Critiques Cinéma

ZOMBI CHILD (Critique)

SYNOPSIS: Haïti, 1962. Un homme est ramené d’entre les morts pour être envoyé de force dans l’enfer des plantations de canne à sucre. 55 ans plus tard, au prestigieux pensionnat de la Légion d’honneur à Paris, une adolescente haïtienne confie à ses nouvelles amies le secret qui hante sa famille. Elle est loin de se douter que ces mystères vont persuader l’une d’entre elles, en proie à un chagrin d’amour, à commettre l’irréparable. 

Après The dead don’t die, Zombi Child est déjà le deuxième film de zombies du festival cette année (voire même troisième si on considère qu’Atlantique de Mati Diop en comporte certains éléments). En revanche, le film de Bertrand Bonello n’est pas un film de zombies au sens occidental du terme, puisqu’il revient à ses origines haïtiennes où le zombie est un humain ayant été maudit par un chamane vaudou. En fait, il reprend en partie l’histoire vraie de Clarius Narcisse, un homme « revenu à la vie » dans les années 70 après son apparente mort. Pour l’anecdote, un canadien a écrit un livre sur cette histoire, que Wes Craven a adapté pour son film The serpent and the rainbow.

ZOMBI CHILD 1 CLIFF AND CO

Bonello crée donc à partir de ce socle un récit étalé sur plusieurs temporalités et lieux, partagé entre le Haïti de 1962, le Haïti d’aujourd’hui et la France actuelle. D’après les propres dires de Bonello, le film a été envisagé comme un rapprochement entre un chagrin d’amour adolescent et un homme qui marche dans la nuit, ici plus précisément un zombie en quête de liberté. Comme pour son précédent film Nocturama, Zombi Child est principalement un film de groupe, le groupe correspondant ici à une sororité d’adolescentes cherchant un échappatoire à la pression scolaire de la grande école où elles étudient. Un peu comme Grave de Julia Ducournau, qui prenait le fantastique comme métaphore pour parler de l’adolescence (d’autant plus que les personnages principaux sont dans les deux cas féminins, et que l’on découvre à la fin que le mal qui rongent les héroïnes est héréditaire), Bonello s’intéresse davantage aux émois de l’adolescence (rupture amoureuse, sentiment d’exclusion, pulsion de mort) qu’à la figure du zombie en elle-même. Excepté quelques scènes comme le cauchemar ou la séance vaudou finale, cette figure fantastique est traitée de manière très réaliste, en dehors de toute considération de genre.

ZOMBI CHILD 2 CLIFF AND CO

Sauf que contrairement à Ducournau, et malgré la grande réussite de Nocturama à ce sujet, Bonello ne semble pas totalement maîtriser son film. Et pour cause, il a été écrit et produit en même temps, puis tourné en quatre semaines, et enfin monté sur une période totale de seulement un an. Non pas que cela soit un défaut en soi, mais il arrive souvent que ces cas de production bénéficient en retour d’une énergie créatrice qui éclate à l’écran, or ce n’est malheureusement pas le cas ici. A la place, des dialogues un peu faibles malgré le talent des actrices, une alternance de temporalités et de lieux qui ne manque pas de liant mais de force, et un récit thématique qui semble presque commencer au moment où il se termine. Seule la dernière séquence de transe vaudou sort réellement du lot, viscérale pour certains et ridicule pour d’autres, mais on aimerait en voir plus au moment où Bonello en a justement fini avec son sujet.

ZOMBI CHILD 3 CLIFF AND CO

C’est peut-être parce qu’au final, le sujet du film n’est pas tant l’adolescence ou le chagrin amoureux (on ressent plutôt bien le chagrin, mais jamais l’amour), que la transmission de l’Histoire et de la liberté. Malgré tout, là encore Zombi Child paraît inabouti, le discours semblant s’arrêter au monologue du professeur d’Histoire (joué et quasiment improvisé par l’historien Patrick Boucheron) au début du film, plus quelques images des esclaves se faisant exploiter et les titres de fin. La mise en scène de Bonello ne transcende jamais vraiment les thématiques que le film emploie ni ses personnages, se contentant parfois de simples travellings tant les dialogues semblent primer. Le montage sauve parfois la mise grâce à une certaine rythmique efficace, mais le spectateur se retrouve finalement face à un objet somme toute très théorique, en tout cas davantage intellectuel que sensitif. Ce qui reste fort dommage quand on porte un titre tel que Zombi Child.

zombi child affiche cliff and co

Titre Original: ZOMBI CHILD

Réalisé par: Bertrand Bonello

Casting : Kris Hitchen, Debbie Honeywood, Rhys Stone …

Genre: Drame

Sortie le: 12 juin 2019

Distribué par: Ad Vitam

PAS GÉNIAL

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