SYNOPSIS: Henry Bemis est un modeste guichetier de banque. Il n’aspire qu’à une chose : lire des livres. Mais son irascible épouse et son rigoureux employeur l’en empêchent. Un jour, à la suite d’une guerre atomique, la ville est rasée et tous les habitants tués, sauf Bemis, qui était protégé parce qu’il lisait en cachette dans la salle des coffres.
En 1959, trois ans avant l’épisode des missiles nucléaires soviétiques déployés sur l’Ile de Cuba en représailles aux tentatives américaines de renverser le régime Castriste, la crainte d’un apocalypse nucléaire est déjà bien présente aux États-Unis, lesquels commencent à prendre sérieusement conscience de la capacité de l‘URSS à lancer des missiles nucléaires de longue portée capables de les atteindre. Le cinéma américain ne traduit toutefois pas encore réellement cette peur, même si elle se lit en filigrane dans des films comme L’Homme qui Rétrécit (Jack Arnold, 1958) ou Split Second (Dick Powell, 1953) et même littéralement dans On The Beach (Stanley Kramer, 1959) et le méconnu Five (Arch Oboler, 1951) qui peut être vu comme le précurseur du genre post apocalyptique. Ce sujet est encore plus éloigné de ceux traités dans les séries télévisées de l’époque et c’est dans ce contexte, qui laisse imaginer l’impact qu’aura pu avoir cet épisode, que sera diffusé Time Enough At Last, huitième épisode de la première saison de La Quatrième Dimension. Avec cet épisode que nombre de fans considèrent comme le meilleur de la série, Rod Serling, dont c’était semble-t-il l’épisode préféré, s’empare à nouveau brillamment des sujets et peurs de son époque pour en tirer un récit aux allures de fable prophétique et cruelle.
Mis en scène par John Brahm, réalisateur le plus prolifique de la série (12 épisodes) mais aussi de quelques excellents films noirs, parmi lesquels un chef-d’œuvre (Hangover Square, 1945), ce récit est adapté d’une courte nouvelle de Lynn Venable , parue en 1953, dans l’un des nombreux magazines de Science Fiction de l’époque: If (dont vous pouvez retrouver tous les numéros en accès libre ici). Henry Bemis (Burgess « Mickey Goldmill » Meredith) est typique de ces personnages que l’entrée dans la quatrième dimension va révéler à eux-mêmes et leur donner une cruelle leçon. Sa passion pour la lecture entravée par son employeur, comme par sa femme, relève en réalité son incapacité à vivre dans le monde réel. Le choix de ce type de personnage pour incarner le dernier survivant d’un monde dévasté par l’explosion d’une bombe H introduit un deuxième niveau de lecture dans un épisode dont le propos ne se limite pas à matérialiser la peur qui traverse alors l’Amérique. Le ton du début de l’épisode fait penser aux comédies de cette décennie avec ce rêveur entravé par son employeur et sa femme, personnage à la Folcoche (Vipère au Poing, René Bazin), qui ne supporte plus la passion de son mari et connaît tous les petits trucs qu’il utilise pour tromper sa vigilance. Burgess Meredith est alors en pleine traversée du désert, victime du maccarthysme, blacklisté à Hollywood, il se contente d’apparition dans de nombreuses séries télé. Il sera toujours impossible de ne pas avoir en tête le personnage de Mickey Goldmill (Rocky I, II, III) mais, au delà de ce rôle signature, Burgess Meredith est un fantastique « character actor » et il compose un personnage plein de failles, un rêveur inadapté au monde dans lequel il vit et qui va le voir disparaître alors qu’il est allé s’enfermer dans la salle des coffres pour lire son livre.
Aucune information n’est explicitement livrée sur les circonstances exactes de cet apocalypse nucléaire, le seul indice donné apparaissant sur la « une » alarmiste et prophétique d’un journal que lit Henri. La découverte de ce monde dévasté se fait avec lui à travers les impressionnants décors dont bénéficie cet épisode. Son destin a certainement quelque chose de comique s’il ne s’avérait tragique, quand celui qui estimait ne jamais avoir le temps de lire se retrouve, seul au monde, sans contrainte, avec de quoi se nourrir et lire jusqu’à la fin de ses jours, les livres de la bibliothèque municipale ayant miraculeusement résisté à une explosion qui a fait disparaître la moindre trace de vie et laissé derrière elle un paysage de ruines et de cendres. Il faut évidemment passer au delà des invraisemblances et voir ce récit comme un conte cruel, dans lequel, les commentaires de Rod Serling sont particulièrement présents et glaçants et dont la fin est certainement la plus marquante de la série.
Titre Original: TIME ENOUGH AT LAST
Réalisé par: John Brahm
Casting : Burgess Meredith
Genre: Drame, Fantastique
Première diffusion le: 20 novembre 1959
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Catégories :Critiques, Critiques Cinéma, Séries