SYNOPSIS: Commençant à une époque de paix relative, la série suit un ensemble de personnages, à la fois familiers et nouveaux, alors qu’ils affrontent la réémergence tant redoutée du mal sur la Terre du Milieu. Des profondeurs les plus sombres des Monts Brumeux, aux forêts majestueuses de la capitale Elfique de Lindon, à l’île royaume à couper le souffle de Númenor, et jusqu’aux confins les plus éloignés du monde, ces royaumes et personnages bâtiront des légendes qui continueront d’exister bien longtemps après leur mort.
Il fallait bien laisser une grosse semaine s’écouler pour prendre du recul et digérer la première saison des Anneaux de pouvoir, qui vient de se terminer sur Prime Vidéo au terme de huit épisodes plus ou moins intéressants, et plus ou moins fastidieux. Beaucoup d’encre a coulé sur le sujet, pléthore de comparaisons ont été effectuées entre cette première salve d’épisodes et sa supposée « concurrente » House of the Dragon (nous n’avons d’ailleurs pas encore regardé le spectacle, donc nous nous garderons bien d’enfoncer des portes ouvertes), ou encore entre les films et les livres du lore…bref des sujets sur lesquels nous ne reviendrons pas pour juger le produit uniquement sur pièce. Son apparente fidélité ou infidélité à l’œuvre de Tolkien n’entrera donc pas directement en compte dans la mesure où nous acceptons sur le principe, au moins d’un point de vue chronologique et narratif, que des libertés soient prises, du moment que nous assistons à la narration d’une belle histoire. Il y a d’ailleurs fort à parier que les comparaisons entre des adaptations et leurs matériaux d’origine n’en soient qu’à leurs balbutiements dans la mesure où nous apprenions en août dernier le rachat hallucinant de droits de l’œuvre de Tolkien par le groupe suédois Embracer. Mais chaque chose en son temps : quid des fameux Anneaux de pouvoir ?
Dotée d’un budget faramineux, la série sait comment capter notre attention : nos premières et dernières impressions sur la forme des Anneaux de pouvoir sont on ne peut plus positives. C’est magnifique et la minutie apportée aux détails est impressionnante. Rarement (jamais ?) une série n’aura à ce point montré à l’écran l’argent dépensé pour faire vivre son univers et nous en mettre plein les globes. C’est d’ailleurs une force imparable dans la mesure où même si un épisode s’avère décevant, il est toujours rattrapé et compensé par un minimum de plaisir lié à la découverte des lieux, des costumes et des différents effets spéciaux. Sur l’eau, lors d’une éruption, dans la forêt ou au cœur des villes, le show n’est jamais avare en générosité et on ne pourra que saluer chaleureusement tout le travail et tout le soin apporté à l’ensemble. Quant aux personnages et au scénario…ce n’est malheureusement pas la même limonade.
Les Anneaux de pouvoir souffre d’un premier défaut tout à fait évident et qui ne se corrige jamais tout du long : les dialogues sont tout bonnement catastrophiques. Illustration parfaite de gloubi-boulga sans saveur vraisemblablement apprécié uniquement de ses propres scénaristes, le constat est désolant : déjà entendue dans de multiples films et séries peu inspirés, chaque phrase sonne comme une sentence de mauvais goût qui frôle le ridicule. Entre niaiserie et solennité exacerbée, il y a de quoi lever les yeux au ciel. Le plus pénible, que nous reprochions déjà par le passé à une série comme Game of Thrones, c’est que l’ensemble se prend trop au sérieux et ne délivre que des dialogues « indispensables », y compris au sein des pérégrinations d’un peuple tel que les Hobbits pourtant supposés plus perchés et déconnectés de la réalité. Ce que nous voulons dire par là c’est que les moments de légèreté n’existent presque jamais et que chaque phrase a vocation à nous présenter quelque chose, à amener un sujet décisif, à broder sur de la création artificielle de liens ou à débattre sur des dilemmes moraux en pagaille. C’est trop, c’est juste trop : dénuée de naturel et de spontanéité, la série nous empêche de nous attacher à ses personnages (hormis quelques rares exceptions).
