SYNOPSIS: Deux amies, Thelma et Louise, frustrées par une existence monotone l’une avec son mari, l’autre avec son petit ami, décident de s’offrir un week-end sur les routes magnifiques de l’Arkansas. Premier arrêt, premier saloon, premiers ennuis et tout bascule. Un événement tragique va changer définitivement le cours de leurs vies.
Le cinéma des années 90 fut un véritable catalyseur de la façon -plus ou moins- inexplicable dont le monde fut constamment remué dans ses certitudes les plus traditionnelles. A l’aube de cet an 2000 mystérieusement inquiétant qui signe le passage vertigineux à un nouveau millénaire, les cinéastes de cette époque ont su puiser dans leurs angoisses existentielles et dans leurs questionnements métaphysiques et sociaux les plus parlants pour nous livrer une fournée de films assurément singuliers et annonciateurs des grands bouleversements majeurs qui secouaient et secoueront encore le monde après le grand saut. Si l’apocalypse a eu une place majeure sur nos écrans (Independance Day et Armageddon, pour ne citer que ces deux énormes mastodontes du film catastrophe), c’est principalement le questionnement de la réalité qui l’emporta à chaque fois, comme un besoin de douter de nos conditions les plus primitives d’êtres vivants et sur la place que prennent les apparences dans la société. A travers The Truman Show, Matrix ou encore Edward aux Mains d’Argent, les cinéastes s’éprennent d’explorations « au-delà du réel » qui visent à constamment remettre en question nos croyances les plus basiques. Qu’est-ce que la réalité ? Où en est sa limite ? Qui est véritablement le méchant de l’histoire ? Et dans cette continuité très précise, le cinéma s’est également attaqué à l’exploration de problématiques sociales d’autant plus importantes qu’elles impactent directement la façon de vivre des spectateurs. Par cette volonté de s’intéresser à un tournant majeur dans la représentation de l’émancipation féminine (figure qui a toujours été ô combien importante, mais qui sonne encore et toujours plus d’actualité au fil des années), revenons le temps d’une modeste suite de mots sur le phénomène Thelma & Louise.
Thelma est une femme au foyer vivant sous le joug et l’influence d’un mari macho et pathétique au possible. Louise, quant à elle, est une serveuse libérée qui ne souhaite que vivre son amour avec son petit ami. Ensemble, ces deux personnages construits en opposition trouvent une complémentarité flamboyante, qui les pousse à partir sans crier gare à bord d’une voiture pour traverser le pays. Mais leur road-trip prend une forme nettement plus sombre quand Louise abat d’une balle sur un parking un homme qui tentait de violer Thelma. Leur cavale commence alors, l’occasion de se confronter au genre masculin dans ce qu’il est de pire autant qu’à leur propre statut de femmes en recherche d’émancipation.
Bien qu’il soit réalisé par Ridley Scott, à qui l’on ne doit rien de moins que certains des films les plus importants des années 80/90 (Alien premier du nom, Blade Runner ou encore Gladiator) – qui s’ancre d’ailleurs avec ce film dans un univers réaliste et crédible bien loin de ceux des films cités précédemment – Thelma & Louise est écrit par la scénariste Callie Khouri, dont c’est le premier script. Elle remportera pour celui-ci l’Oscar du meilleur scénario original, preuve qu’Hollywood (à défaut d’avoir agi) a d’ores et déjà compris et assumé l’importance du propos du film. A travers cette histoire, Scott et Khouri scannent le sexisme sous-jacent, quoique souvent assumé, qui corrode l’Amérique. Thelma et Louise, d’abord victimes d’une société patriarcale abusive, se présentent comme icônes postmodernes des luttes féministes, qui ne manqueront d’ailleurs pas de faire parler les spectateurs (notamment masculins) à la sortie du film en 1990, le taxant d’œuvre « misandre » et faisant l’apologie de la « violence gratuite ». Mais au-delà de ces allégations qu’il est aisé de débunker en quelques mots, Thelma & Louise adresse un pied-de-nez aux conventions de l’époque. Callie Khouri fait de deux femmes des protagonistes claires d’un film grand public, réalisé par un metteur en scène très en vogue qui a su marquer durablement le public par ses précédents films. Leur road-movie prend alors la forme d’une plongée dans l’Amérique profonde, terreau d’un sexisme primaire fruit d’un conservatisme datant d’une autre époque. Cette traversée n’est donc pas seulement physique, mais aussi temporelle et philosophique, questionnant la place que la société (et par conséquence le cinéma) laisse à la Femme. Dotée d’une ambiance visuelle poussiéreuse et quasiment apocalyptique contrastée par la fraîcheur et la fougue de ses héroïnes, Thelma & Louise brouille les pistes et joue avec les apparences. Les deux protagonistes se livrent à une fuite cathartique et libératrice qui se transforme en cavalcade tout droit sortie d’un western. En se centrant sur elles et sur les péripéties qu’elles vivent tout au long de leur aventure, Scott parvient à capter ce désir d’humanité et de liberté bouillonnant qui ne faisait que sommeiller. Leur relation explosive et d’une justesse impressionnante soutient l’intégralité du propos du film tout en le justifiant. Et c’est aussi très probablement grâce à Susan Sarandon et Geena Davis, dans peut-être leurs meilleurs rôles respectifs à l’écran, qui trouvent une alchimie évidente en plus d’être chacune à leur façon des personnages complets, modèles absolus d’écriture de scénario. Le reste du casting n’est pas en reste, puisque les personnages secondaires (antagonistes comme accompagnateurs éphémères) sont presque aussi thématiquement importants que le couple de tête. On y trouve notamment Brad Pitt dans le rôle qui l’a fait connaître par le grand public, Harvey Keitel ou encore un Michael Madsen presque à contre-emploi tant il est loin de ses interprétations de grands méchants sans cœur.
En 1990 est sorti un film important par ses thèmes, important par son propos brûlant qui posait sur un spectacle cathartique et haletant. Thelma & Louise a bousculé les choses presque 30 ans trop tôt. Précurseur en plus d’être un véritable exemple d’écriture, Ridley Scott et Callie Khouri ont sortis un film aux aspects féministes flagrants qui sonne dans la postérité comme une évidence aujourd’hui. Avec cette cavale qui transforme un road-buddy-movie en western moderne déguisé en film policier, Thelma et Louise s’imposent comme des figures féministes iconographiques majeures et, comme nous l’indique clairement le plan final, à jamais immortelles. Il en aura fallu du temps pour que ce saut dans le Grand Canyon ne prenne tout son sens.
Titre Original: THELMA & LOUISE
Réalisé par: Ridley Scott
Casting: Susan Sarandon, Geena Davis, Harvey Keitel …
Genre: Comédie dramatique
Sortie le: 29 mai 1991
Distribué par: –
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Catégories :Critiques Cinéma
Ce filme me met mal à l’aise.
Il dépasse tous les codes morales,
ni l’attitude des les hommes, ni ceux des femmes sont justifiées.
Par contre les paysages sont grandioses. Vu de l’Europe, c’est un autre monde!
Lore Salzer.F