SYNOPSIS: A Brooklyn, au croisement de deux quartiers, c’est littéralement le jour le plus chaud de l’année. Cette chaleur estivale va bientôt cristalliser les tensions raciales entre noirs et blancs. Mookie, un jeune afro-américain, travaille comme livreur de pizzas pour les italos-américains Sal et Pino. Tout au long de la journée, alors qu’il livre le voisinage, il va se retrouver au centre de l’action, croisant toute une galerie de personnages : un handicapé vendant des photos de Martin Luther King; Radio Borjo, un voyou se baladant avec sa radio sur le bras; l’animateur d’une station radio locale ou encore un vieux chef de quartier alcoolique dont l’unique conseil est « fais la chose juste ». Une dispute entre Sal et Radio Borjo tourne bientôt en émeute…
Né au cinéma au cœur des années 80 Spike Lee a imposé sa patte et sa singularité dès son premier long métrage, Nola Darling n’en fait qu’à sa tête, film en noir et blanc qui racontait le quotidien d’une jeune femme qui jonglait entre trois amants. En un film, le réalisateur faisait swinguer une énergie vivifiante qui irriguait son récit et ce premier essai recelait suffisamment de promesses pour que Spike Lee soit attendu au tournant. Si son film suivant School Daze, ne fut pas celui de la réelle confirmation, trois ans seulement après Nola Darling, Spike Lee déboulait sur la Croisette avec un film vibrant et cinglant, électrisé par un rap fracassant. Un film choral avec des personnages qui existent tous réellement, un film tout en mouvement, en prise avec son temps qui traite du racisme ordinaire sans didactisme ou théories ronflantes. Dans Do the right thing Spike Lee filme le quotidien d’un quartier noir de New York où les communautés cohabitent entre elles, semble t-il en bonne intelligence, malgré un racisme latent, insidieux et « normalisé » qui se fait jour au sein de chacune d’entre elles envers les autres. Do the right thing débute comme une comédie alerte qui croque une galerie de portraits attachante avant de virer vers le drame inéluctable et incandescent qui va embraser les sens.
Dans une succession de scènes parfaitement agencées et impeccablement écrites, le drame qui va se nouer se trame dès le début sans que nous ne le voyons venir. De par sa construction diabolique, qui fait que rien n’est plus fort et plus marquant que de faire passer la gravité qui sous-tend le propos qu’en la portant à ébullition, après nous avoir fait ressentir de l’empathie pour ces personnages denses et réalistes, Spike Lee fait en sorte que nous ne sachions pas au final à qui imputer ce désolant dénouement si ce n’est à la fatalité, à la chaleur et à la violence qui embrase l’image. Sensuel et moite, le film bénéficie d’un montage sec et d’une vraie proposition formelle, où l’on sent la pellicule comme brûlée par le soleil, où on suffoque tant l’air est vicié et irrespirable à cause de la canicule propice à embraser des esprits déjà bien échauffés.
Observant ce microcosme tel un entomologiste Spike Lee propose d’emblée une esthétique bigarréee propre aux clips et aux pubs, comme avec cette séquence introductive sur un rap tonitruant qui nous plonge dans ce mélange de bruit et de fureur qui ne sera entrecoupé que de quelques accalmies éparses mais toujours menacées par le soleil brûlant et la chaleur suffocante. Cocktail détonnant et sans concessions, cinéma éminemment politique et engagé, Lee s’appuie sur un casting du tonnerre (Samuel L. Jackson, Ossie Davis, Danny Aiello, John Turturro, Giancarlo Esposito, Rosie Perez…) où lui-même en livreur de pizzas est charismatique en diable malgré un jeu détaché qui sert totalement son personnage.
Avec sa manière inimitable de croquer des personnages de la vie de tous les jours, Lee fait entendre avec Do the right thing sa voix singulière dans le cinéma américain à l’aube des années 90 tant dans la forme que dans le fond, en témoigne ces plans en contre-plongée ou cette séquence au bout de 45 minutes du métrage consistant en une litanie d’insultes proférée face caméra tour à tour par chaque représentant d’une des communautés du quartier à l’encontre d’une autre (les chinois contre les juifs, les blancs contre les latinos, les noirs contre les italiens et les italiens contre les noirs, les mexicains contre les chinois…). Près de trente ans après sa sortie Do the right thing conserve son identité de brûlot contestataire, sa représentation socio-politique affirmée et la conclusion du film sur un texte de Martin Luther King, Jr qui prêche la non-violence et d’un autre de Malcom X qui sans appeler à la violence justifie son utilisation pour se défendre, laissant au spectateur le loisir de s’approprier celle qui lui ressemble le plus, en est un exemple flagrant. Spike Lee est alors un immense cinéaste contemporain dans l’affirmation d’une culture afro-américaine plus vivante que jamais et qui inspirera nombre de réalisateurs par la suite.
Titre Original: DO THE RIGHT THING
Réalisé par: Spike Lee
Casting : Spike Lee, Danny Aiello, John Turturro …
Genre: Drame
Date de sortie: 14 juin 1989
Date de reprise: 22 juin 2016
Distribué par: Splendor Films
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Catégories :Critiques Cinéma
(evilashymetrie) Clair que le film est excellent, avec pas mal de force et un discours tout en nuances, des interprètes géniaux. Je lui préfère cependant JUNGLE FEVER et Mo’BETTER BLUES 🙂
Je suis un fan de Jungle Fever aussi! Mo’better blues j’ai très envie de le revoir