Critiques Cinéma

VANISHING (Critique)

SYNOPSIS: Tandis qu’elle présente une méthode révolutionnaire de prise d’empreintes digitales à Séoul, une professeure en médecine légale est associée par la police coréenne à une affaire en cours. Elle plonge dans une enquête ardue et entêtante, au risque de réveiller des démons qu’elle croyait oubliés…

Adapté du roman de Peter May, The Killing room, le scénario se préparait depuis onze ans. Sortie en salle en Corée, Vanishing sera diffusé chez nous directement sur le petit écran via Canal Plus. Quand son producteur lui a proposé la Corée du Sud comme lieu de tournage, Denis Dercourt n’a pas pu refuser, tant il peut ériger la Corée comme un modèle, en termes de mises en images de séries et de films. Entre une folle originalité et une noirceur parfois extrême, les créations coréennes se démarquent aussi par un esthétisme puissant, au service d’un foisonnant laboratoire des ambivalences et des émotions. Le cinéma Coréen en général et dans le monde du thriller en particulier, semble un des seuls à pouvoir concurrencer les blockbusters de l’oncle Sam. Phénomène de la nouvelle vague Coréenne qui monte en puissance depuis au moins 20 ans, comment ne pas avoir en tête le fer de lance du monumental chef d’œuvre qu’est Parasite (2019)  mais aussi d’autres morceaux d’anthologie dont Denis Dercourt dit s’être directement inspiré pour  Vanishnig , qu’il s’agisse de The Chaser  (2009) ou l’anthologique Memories of Murder (2004), où pour ce dernier, Dercourt aime l’idée d’un policier un peu différent, en décalage. Ainsi que Burning (2018) qui a beaucoup impressionné le réalisateur sur notamment une forme de poésie à l’image.


Le cinéaste a attaché beaucoup d’importance et donc de temps à l’écriture, pour s’abreuver de la culture Coréenne, car il tenait absolument à ne pas verser dans le « cinéma cliché  ». Cette aspiration se concrétise à l’écran avec notamment un thriller sans fioritures et une évidente envie de rendre la narration crédible. A cet égard, il a laissé une très grande marge de manœuvre aux acteurs coréens, afin de laisser libre court à leurs improvisations, pour que le film soit empreint de la culture originelle et qu’il n’aient pas l’air d’acteurs Coréens, qui auraient été dirigés par un Européen, dans une idée extérieure trop figée, et potentiellement fausse. En tant que musicien, Denis Dercourt a connu beaucoup d’étudiants Coréens, dont il dit avoir été impressionné par la force de travail. Il s’en est inspiré, accordant beaucoup de temps à la préparation du film. Dans un mix de culture, qui s’est fait sur un fil, Denis Dercourt a voulu faire un film Coréen avant toute autre chose, et le public sur place aux premières projections lui a confirmé la réussite de cette aspiration.  Vanishing, s’il n’a pas la brillance en termes de créativité des illustres prédécesseurs nommés ci-dessus, tient largement son rang, notamment par l’installation d’une atmosphère pesante de la première à la dernière minute. Une maîtrise du réalisateur que l’on avait pu observer dans nombre de ses opus précédent, comme entre autres La Tourneuse de Pages (2006), ou Demain dès l’aube (2009).


Les codes haletants du thriller sont dans le film incontestablement présents, qui tripatouillent l’âme humaine, mais aussi les corps, attendus que l’on parle quand même de trafic d’organes. Et clairement, au regard de l’aspect horrifique du sujet, le film pousse l’étude de la noirceur, au regard des apprentis sorciers en mode charcutiers fous en sous-sol… C’est bien sûr également un film puzzle, avec ce petit moment enivrant où l’où nous perd quelque peu, mais assez furtivement, et où le cinéaste finalement nous reconstitue, là aussi, comme un chirurgien le ferait… Vanishing  est d’ailleurs assez étonnant, car il n’est pas grandiloquent, notamment dans ses affrontements et courses-poursuites, ce qui est sûrement volontaire pour assurer une crédibilité dans la narration. Le film n’en demeure pas moins surprenant en jouant sur la couleur des émotions notamment, au travers du personnage de l’inspecteur Jin-Ho. Il est en effet très humanisé, avec ses tours de magie et aussi la tendre affection qu’il porte à sa nièce. Il n’est pas « embarqué » dans la noirceur de l’histoire. Il est même en revanche très lumineux tout comme son associée le temps de l’enquête, Alice, qui au-delà de ses tenues souvent claires, la démarquant constamment à l’image, apporte une chaleur bienveillante au récit. Le contraste est évident avec la forme d’atrocité du sujet traité. Le duo héroïque va se sentir d’autant plus engagé dans la résolution de l’affaire. Sans divulgâcher, il est aussi possible d’affirmer que c’est une femme face à son destin, dans une quête réparatrice. La question toute entière sera de savoir si elle retrouvera sa paix intérieure. Une sorte de thriller dans le thriller. On pourrait néanmoins regretter un manque de nuance dans l’approche psychologique des « méchants  » qui sont… » très méchants  » et qui aurait mérité moins d’ellipses et de suggestions, avec d’avantage de clés de compréhension de comment ils en sont arrivés à trafiquer des organes. L’opposition de style avec Jin-Ho et Alice aurait alors gagné en puissance. La musique, dont on connaît l’importance dans le parcours autant personnel que cinéphile du cinéaste est assuré par Jérôme Lemonnier pour la septième fois depuis leur rencontre. Elle permet, tout comme les jeux de contrastes de la photographie, de donner du souffle et du rythme dans une histoire où dans le glauque des caves, on scarifie et sacrifie, et où l’on remonte dans une cité si lumineuse et bruyante. Vanishing est aussi affaire d’internationalisme où l’on manie et jongle avec trois langues, entre le Coréen, l’Anglais et le Français. Ce qui se retrouve donc au casting, avec notamment Yoo Yeon-Seok, qui incarne avec grande justesse un policier à dimension très humaine. Denis Dercourt qui ignorait la popularité dans son pays de son acteur phare, s’en est rendu compte pendant le tournage, notamment avec une omniprésence de fans féminines à proximité de chaque prise !! Et bien sûr il y a Olga Kurylenko, actrice franco-ukrainienne, dans le rôle d’Alice, qui dans son personnage comme dans son interprétation incarne l’espoir du film. Sa douceur et une forme de grâce toute en retenue, sont pleinement captées par la caméra, et illuminent le film. Au final, Vanishing , s’il ne révolutionne pas le genre, demeure très prenant et cette ambiance pesante constante, cette torpeur jamais pénible, en font un thriller d’une belle intensité, et où l’on plonge sans décrocher, ce qui est le but recherché.

Titre Original: VANISHING
 

Réalisé par: Denis Dercourt

Casting : Olga Kurylenko , Yoo Yeon-Seok , Ji-won Ye…

Genre: Romance, Thriller

Date de sortie : 05 Avril 2022

Distribué par: Canal Plus

TRÈS BIEN

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s