Critiques Cinéma

JALOUSE (Critique)

SYNOPSIS: Nathalie Pêcheux, professeure de lettres divorcée, passe quasiment du jour au lendemain de mère attentionnée à jalouse maladive. Si sa première cible est sa ravissante fille de 18 ans, Mathilde, danseuse classique, son champ d’action s’étend bientôt à ses amis, ses collègues, voire son voisinage… Entre comédie grinçante et suspense psychologique, la bascule inattendue d’une femme. 

En 2011 avec La Délicatesse, leur premier long métrage, Stéphane et David Foenkinos avaient fait mouche avec un film plein de douceur, de tendresse et un côté décalé qui lui allait à merveille. Le film n’était peut être par parfait mais il exhalait un parfum suranné qui faisait du bien et le passage derrière la caméra des frères Foenkinos nous laissait espérer le début d’une œuvre empreinte de précaution. Il aura fallu attendre six ans pour qu’ils s’y recollent même s’ils n’ont pas chômé entre temps. Avec Jalouse, ils signent un scénario original racontant l’histoire d’une femme qui développe en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire une jalousie maladive à l’encontre de sa fille avant que ce sentiment destructeur ne s’étende à tout son entourage. Difficile à priori de développer un tel sujet sur 1h40 mais en créant un personnage dense et complexe David et Stéphane Foenkinos parviennent à tisser un récit passionnant qui passe d’une trame à l’autre avec dextérité et faisant basculer ce qui démarre comme une comédie dramatique en un thriller psychologique haletant, zébré d’éclairs d’humanités et électrisé par une Karin Viard absolument impériale.

La comédienne obtient avec ce personnage un être absolument fantastique à jouer, tant elle a des nuances et des sentiments à exprimer, devant passer de la rancœur à l’abandon, de la méchanceté à la détresse, de la revanche à la manipulation en faisant tout pour ne jamais sembler caricaturale. Karin Viard y parvient d’une manière réellement bluffante et elle donne au film toute sa richesse. Le scénario est très malin, en passant de crises d’abord bénignes et anecdotiques de jalousie avant d’être de plus en plus violentes, créant ainsi un suspense et une tension qui n’est jamais artificielle. Ce personnage de stratège, d’une duplicité peu commune et qui doit faire face à des situations qui la mettent plus bas que terre tout en l’empêchant de vivre, va paradoxalement lui conférer toute son humanité et  sa drôlerie jusqu’à même provoquer chez le spectateur une véritable empathie. Même si le personnage cumule un peu tous les travers liés au sentiment maladif qui l’habite cela traduit un certain réalisme voire même un naturalisme qui donne au film une indéniable authenticité. En équilibre sur le fil ténu entre la comédie et le drame, Jalouse alterne les moments savoureux avec des situations ambigües qui nous font ravaler nos rires l’instant d’après.

La mise en scène de David et Stéphane Foenkinos est, comme pour La Délicatesse, au service du propos et sait s’effacer pour laisser le fond prendre le pas sur la forme. Bien écrit, doté de dialogues brillants, d’une irrésistible drôlerie, les Foenkinos dressent un portrait très fin en trois parties qui confirme leur sens de l’observation et leur acuité.  Le réalisme psychologique prévaut dans Jalouse qui selon ses auteurs pourrait être dans une tonalité qui se situerait entre Tatie Danielle (Etienne Chatilliez, 1990) et Une femme sous Influence (John Cassavetes, 1974). Si Karin Viard est, on l’a dit, absolument parfaite, la distribution qui l’entoure est à l’avenant, confirmant la qualité des choix effectués par les réalisateurs (Stéphane Foenkinos n’est pas un directeur de casting renommé pour rien). Que ce soit Thibault de Montalembert (qui après Aurore démontre qu’il sait choisir ses projets avec soin), Anne Dorval, Corentin Fila, Bruno Todeschini ou Marie-Julie Baup, chacun a un véritable personnage à défendre et aucun n’est le faire valoir du personnage principal. Et on insistera plus particulièrement sur les partitions d’Anaïs Demoustier, qui en quelques scènes parvient à en tenir tête à Karin Viard avec un aplomb incroyable et de Dara Tombroff qui joue la fille de Nathalie et réussit des débuts fracassants de naturel. Tendre, drôle et cruel, après La Délicatesse et Jalouse, les frères Foenkinos confirment leur appétence pour les portraits de femme atypiques. On a hâte de voir quelles seront leurs prochaines héroïnes.

Titre original: JALOUSE

Réalisé par: David & Stéphane Foenkinos

Casting: Karin Viard, Thibault de Montalembert, Anne Dorval

Genre: Comédie

Sortie le: 8 Novembre 2017

Distribué par : StudioCanal

EXCELLENT

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