Critiques Cinéma

PARIS, TEXAS (Critique)

SYNOPSIS : Un homme réapparaît subitement après quatre années d’errance, période sur laquelle il ne donne aucune explication à son frère venu le retrouver. Ils partent pour Los Angeles récupérer le fils de l’ancien disparu, avec lequel celui-ci il part au Texas à la recherche de Jane, la mère de l’enfant. Une quête vers l’inconnu, une découverte mutuelle réunit ces deux êtres au passé tourmenté.

Paris, Texas, c’est cette palme d’or au Festival de Cannes en 1984, qui vient consacrer la puissance du cinéma de Wim Wenders, véritable peintre autant que conteur du 7ème art. Paris, Texas c’est toute la fascination de Wim Wenders pour les Etats-Unis, ses mœurs, son cinéma, sa vie. Rien d’étonnant que l’on vogue entre la Californie et le Texas pour en faire anthropologiquement le tour. Sam Shepard et L.M. Kit Carson sont au scénario. Sam Shepard que l’on identifie parfois davantage pour ses performances d’acteur est surtout un dramaturge et un metteur en scène de théâtre réputé. La symbiose entre lui et Wenders permet à Paris, Texas d’aller si loin dans son récit. Paris, Texas, c’est tout de suite un envoutement de cinéma, la musique de Ry Cooder, le sable désertique du Texas, ce personnage halluciné à la casquette et au costard, sorti de nulle part et toujours plus petit au-devant de l’infiniment grand d’une nature triomphante. Les premières secondes sont déjà cultes. D’où vient-il, pourquoi il est là, nous ramène à la précarité de notre propre condition.

Après cette impressionnante introduction sur le plan formel, Wim Wenders va emprunter des voies plus classiques dans sa narration en entrant finalement dans l’histoire de cet inconnu initial, qui va devenir pour nous si familier. L’histoire d’un homme qui va affilier sur un mode si bouleversant avec son fils inconnu. C’est alors toute la puissance du lien filial que le cinéaste de génie va déployer tant leur relation qui va paraître au spectateur comme une évidence. Une émotion que l’on connaît dans la vie, mais qui pourrait paraître si impalpable au cinéma. Pas avec Wim Wenders, tant il va venir avec sa caméra, les dialogues, les silences, les regards, rendre ce lien si authentique. L’émotion est partout. Après l’amnésie dans le désert, la reconstruction du lien avec son fils, c’est la quête vers Jane, qui va venir nous expliquer ce qui s’est joué dans la vie de Travis pour que cet homme disparaisse pendant 4 ans, voulant ainsi effacer son identité. Ce qui s’est joué pour lui, c’est ce qui s’est joué dans la vie de ce couple et en miroir, dans la vie des femmes et des hommes en général. C’est toute cette difficulté de s’aimer, cette éternelle insatisfaction de ce que l’autre nous renvoie, ce qu’on croit et voudrait qu’il pense et toutes ces terribles incompréhensions et déchirures.

C’est toute la force de Paris, Texas, cet homme si seul, qui va avancer dans cette quête introspective, en road movie, d’abord seul, puis avec son frère, et enfin son fils, jusqu’à la possibilité d’un geste d’amour fou autant pour son enfant que pour Jane, par une réparation ultime entre mère et fils, dans une scène quasi finale magistrale avec Jane, une Nastassja Kinski inoubliable devant son miroir. Travis était comme en mission, la plus grande et forte qu’il puisse exister. Une quête qui va aboutir vers cet amour le plus insaisissable entre un enfant et sa mère. Il y a universalité. La force exemplaire de Paris, Texas est que dans ce récit très humain et donc assez verbal, il conserve pour autant l’esthétisme fou de Wenders dans ses aspirations utopistes de peintre du grand écran, jouant sur des couleurs et symétries à se damner, et des sons de guitare qui viennent comme en surimpression des émotions. Le lien avec son chef opérateur attitré Robby Müller, permet à Paris, Texas de jouer sur des tons saturés, entre lumières artificielles souvent trop brillantes d’un capitalisme exacerbé et des stations essences isolées et poussiéreuses comme on en rêve. C’est comme un western de l’affect et pleinement hypnotique. Chaque mouvement devient une caresse, chaque moment une larme.

Dans le rôle de Travis, Harry Dean Stanton est bluffant dans sa transformation et son cheminement entre le mec à la casquette tout sec, qui porte sur lui son amnésie, et l’homme, le père qu’il va devenir magnifié dans la scène avec Jane. Jane, justement, Nastassja Kinski est entrée dans la légende aussi bien sur un mode figé avec son pull, sa coiffure, son regard pour une image qui incarne Paris, Texas. Mais aussi avec son émotion finale qui emporte tout et nous offre rien de moins qu’une des plus belles scènes du cinéma. Précisément, Paris, Texas est considéré légitimement comme un des plus beaux films de l’histoire du cinéma, aussi car il nous parle des racines, des origines et donne tellement mais tellement d’espoir !!

Titre Original: PARIS, TEXAS

Réalisé par: Wim Wenders

Casting : Nastassia Kinski, Dean Stockwell, Harry Dean Stanton, Aurore Clément …

Genre: Drame

Sortie le : 19 Septembre 1984

Reprise le : 03/07/2024

Distribué par: Tamasa distribution

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