Critiques Cinéma

BLUEBIRD (Critique)

SYNOPSIS: Danny, un ancien taulard aspirant à une vie tranquille en est brutalement extrait quand la fille de sa logeuse est victime d’une agression…

Voici un premier long métrage intéressant à plus d’un titre. Aux manettes de Bluebird on retrouve le romancier Jérémie Guez dont le second roman Balancé dans les cordes avait donné lieu en 2018 au punchy Burn Out de Yann Gozlan. Guez, qui est déjà un auteur aguerri pour le cinéma ( Yves Saint-Laurent, La Nuit a dévoré le monde, Sparring, Rebelles…) est passé derrière la caméra en 2017 pour Bluebird qui, après notamment un passage par le Festival de Beaune 2019 sort enfin sans passer par la case grand écran  et débarque directement en VOD. Ce qui pourrait sembler être un mauvais signe ne présage en fait pas de la qualité d’un film qui, si il n’est pas révolutionnaire, possède une esthétique marquée et est imprégné d’une véritable personnalité. Adapté du roman L’Homme de plonge (The Dishwasher) de Dannie M. Martin, Bluebird démarre en prenant son temps et installe une atmosphère qui nous enrobe dans une sorte de mélancolie languissante allant à contre-courant de ce que l’on pouvait attendre du film sur la base de son pitch. Réunissant Roland Møller (Land of Mine, Northwest, Papillon, Atomic Blonde), Veerle Baetens (Alabama Monroe), Lola Le Lann (Un moment d’égarement) et Lubna Azabal (Incendies), Bluebird démarre comme un thriller psychologique ancré dans une certaine misère sociétale avant de finalement basculer dans le revenge movie sec et brutal.

Bluebird est un film prenant et atypique grâce dans un premier temps à ses atouts formels. Jérémie Guez possède un sens du cinéma impressionnant et sa capacité à composer des plans qui impriment la rétine est extrêmement prometteuse pour la suite. Ensuite la force centrifuge de son film réside dans son duo central charismatique en diable et vecteur de tension et d’émotions fortes. La présence animale et envoûtante de Roland Møller  et les fêlures teintées de rébellion de Lola Le Lann conférant au récit sa chair et sa densité. Les deux autres personnages de femme du récit interprétées par Veerle Baetens et Lubna Azabal ont beau y mettre du cœur et avoir une présence remarquable, elles sont un peu trop sacrifiées pour rester à l’os du récit. Mais, si le réalisateur excelle dans la peinture de ces personnages à la marge et de leurs tentatives souvent vaines de sortir la tête hors de l’eau, l’intrigue du film manque de souffle et d’une puissance dramatique plus large pour nous emporter totalement au centre du tourbillon.

Heureusement le réalisateur maitrise sa matière, suit le rythme de son personnage central, dépeint un rapport trouble entre cette jeune ado et ce type cassé de partout en qui elle voit un père de substitution et il trouve sa respiration dans les scènes qui les réunissent, où une étreinte, un demi-sourire ou un regard imperceptible rendent leurs interactions touchantes. Quand la violence et la tension explose dans le dernier tiers du film, Guez démontre à nouveau tout son savoir-faire pour instaurer une ambiance et un climat, bien aidé par l’ambiance poisseuse de ses décors et les endroits glauques qu’il filme souvent avec brio. Ce coup d’essai prometteur d’un réalisateur qui embrasse le film de genre comme il respire ne pourra pas laisser indifférent ceux qui ont été sensibles à Drive ou Bullhead notamment, ni à tous les amoureux de ce cinéma méprisé par certaines élites intellectuelles au profit d’un mieux-disant auteurisant. On sera toujours du côté de ceux pour qui le genre est un sacerdoce et Jérémie Guez est de ceux-là.

Titre Original: A BLUEBIRD IN MY HEART

Réalisé par: Jérémie Guez

Casting : Roland Møller, Lola Le Lann, Veerle Baetens …

Genre: Drame, Thriller

Sortie le: 16 juin 2020 en VOD

Distribué par: Les Bookmakers / The Jokers

BIEN

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