SYNOPSIS : Du jour au lendemain, Vincent est agressé par des gens sans raison apparente qui essaient de le tuer. Il tente de poursuivre une vie normale mais lorsque le phénomène s’amplifie, il doit fuir et changer totalement de mode de vie…
Vincent doit mourir, premier long métrage pour Stephan Castang, qui parle de son film en ces termes : »Film fantastique, série B, comédie noire, film de zombie, Vincent doit mourir est un mélange de plusieurs cinémas. Une fable à la croisée des genres pour ainsi dire… » Il ajoutera même de son propre film que celui-ci est « bizarre « !! On peut en effet largement lui concéder le statut d’ovni !! Autant le dire, sur le papier, on est fans d’une telle ambition de mix des styles car si la créativité est au rendez-vous, ce qui est largement le cas ici, alors c’est les émotions qui se chevauchent. Dit autrement, dans la même minute, on se marre, on pleure, on fait « wouah » et on a peur. Une des aspirations premières du cinéaste avec Vincent doit mourir est de rendre compte de l’agressivité du monde, dans la violence et le désordre, aussi bien social qu’amoureux. Le tout patiné d’un humour noir et absurde, avec cette aspiration de Stephan Castang : « rire de nos propres peurs « , pari ambitieux. Avec par ailleurs, la pépite Karim Leklou au casting, la promesse de Vincent doit mourir est totale. Le sens de l’allégorie est permanent. Celui de la dénonciation d’un monde rongé par la violence. Et quoi de mieux pour dénoncer la violence que… montrer cette violence. Y compris et surtout quand celle-ci, totalement gratuite et infondée s’exerce comme contre Vincent, sans raison apparente, c’est ainsi la meilleure façon de la ridiculiser en l’isolant de la sorte.
Et le cinéaste en la matière ne fait pas dans le détail. Tout le monde se prend des brins, et pas des petits… De 7 à 77 ans, de la petite tête blonde aux cheveux bleus des mamies à moustache, ça castagne dans tous les sens. Au-delà du message du fond, cette banalisation est un véritable ressort d’une forme de cruauté jubilatoire à l’écran. Il y a les coups, mais il y a les mots, et quelle qualité d’écriture !! Vincent doit mourir, c’est toujours le sens du bon mot au bon moment, la surprise permanente, les jeux de silences et de consternation de l’interlocuteur dépassé par ce qu’il entend. A cet égard, certaines scènes sont irrésistiblement cultes. Comme il ne faut surtout pas regarder Vincent dans les yeux, au risque que l’autre veuille le buter sur une pulsion inarrêtable, quand Margaux entreprend d’embrasser Vincent (enfin un peu de douceur !!), celui-ci lui rétorquera spontanément : « C’est dangereux ça « . Et oui, au-delà du risque en question, c’est dangereux de s’embrasser, c’est périlleux de se donner à l’autre. Tout est comme ça dans Vincent doit mourir, le sacre de la métaphore, une intelligence de situation et des tiroirs à ouvrir dans tous les coins du champ de la caméra. Une accumulation de petits bonheurs. Peu de temps après, quand Margaux veut aider Vincent, l’exemple qu’elle va déplier sera totalement poilant. Elle lui raconte que face à des chiens méchants, son grand-père lui disait toujours de leur mettre un doigt dans le cul, et que face à ceux qui veulent le tuer, Vincent devrait essayer de faire pareil… La salle explose de rire !!! Un bon coup de pelle dans la gueule, ça ne peut pas faire de mal, il y a du Bernie (1996) dans Vincent doit mourir. C’est totalement transgressif et politiquement incorrect. L’aspect série B, dans des scènes parfois bien gores, mais jamais gratuites car au service de la narration, offre une mise en scène parfois lunaire, qui scotche encore plus le spectateur, qui comprend vite que tout peut arriver.
Il y a du Bill Murray chez Karim Leklou !! Ce flegme à toute épreuve, cette extrême inexpressivité par moment, pour justement dans l’art du contrepied, faire passer tellement de messages. Alors, dès qu’il l’ouvre, c’est encore meilleur. Karim Leklou c’est une pyramide de talents !!! Particulièrement dans ce rôle où son évolution de douce victime expiatoire vers un forcené qui finit par se barricader, lui donne l’opportunité de montrer toute l’étendue de sa palette, et elle semble ne jamais s’arrêter !! Vimala Pons qui joue Margaux est elle aussi complètement dans l’incarnation de son personnage. Elle manie la folie douce avec un sens du naturel totalement ébouriffant. Vincent doit mourir est bien sûr tout sauf une farce, même si ici, l’absurdité est une arme de destruction massive. Là où le film touche à son Graal, c’est bien dans son message profondément humaniste, actuel, pop, par les meilleurs biais possibles de ce que le cinéma permet. Si Vincent doit mourir, les spectateurs eux doivent courir.
Titre original: VINCENT DOIT MOURIR
Réalisé par: Stephan Castang
Casting: Karim Leklou, Vimala Pons, François Chattot …
Genre: Thriller, Fantastique, Comédie, drame
Sortie le: Prochainement
Distribué par : Capricci Films
EXCELLENT
Catégories :Critiques Cinéma, Festival de Cannes 2023, Les années 2020