SYNOPSIS : Chiara vit sur une île de la côte atlantique, là où son mari Antoine a grandi. Ils forment un couple heureux et amoureux. Elle a appris le métier d’Antoine, la pêche, et travaille à ses côtés depuis vingt ans. L’arrivée de Maxence, un nouvel apprenti, va bousculer leur équilibre et les certitudes de Chiara…
Premier long métrage de sa réalisatrice, Héloïse Pelloquet, La passagère, c’est d’abord l’histoire d’un personnage. Ici décrit par la cinéaste : « une femme d’une quarantaine d’années, une travailleuse, qui va vivre une histoire d’amour adultère avec un très jeune homme. J’avais envie d’écrire le plaisir d’une femme qui ne se l’autorise pas facilement. Avec l’idée de faire de Chiara une femme moderne, dans la vie active, et non le schéma classique d’une bourgeoise désœuvrée adultère par ennui. » D’autant plus quand cette femme forte est parfois plus forte que femme, dans l’âpreté du monde de la pêche où c’est comme si son désir, sa sensualité étaient niés. Aux premiers plans sur Chiara, on se dit qu’elle est comme la mer, immuable, solide, comme une permanence. Et pourtant… Si l’irruption de Maxence n’est pas d’emblée comme une évidence, on devine immédiatement que le couple qu’elle forme avec Antoine repose sur un amour d’habitude, presque une association ou une collaboration. L’affection réciproque est évidente mais l’érosion de la passion est bel et bien là, fatale, inexorable.
Maxence va venir réveiller chez elle un feu évidemment éteint. Et c’est peut-être, à peine cyniquement la seule certitude en amour : l’attrait de la nouveauté. Forcément éphémère, mais pas moins sincère pour autant. Les premiers regards, frôlements et c’est une sensualité discrète qui s’installe entre Chiara et Maxence. L’irrésistible poids de l’interdit et de l’impossible va venir sublimer cette rencontre réciproquement troublante et brulante en devenir. Reste alors à réprimer ou à prendre le risque de vivre. C’est finalement assez banal mais précisément le caractère universel de ce lien vient nous souffler au cœur les souvenirs d’une émotion vivace. En étant à minima rompu aux petites comme aux grandes histoires au cinéma, on voit certes un peu tout venir, mais indéniablement le charme de leur duo opère et on se laisse gentiment et tout en douceur amener dans leur parade amoureuse complice et charnelle. Il est juvénile autant qu’elle est à la moitié de sa vie. Il va se grandir, elle va se rajeunir. Les codes classiques de la symétrie de l’autre, où dans l’irrationalité d’une passion, tout ce qui sépare finit par unir. La mer va devenir leur refuge, l’interdit de leur amour peut alors s’exprimer dans une folle liberté, celle des amants que rien ne contrarie, tout émerveillés et étourdis de l’intensité dont ensemble ils sont capables. On pensera un peu à L’équipier (2003) de Philippe Lioret, la complexité et la poésie en moins certes, mais avec cette sincère énergie et la dureté sans faille de la valse des émotions contrariées.
Cécile De France est une amoureuse fabuleusement passionnée, comme on en rêverait. Son ancrage qui s’effrite dans cette seconde jeunesse retrouvée devient pour Chiara comme une seconde peau que l’actrice sublime avec grâce et élégance. Elle est belle, forte, elle écrase tout et devient indispensable à la caméra de sa cinéaste, donc à nos yeux. Une cinéaste qui selon son aveu lui avait écrit comme une lettre d’amour, Cécile lui a parfaitement répondu je t’aime aussi. Il faut être deux pour un grand amour. A ce jeu-là, Félix Lefebvre, visage poupon de Maxence s’initie aux jeux de la déraison de la passion avec une flamme, une beauté de chaque instant. Il s’ouvre à la vie en nous prenant à témoin de la constance de son impudeur. Fiévreuse et brulante interprétation. La passagère, c’est affaire de parenthèse, de Sur la Route de Madison (1995), quand il faut ou pas ouvrir la portière de la voiture, à Compartiment numéro 6 (2021) quand on sort du wagon ou encore de Lost In Translation (2003) quand on quitte le Japon. Ici la question est de savoir si on quitte l’ile ou pas. Une seule façon de le savoir, de se confronter à ses propres réponses, voir très vite La passagère…
Retrouvez le film en DVD, édité par Blaq Out
Supplément:Court-métrage Côté Cœur d’Héloïse Pelloquet
Titre original: LA PASSAGÈRE
Réalisé par: Héloïse Pelloquet
Casting: Cécile de France, Félix Lefebvre, Grégoire Monsaingeon …
Genre: Drame, Romance
Sortie le: 28 Décembre 2022
Sortie en DVD le 16 Mai 2023 édité par Blaq Out
Distribué par : Bac Films
EXCELLENT
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