Réalisateur de documentaires sur le cinéma, dénicheur de suppléments inédits et rares pour de nombreux éditeurs vidéo, Jérôme Wybon est désormais à la tête d’une nouvelle collection vidéo avec StudioCanal. Il nous explique de quoi il retourne.
Quelle est la genèse de cette nouvelle collection ?
L’idée trouve son origine au Festival Lumière à Lyon, lors d’une discussion avec l’équipe de Studiocanal au marché international du film classique. Je donnais déjà un coup de main sur les archives pour la collection Make My Day de Jean-Baptiste Thoret, et j’ai soumis l’idée de cette collection dédiée au cinéma français des années 70. L’idée a fait son chemin et le résultat est aujourd’hui dans les bacs.
Quelle était ta première ambition en proposant ce travail? Réhabiliter des films oubliés ou la recherche de suppléments inédits ?
Un peu des deux. Il y a d’abord la volonté de proposer des classiques en Blu-Ray, parfois peu ou pas du tout éditorialisés par le passé. Par exemple, Je sais rien mais je dirai tout n’avait connu qu’une édition dvd en 2002 sans aucun bonus. Il y a l’idée aussi de voir si ce film, souvent présenté comme un simple divertissement, ne nous raconte pas autre chose sur cet artiste, ses engagements, sur cette époque. Cela passe alors par les suppléments et archives souvent inédites, qui montrent comment la promotion des films s’est faite à l’époque. La présence d’un long Making of d’époque sur le tournage du film de Pierre Richard est l’une de mes grandes satisfactions sur cette première vague. Il n’a pas été vu depuis 40 ans. Et puis il y a un vraie curiosité de ma part pour tous ces films moins connus, parce qu’ils ont été des échecs commerciaux à leur sortie, ou parce qu’ils ont été mal distribués, mal reçus tout simplement, mais qui ont des casting extraordinaires, comme Trintignant ou Girardot.
Pour quelles raisons se focaliser uniquement sur les années 70 ? Que représente cette décennie dans le cinéma français ?
J’avais fait un documentaire sur Cannes 1968 et l’engagement politique des cinéastes français lors de cet événement, suivi par les états généraux du cinéma en juin 1968. Et je me suis intéressé par la suite aux conséquences de mai 1968 dans le cinéma français. Et tous les changements sociétaux, idéologiques qui ont découlé de mai 1968 se retrouvent très vite dans le cinéma français de l’époque, plus engagé, plus libre, plus irrévérencieux. Et donc, en se focalisant sur une unique décennie, on peut y voir une représentation assez juste de la société française de ces années-là, en plus de retrouver tous ces acteurs et actrices qu’on aime, parfois dans des films moins connus.
Comment s’est opéré les choix de films ?
J’ai fait une première liste de titres qu’on a affiné ensuite avec les équipes de Studiocanal en fonction du matériel ou des droits disponibles mais je me souviens que Calmos était l’un des tous premiers titres que j’avais retenus. Et des titres au départ indisponibles se sont ajoutés, quand une restauration 4K a été lancée, comme sur La Vieille fille.
Les suppléments de la première salve sont très riches. Où es-tu allé déniché certaines pépites comme les scènes coupées pour Je sais rien mais je dirais tout. C’est courant d’avoir accès à ce genre de matériel ?
C’est assez rare en fait car tout était généralement détruit quelques mois après la sortie des films. C’est ainsi qu’on a perdu 45 minutes de scènes coupées des Bronzés font du ski. Ici, il s’agit d’une source 16mm dont il ne restait qu’un transfert vidéo un peu défraîchi mais la rareté de l’élément prime avant tout. Je devrais pouvoir proposer des scènes coupées sur d’autres titres, et peut-être un bêtisier sur l’un des titres.
Quelle sera la périodicité des salves de sorties?
Après la première vague de six titres en septembre dernier, Studiocanal sortira trois titres chaque trimestre. Le but est de mélanger des classiques attendus en Blu-Ray et des raretés, voire des inédits en vidéo. Défense de savoir de Nadine Trintignant était inédit en vidéo jusqu’ici.
Quels sont les prochains titres à paraître ?
Les Galettes de Pont-Aven, La Vieille fille et l’inédit L’Ordinateur des pompes funèbres.
Cette activité te permet-elle de continuer à travailler sur d’autres projets et si oui lesquels ?
Mon prochain documentaire, Philippe de Broca ou l’art de la mélancolie sera diffusé en décembre sur Ciné +, et je suis en plein montage d’un documentaire pour France 3.
Propos recueillis par Fred Teper
Catégories :ENTRETIENS, Festival Lumière 2022