en réussissant là où George Clooney a lamentablement échoué via ses Monuments Men. Un enjeu si fort dans le film qu’il pousse certains vampires – sous couvert de devoir rester anonymes – à sacrifier leurs connaissances et surtout leur nom en prêtant leurs travaux aux « zombies », tels que William Shakespeare. Pointe d’ironie évidemment, mais suffisamment distante et maîtrisée.

only lovers left alive 3Que dire d’autre si ce n’est qu’avec Only Lovers Left Alive (qui porte définitivement bien son titre), Jim Jarmusch signe une œuvre majestueuse à la beauté formelle évidente. Il n’y a qu’à voir les premiers plans du film pour s’en convaincre : une captivante rotation sur son axe de la caméra pour représenter l’écoute d’un vinyle. Only Lovers Left Alive fait de fait formule d’une ballade romantique réussie, envoûtante et nostalgique, au rythme lancinant, aux images hypnotiques, transcendées par une musique enivrante tantôt jazzy, tantôt rock. Au-delà du thème de l’amour éternel, parfaitement exploré par le tandem Tom Hiddleston / Tilda Swinton – magnifiquement dirigé et éclairé il faut l’avouer – Jarmusch rend grâce au pouvoir de séduction des individus aux dents longues. Le blason du mythe « vampires » est redoré avec un romantisme planant et convainquant tandis que Tilda Swinton, plus bluffante que jamais, apporte la subtilité nécessaire au rôle, et que Tom Hiddleston incarne avec un charisme imposant le vampire Adam. Jim Jarmusch a mis près de dix ans pour monter Only Lovers Left Alive. Tant mieux, ce dernier est un lumineux et nocturne voyage fascinant à travers le temps, l’espace et l’existence, qui aurait sans doute mérité un prix à Cannes.

only lovers left alive affiche miniTitre Original: ONLY LOVERS LEFT ALIVE

Réalisé par: Jim Jarmush

Casting: Tom Hiddleston, Tilda Swinton, Mia Wasikoswka,

John Hurt, Anton Yelchin, Slimane Dazi …

Genre: Drame, Romance

Sortie le: 19 Février 2014

Distribué par : Le Pacte

4 STARS EXCELLENTEXCELLENT

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