SYNOPSIS: Léo vient juste de terminer ses classes et pour sa première affection, il écope d’une mission Sentinelle. Avec sa patrouille, il arpente les rues de la capitale à l’affût de la moindre menace. Mais plus la frustration augmente, plus la paranoïa guette le jeune soldat…
Depuis le déploiement de l’opération sentinelle en janvier 2015, les militaires sont beaucoup plus présents dans l’espace public, dans l’attente d’une potentielle attaque. Et c’est cette attente qui se trouve être au cœur du film La Troisième Guerre. On y suit Léo Corvard (interprété par Anthony Bajon), un volontaire qui sort d’école et se retrouve sur le terrain, en quête d’une intervention qui n’arrive jamais, au cœur d’une cellule avec comme camarades plus expérimentés Hicham (incarné par Karim Leklou) et commandée par Yasmine (Leïla Bekhti). Et c’est le décalage entre les attentes et aspirations de Corvard et la réalité du terrain qui est véritablement au cœur du film, celui d’un engagement naïf d’un monde plus sûr face à un monde qui ne cesse de briser les motivations pleines de bonnes intentions. Cette plongée dans la tête d’un militaire est parfaitement crédible et réaliste, et rappelle que si l’école militaire cherche à nous préparer au pire, elle n’apprend pas à nous préparer au vide. Être attentif à tout, pour n’agir que rarement, lorsque la compétence relève. Ce paradoxe est particulièrement bien mis en avant au travers de la réalisation qui s’attarde très souvent sur le visage de son protagoniste, mettant ainsi en perspective l’incompréhension et l’égarement auquel il fait face tout au long du film, notamment dans un environnement cosmopolite alors qu’il n’est pas familier de la ville de Paris. Un décalage voulu par le réalisateur, mais qui n’est malheureusement pas suffisamment approfondi, puisque les quelques scènes montrant le milieu d’où vient le jeune homme ne sont pas suffisamment marquées pour véritablement mettre en avant ce décalage, puisqu’il parle plus de son origine sociale que de la différence de mode de vie entre la capitale et la province.
Cependant, ce petit bémol ne remet pas en cause le talent de Giovanni Aloi dont c’est la première réalisation. En prenant une thématique forte, propre à des blockbusters américains, mais en l’adaptant à échelle humaine, le réalisateur ne tombe à aucun moment dans la facilité en restant proche de son propos initial : que se passe-t-il dans la tête d’un militaire qui ne fait qu’attendre? Le rythme du film, assez lent, monte ponctuellement en intensité au fil de l’histoire et des quelques éléments qui sortent les militaires de leur routine, permettant ainsi d’augmenter progressivement l’intensité du film pour en arriver à un final cohérent avec l’ensemble de l’œuvre. On peut cependant reprocher au niveau de l’histoire la facilité scénaristique du téléphone portable et l’évolution des sentiments de Corvard et de son interlocutrice, malgré la volonté évidente d’introspection qui se cache derrière cet élément.
Le casting se montre à la hauteur du film. Anthony Bajon est impeccable dans la peau de ce militaire frêle qui cherche en lui une mission à la hauteur de son ambition, tandis que Karim Leklou habite son personnage de militaire aguerri. Seule Leïla Bekhti, dont le personnage s’avère être plus en retrait, n’arrive pas forcément à nous convaincre complètement, probablement en raison de sa faible présence à l’écran. Le reste des personnages aurait aussi mérité un développement un peu plus approfondi. Car si ceux-ci font des camarades militaires réalistes dans le cadre du récit, un peu plus de développement aurait encore plus souligné l’environnement de vie de Corvard, qui peut formater à une forme de pensée unique, “normale”, qui écarte ceux qui s’en détournent, accentuant par extension le final du film. Un final cohérent mais qui manque malheureusement d’une touche de tension qui aurait permis au film d’aller au bout de son propos tout en nous tenant en haleine à l’instar d’œuvres telles que Les Misérables. Une conclusion en demi-teinte qui ne doit cependant en rien éclipser les nombreuses qualités du film.
Titre Original: LA TROISIÈME GUERRE
Réalisé par: Giovanni Aloi
Casting : Anthony Bajon, Karim Leklou, Leïla Bekhti…
Genre: Drame
Sortie le: 22 Septembre 2021
Distribué par : Capricci Films
TRÈS BIEN
Catégories :Critiques Cinéma