Le tweet d’après visionnage:
SYNOPSIS: Alexandre Taillard de Worms est grand, magnifique, un homme plein de panache qui plait aux femmes et est accessoirement ministre des Affaires Étrangères du pays des Lumières : la France. Sa crinière argentée posée sur son corps d’athlète légèrement halé est partout, de la tribune des Nations Unies à New-York jusque dans la poudrière de l’Oubanga. Là, il y apostrophe les puissants et invoque les plus grands esprits afin de ramener la paix, calmer les nerveux de la gâchette et justifier son aura de futur prix Nobel de la paix cosmique. Alexandre Taillard de Vorms est un esprit puissant, guerroyant avec l’appui de la Sainte Trinité des concepts diplomatiques : légitimité, lucidité et efficacité. Il y pourfend les néoconservateurs américains, les russes corrompus et les chinois cupides. Le monde a beau ne pas mériter la grandeur d’âme de la France, son art se sent à l’étroit enfermé dans l’hexagone. Le jeune Arthur Vlaminck, jeune diplômé de l’ENA, est embauché en tant que chargé du “langage” au ministère des Affaires Étrangères. En clair, il doit écrire les discours du ministre ! Mais encore faut-il apprendre à composer avec la susceptibilité et l’entourage du prince, se faire une place entre le directeur de cabinet et les conseillers qui gravitent dans un Quai d’Orsay où le stress, l’ambition et les coups fourrés ne sont pas rares… Alors qu’il entrevoit le destin du monde, il est menacé par l’inertie des technocrates.
Quai d’Orsay est l’adaptation du tome 1 de la célèbre BD éponyme, qui retrace le parcours d’un jeune homme (Raphaël Personnaz) chargé d’écrire les discours du ministre des affaires étrangères, Alexandre Taillard de Vorms (Thierry Lhermitte). La BD est inspirée de l’expérience d’Antonin Baudry (co-scénariste du film) qui a lui-même été dans cette situation entre 2002 et 2004. Le personnage d’Alexandre Taillard de Vorms est directement inspiré de Dominique de Villepin. Oubliez les craintes que l’adaptation de la bande dessinée a pu générer, Quai d’Orsay est effectivement la franche poilade annoncée. Le film jouit d’un sens de l’humour et de l’ironie prononcé, d’un casting génial (Thierry Lhermitte des grands jours, à des années lumières des derniers nanars dans lesquels il figure, Raphaël Personnaz, Niels Arestrup, Anaïs Demoustier, Thierry Frémont, Bruno Raffaelli, Julie Gayet), d’une écriture burlesque incisive composée de dialogues au cordeau (hilarants mais usants), d’une mise en scène frappée (split-screen, citations d’Héroclite qui apparaissent à l’écran, caméra mobile, mixage sonore percutant, montage nerveux), et surtout d’un rythme frénétique, étrangement ressemblant à la musicalité et au tempo de la série Bref . Et même s’il vrai que le film, qui n’aurait certainement pas déplu à Claude Zidi, s’essouffle un peu sur la fin (les running-gags des Stabilos, des portes qui claquent, des piles de papiers qui voltigent à chaque irruption du ministre fonctionnent moins dans le dernier tiers), on doit admettre que le langage imagé étrange que Bertrand Tavernier a réussi à construire fonctionne à merveille pour révéler le caractère abscons de la parole politique. Une comédie politique (mais pas une satire, dixit Tavernier en personne) rigoureuse et méticuleuse en huis clos, qui s’assume en tant que telle et laisse à Thierry Lhermitte la liberté de faire ce qu’il veut, quand il veut, où il veut. Passionnant, brillant, intelligent et ébouriffant !
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