Cette sensation de dialogues complètement délétères et à la masse est renforcée par une galerie de personnages extrêmement fournie. C’est un autre défaut du show : il y a trop de protagonistes. On peut décomposer ces derniers en différents camps synthétiques : les Hobbits, Galadriel, Elrond et Durin, Arondir, les Orcs…quand chaque camp peuplé de différents personnages ne se trouve pas lui-même scindé en d’autres camps (comme Theo qui se retrouve fréquemment en électron libre, un personnage d’ailleurs aussi ingérable qu’insupportable). Sans passer en revue tout le monde, gageons qu’hormis Elrond et Durin (ce duo est fantastique, drôle, émouvant et attachant) personne n’arrive à capter notre attention. Ce ne sont pas l’antipathique Galadriel (qui possède certains des pires dialogues jamais écrits dans la série), aussi classe soit-elle au cours des combats, les glandus de Hobbits qui passent leur temps à geindre parce que le mystérieux étranger tombé du ciel leur fait des misères (combien de fois les scénaristes nous ont-ils fait le coup du géant maladroit cette saison ?), le sentimentalisme d’Arondir (oui on avoue quand même, on aime ce personnage pour son charisme et sa classe, mais hormis ça c’est une coquille vide) ou encore la tanche d’isildur qui vont emporter tous les suffrages. C’est vraiment dommage car la multitude de personnages et de futilités associées noient tout intérêt pour l’intrigue qui peut se résumer à : »Qui est Sauron ? « , « Ah mais s’ils mettaient Gandalf alors qu’il ne doit apparaître que durant le troisième âge qu’est-ce que cela signifierait ? », « Quand vont donc apparaître les anneaux ? », « Oh du mithril« … Tout le reste ne consiste qu’en des coups d’épée dans l’eau et à du suspense de bas étage pour nous faire croire que tel ou tel personnage pourtant intouchable est décédé tragiquement ou va expirer son dernier souffle dans les prochaines minutes, alors qu’au final personne ne meurt jamais hormis des seconds couteaux sans aucune espèce d’importance.
Le plus triste est que même si les scènes d’action ou de tension sont prenantes, elles sont souvent désamorcées par un manque d’enjeu ou un problème de crédibilité. Par exemple le plan séquence où Theo tente de fuir les orcs est savoureux sur le principe mais paraît tout à fait improbable compte tenu des lieux, du timing et du nombre d’orcs présents dans les parages. Nous saluerons tout de même l’exécution de l’ensemble car les combats sont très réussis, à cheval ou au corps à corps. Nous aimons tout particulièrement les chorégraphies d’Arondir dont le style n’est pas sans rappeler celui de Legolas tout en étant certes un peu plus « lourd » dans ses mouvements mais aussi de fait plus réaliste.
Mais alors Les Anneaux de pouvoir sont-ils si ratés que ça ? Non, mais partiellement décevants ça c’est une certitude. Admettons que cette première étape soit un passage incontournable mais décisif pour placer les pions qui mèneront à une suite bien plus maîtrisée, il n’en demeure pas moins que la série souffre d’un véritable problème d’écriture de ses dialogues et de la caractérisation de ses personnages. Si le final de la saison promet d’emblée une nouvelle dynamique, notamment au niveau des personnages de Sauron, de Nori et de l’étranger tombé du ciel (peut-être moins mystérieux après le final pour le coup), cela suffira-t-il à donner envie au public de s’y recoller lors de la deuxième saison ? Sûrement, mais le bouche à oreilles se devra d’être excellent, car une deuxième saison à l’image de la première risquera d’être fatale pour son image et sa popularité. Prévue pour cinq saisons, le chemin reste encore long à parcourir. En tout cas nous sommes d’avis de laisser une chance à cette adaptation, qui sait démontrer via son savoir-faire technique qu’elle n’est pas qu’entre de mauvaises mains. Contrairement à ce que nous avons lu ici et là, le problème du show n’est pas sa lenteur, mais bien la futilité de ses dialogues et de ses non-événements ainsi que son manque de poésie et de profondeur. Rendez-vous, supposément en 2024, pour être fixés sur les ambitions de ces anneaux, dont le pouvoir et l’influence restent ici à confirmer.
Crédits: Amazon Prime Video