SYNOPSIS: Dans les années cinquante, dans une grande demeure bourgeoise en pleine campagne, les gens sont sur le point de fêter Noël. Mais un drame se produit : le maître de maison est retrouvé assassiné. Le ou plutôt la coupable se cache parmi huit femmes que fréquentait régulièrement la victime. Commence alors une longue journée d’enquête, faite de disputes, de trahisons et de révélations.
8 femmes est le quatrième film de François Ozon, avec ce casting qui plus de 20 après fait encore rêver. Il jubilait de faire jouer ensemble toutes ces comédiennes et forcément à un moment, les faire tourner ou plutôt tournoyer ainsi, devient un véritable plaisir cinéphile pour tous les spectateurs. Le film est en fait la seconde adaptation cinématographique de la pièce de théâtre éponyme de Robert Thomas. Un générique déjà complètement déjanté et poétique puisque chaque actrice, chaque héroïne, chaque icône d’Ozon a le droit à sa fleur emblème. Tout de suite, on est dans l’audace et dans le symbole. Sans toutes les réciter, évidemment à ce jeu-là, Fanny Ardant est une rose rouge… Les couleurs éclatantes et brillantes sont partout, et nous écorchent les yeux de plaisir. Ozon adore ça, nous en met plein les mirettes à chaque plan, on est autant heureux que lui. C’est une explosion colorée et aussi étoilée tant les princesses et reines du cinéma français se succèdent ici à l’écran. 8 Femmes, ça démarre avec une rare puissance. Le premier tableau chanté avec Ludivine Sagnier, Catherine Deneuve et Virginie Ledoyen est déjà tellement dans le rythme, dans un souffle romanesque ébouriffant et tellement créatif. Plein les yeux on savait, mais aussi plein les oreilles. 8 femmes éveille et sublime nos sens. Le Cluedo au féminin s’installe. C’est parti pour plus d’une heure de faux semblants, de regards en coins, de pudeurs de gazelles, de froideurs coupables, d’accusations même pas dissimulées… Elles vont s’en donner à cœur joie dans les médiocrités ordinaires des rancœurs émergentes, ces actrices qui vont jouer aux actrices.
On est dans un western au féminin, où les balles sifflent avec une violence inouïe, dans de permanents règlements de compte qui viennent de profondes meurtrissures de l’âme. La scène du jeu des alibis avec tour à tour un plan fixe sur chacune d’entre elle est comme un exercice de haute voltige. Notamment, la bonne, jouée par Emmanuelle Béart, où toutes comprennent qu’elle avait les faveurs du défunt… Qui lâche : « Je préfère être accusée de vice que de meurtre » avec une inoubliable perfidie dans le regard. Toutes joueront dans ce moment une partition pleine et entière. L’écriture est alors un petit bonheur d’horreur et de cynisme. Tant de poésie vient ponctuer ce polar si intriguant : cette neige abondante, ces répliques de mal d’amour, les regards si perçants des 8 femmes, l’absence d’homme au casting, la farandole folle des colorations, des tableaux musicaux. Dans 8 Femmes, tout n’est qu’esthétisme dans le geste de cinéma d’Ozon, autant l’art du récit que l’aspect formel de son déploiement.
Une comédie musicale, une comédie, un polar, un thriller affectif, un drama familial, les croisements sont partout dans ce foisonnement des genres. Elles ont évidemment toutes les 8 chacune un bon alibi, forcément toujours un peu les mêmes pour tout bon meurtre : l’argent, l’amour, la vengeance. Évidemment c’est un meurtre en meute. C’est un peu toutes les 8 qui l’ont tué… Ou pas !!! On va assister aux confidences les plus intimes, douteuses, parfois scabreuses, qui vont s’enchaîner pour ces 8 femmes, ces 8 destins, tant de secrets, de grands déballages, tant de drames et tant de larmes. Chacune fait un magistral numéro, ce qui rend 8 Femmes captivant, impossible à décrocher.
Le casting 8 étoiles porte évidemment le film, et magnifie un scénario déjà bien solide. Catherine Deneuve dans son impériale habitude de reine en or. Isabelle Huppert en insupportable vieille fille, belle-sœur qui nous régale de sa naturelle folie douce. Emmanuelle Béart en impératrice du vice subtil et voluptueux. Fanny Ardant, l’incarnation de l’amour à la française, l’icône absolue. Virginie Ledoyen avec cette présence passionnée si magnétique, chaleureuse et authentique. Danielle Darrieux dans une insupportable aigreur, mais le rire au fond des yeux. Ludivine Sagnier, ici comme une stagiaire, mais qui justement surclasse par cette candeur entretenue ses tutrices. Et Firmine Richard, avec dans les yeux la flamme du jeu qui ensorcèle. 8 femmes, 8 bonheurs. 8 Femmes porte en lui comme un désespoir, celui de l’amour entravé, à l’image de cette terrible conclusion, sur un texte d’Aragon, et car tout finit toujours en chanson, surtout 8 femmes, « Il n’y a pas d’amour heureux »…
Titre Original: 8 FEMMES
Réalisé par: François Ozon
Casting : Catherine Deneuve, Isabelle Huppert, Emmanuelle Béart …
Genre: Policier, Comédie, Drame
Sortie le : 6 Février 2002
Distribué par: –
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Catégories :Critiques Cinéma, Les années 2000