Critiques

LA GARÇONNE (Critique Mini-Série Episodes 1×01-1×02) Dans le sillage de sa super-héroïne…

SYNOPSIS: Dans le Paris des Années folles, Louise Kerlac est témoin du meurtre d’un proche, commis par des agents de l’État. Pour échapper au pire, elle doit disparaître. Convaincue que c’est au sein de la police qu’elle va trouver la meilleure planque et le moyen de se disculper, elle se travestit et prend l’identité de son frère jumeau, brisé par la guerre. Elle entre alors à la « criminelle » à sa place ! Un monde interdit aux femmes et son rêve de toujours…

Comme tout le secteur culturel la fiction française a souffert face à la pandémie de coronavirus et retrouver enfin une série inédite, ambitieuse et originale en cette rentrée 2020 nous met forcément les sens aux aguets, impatient d’en découvrir les contours et aussi un peu inquiet de ne pouvoir la défendre comme elle le mérite. La Garçonne, sur le papier, est un projet atypique et excitant qui promet de diviser et qui, fort d’une distribution particulièrement haut de gamme, peut se targuer de mettre l’eau à la bouche. Reconstitution soignée, costumes d’époque élégants, photographie classieuse, La Garçonne se positionne d’emblée sur un terrain qu’ils ne sont pas si nombreux à arpenter en France. Écrit par Dominique Lancelot (Section de Recherches), Marie-Anne Le Pezennec et Alexandra Juilhet d’après une idée originale de Dominique Lancelot et Harold Valentin (Dix Pour Cent), on retrouve dans La Garçonne ce plaisir intense de la fiction historique comme elle nous a séduit au fil du temps, grâce à une efficacité dans la mise en place des enjeux qui permet que la forme et le fond se confondent dans des premières minutes haletantes. Forcément, on s’attend à ce que le récit s’emballe d’un coup et passe la seconde dès lors que notre héroïne est amenée à endosser deux identités supplémentaires. Pourtant, et c’est là où le bât blesse, la série traîne un peu en cours de route, étirant ses rebondissements dans une langueur qui handicape son déploiement mélodramatique. Si le Paris des années folles est majestueusement reconstitué,  on reste un peu sur notre faim dès lors par exemple que les souvenirs de guerre apparaissent sans dépasser le stade d’évocations dans lesquelles on a du mal à s’immerger faute d’images qui impriment la rétine.

La réalisation du franco-américain Paolo Barzman ne manque pourtant pas d’atouts. Il sait mettre en images le récit sans être uniquement illustratif, ses plans ont suffisamment de personnalité et sa technique est irréprochable. En terme d’écriture, la caractérisation des personnages est habile (bien que la plupart des personnages secondaires auraient mérité plus de moelle) et notamment, la personnalité de Louise est impeccablement dessinée. C’est une héroïne complexe, pleine d’allant et extrêmement moderne qui tire la série vers le haut. Reflet de notre société contemporaine et des combats progressistes qui l’animent, le script de La Garçonne est bien ficelé mais le recours à une intrigue policière plus conventionnelle en deuxième rideau ne densifie pas suffisamment l’ensemble à notre goût et lui confère même un classicisme qui brouille l’angle moderne du récit. Malgré tout, l’intrigue parvient à être prenante et le suspense ne repose pas sur des éléments artificiels. Portée par Laura Smet, qui trouve ici un rôle touffu parfois même un peu trop dense, la comédienne n’en fait pas trop et est assez juste la majeure partie du temps, démontrant une belle présence, que ce soit en femme fatale ou travestie en homme. A ses côtés, le toujours impeccable Grégory Fitoussi ne déroge pas à sa réputation et campe un journaliste téméraire qu’il bonifie dans chaque scène. Les autres interprètes (Tom Hygreck, Clément Aubert, Aurélien Recoing, Lilly-Fleur Pointeau, Jérôme Deschamps, Noémie Kocher, Aladin Reibel) forment une distribution homogène qui rend justice à la série. Mélange d’influences diffuses (Des Brigades du Tigre à Rouletabille…) qui ne phagocytent pas son ton général, La Garçonne, si on se laisse prendre dans ses filets et que l’on fait fi du réalisme élémentaire que requiert ce type de projet, est une mini-série plutôt réussie. Cela n’en fait pas une incontournable réussite mais elle a suffisamment d’originalité en son sein pour mériter qu’on la suive jusqu’au bout, dans le sillage de sa super-héroïne.

Crédits: Mother Production / France 2

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