SYNOPSIS: Paris, années 80. Elisabeth vient d’être quittée par son mari et doit assurer le quotidien de ses deux adolescents, Matthias et Judith. Elle trouve un emploi dans une émission de radio de nuit, où elle fait la connaissance de Talulah, jeune fille désœuvrée qu’elle prend sous son aile. Talulah découvre la chaleur d’un foyer et Matthias la possibilité d’un premier amour, tandis qu’Elisabeth invente son chemin, pour la première fois peut-être. Tous s’aiment, se débattent… leur vie recommencée ?
Mikhael Hers poursuit une œuvre délicate, sincère et mélancolique entamée par Memory Lane et Ce sentiment de l’été et qui avait trouvé son acmé avec le bouleversant Amanda (2018). Cette mélopée qui nous touche et nous enveloppe de sa douceur caractéristique, on la retrouve dans son nouveau film, Les Passagers de la nuit, dans lequel le metteur en scène continue de tracer son sillage avec cette propension à réussir à jouer une petite musique qui sait parler au plus grand nombre en faisant interagir les infinies petites choses de la vie avec les grands bouleversements sociétaux et familiaux que l’on peut rencontrer, tout en parvenant à capter une époque, fut-elle lointaine (ici l’année 1981 et l’arrivée de la gauche au pouvoir), tout en rendant son propos résolument moderne. Après la petite fille recueillie par son oncle, c’est une jeune paumée qu’une mère de famille, perdue elle aussi, depuis qu’elle est séparée de son mari, accueille sous son toit, où elle élève déjà deux adolescents. Avec cette faculté qu’a Mikhael Hers à déployer des trésors d’humanité derrière une apparente clarté moins limpide qu’elle en a l’air. Dans Les Passagers de la nuit, on est émus, on sourit, on vibre dans un Paris qui sent bon la vie et dont les battements du cœur sont branchés sur un tempo mezza vocce absolument délicieux. En insérant dans ses images des filtres qui ravivent le souvenir de ces années pleines d’espoir qui possédaient en elles des promesses de beaux lendemains, le réalisateur nous replonge dans une ambiance qui, aujourd’hui, a tout d’un univers révolu et d’un monde englouti. Il faut dire la beauté de ce film, les accents déchirants de poésie qu’il charrie, la douce sensation de nostalgie, jamais passéiste, qu’il donne à déguster, il faut dire la douceur et la sensibilité qui exhalent d’une œuvre qui cherche sans relâche à retrouver ces sensations enfouies d’un bien-être qui s’est peu à peu évaporé.
Tissant son récit sur une période de sept ans, le réalisateur suit la destinée d’Elisabeth, qui cherche à se reconstruire et qui va le faire d’abord en trouvant sa voie au standard d’une émission de nuit diffusée sur France Inter. Puis en s’émancipant petit à petit de son statut de femme entretenue par un mari qui une fois parti, ne lui laisse aucune échappatoire, si ce n’est ne pas se laisser couler et lutter contre l’asphyxie toute proche. Prise sous l’aile de la présentatrice de l’émission (étonnante Emmanuelle Béart), devant faire face à l’envol du nid de son ainée et aux premiers émois de son cadet avec une fugueuse aussi belle que possiblement dangereuse, elle va aussi progressivement se réouvrir à l’amour.
Sous cette banalité apparente, Mikhael Hers signe un film merveilleux, dont chaque idée est une idée de cinéma, dès lors qu’il s’agit de convoquer non seulement des maitres et des figures marquantes éphémères (Les nuits de la pleine lune d’Eric Rohmer avec Pascale Ogier). La simplicité possède parfois plus de détermination que la démonstration de force. Avec son air de ne pas y toucher, Les passagers de la nuit nous fait ressentir une époque par tous les pores de la peau, sa dynamique, son flux, son innocence, sa positivité et sa fragilité. Au fil des années qui passent, les choses se fissurent pour les uns, se raffermissent pour les autres, composant la mosaïque d’une famille voulue et choisie qui n’a de cesse de se tenir la main pour avancer tant que faire se peut.
Charlotte Gainsbourg, irrésistible, trouve ici un de ses rôles les plus marquants, les plus forts, auquel elle confère sa sensibilité, sa douceur et sa poigne. Quito Rayon Richter dans le rôle de son fils qui tombe sous le charme vénéneux de la jeune Talulah est d’une justesse imparable (Megan Northam, qui joue sa sœur n’a rien à lui envier). Et Noée Abita, continue de tracer sa route avec un charme, une beauté singulière et un talent hors normes. Avec Les passagers de la nuit, Mikhael Hers dresse avec une infinie sensibilité le portrait d’une famille au cœur des années 80, du flux de leurs pulsations cardiaques et du temps qui passe Un geste profondément mélancolique, tout à la fois nostalgique et résolument moderne. Superbe!
Titre Original: LES PASSAGERS DE LA NUIT
Réalisé par: Mikhaël Hers
Casting : Charlotte Gainsbourg, Quito Rayon Richter, Noée Abita …
Genre: Drame
Sortie le: 04 mai 2022
Distribué par: Pyramide Distribution
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Catégories :Critiques Cinéma, Les années 2020