SYNOPSIS: Dans le parc d’attractions d’épouvante Zombillénium, les monstres ont le blues. Non seulement, zombies, vampires, loups garous et autres démons sont de vrais monstres dont l’âme appartient au Diable à jamais, mais en plus ils sont fatigués de leur job, fatigués de devoir divertir des humains consuméristes, voyeuristes et égoïstes, bref, fatigués de la vie de bureau en général, surtout quand celle-ci est partie pour durer une éternité… Jusqu’à l’arrivée d’Hector, un humain, contrôleur des normes de sécurité, déterminé à fermer l’établissement. Francis, le Vampire qui dirige le Parc, n’a pas le choix : il doit le mordre pour préserver leur secret. Muté en drôle de monstre, séparé de sa fille Lucie, et coincé dans le parc, Hector broie du noir… Et si il devenait finalement la nouvelle attraction phare de Zombillénium ?
C’était l’un des événements animés de l’année 2017, et l’un de ceux sur lesquels on misait quelques espoirs incertains. En effet, dès qu’un dessin animé à vocation familiale se permet de lorgner du côté de genres cinématographiques à vocation adolescente (surtout le genre horrifique), on croise les doigts avec un petit fond de trouille : va-t-on avoir droit à de l’exploitation sincère ou à de l’aseptisation pour ménagères ? Le risque existe toujours, mais dans le cas présent, on se retrouve face à un compromis qui rassure. Plus généralement, à la question « pourquoi offrir aux gamins des films d’animation moralisateurs et consensuels ? « , le long-métrage très attendu d’Arthur de Pins et Alexis Ducord offre une très belle réponse. Et un très beau démenti, surtout. Après avoir fait effet à Cannes et mis le feu au festival d’Annecy (où le film provoqua une séance d’ouverture des plus électrisantes), nul doute que Zombillénium saura électriser autant les jeunes que les adultes, les premiers n’étant clairement pas pris pour des vaches à lait (manger autre chose que de la morale pour cul-bénits leur fera le plus grand bien), les seconds ayant bien des raisons d’y trouver matière à stimulation (guetter de petites piques sociopolitiques par-ci par-là leur évitera de se tourner les pouces).
Inspiré d’une bande dessinée éponyme en trois tomes, Zombillénium part d’un concept assez mortel, pour le coup à cheval entre pure comédie et trip horrifique. Imaginez un parc d’attractions où se sont reconvertis les vampires, les loups-garous, les sorcières, les zombies, les diables et autres créatures en général vouées à surcharger les cauchemars de vos marmots. Imaginez maintenant qu’un jeune contrôleur un peu trop tatillon – il s’était mis en tête de faire fermer ce parc – se retrouve changé en monstre et contraint d’intégrer à son tour la faune de ce parc. Imaginez enfin à quel point le quotidien va être dur entre faire tout pour revoir sa fille humaine et aider le parc à sortir d’une situation économique très épineuse (en gros, il faut désormais créer des attractions qui fassent réellement peur). A partir d’un tel canevas, les deux réalisateurs ont pris le choix judicieux d’éviter tout parti pris d’adaptation pure et simple de la BD. En effet, loin d’en reproduire à l’identique la trame initiale (la preuve : le personnage principal n’est plus du tout le même !), le film Zombillénium offre au contraire une réinvention intelligente de la BD, tout en pensant chaque scène en relief et en scénographie.
Ce qui frappe le plus au premier regard est clairement le rythme effréné dont fait preuve la narration, assimilant le résultat à un gigantesque rollercoaster de 78 minutes qui ne perd pas de temps à installer ses enjeux et ses personnages. Il suffit ici d’un éblouissant générique de début pour poser les bases de la légende au cœur du récit, d’une introduction ultra-dynamique pour introduire à peu près tous les personnages, et de trois situations parfaitement écrites et exposées pour que les codes de la comédie parentale (avec rébellion et déboires en cascade) se mixent avec efficacité à ceux de l’aventure horrifique. Ça va donc vite. Très vite. Trop vite ? En un sens, la générosité du film l’emporte sans peine sur la sensation de le voir se précipiter dans sa narration. Non pas que le film évite de traiter son propos à double – voire triple – tête, mais on le sent quand même un peu trop gourmand, peu attentif à tous ses seconds rôles (et il y en a un paquet !) et trop exclusivement recourbé sur son trio de tête (un héros cornu, une sorcière à balai-skateboard, et un bôgoss à dents longues). Au vu d’une durée aussi courte, il est facile d’y voir là le gros défaut du film. Un défaut qui, pourtant, ne fait pas long feu devant le plaisir du voyage, entre des idées brillantes (les clins d’œil à Pierre Bachelet ou au clip Thriller de Michael Jackson font un sacré effet) et une animation optimale (le graphisme de la BD coule de source dans un style animé qui joue beaucoup sur les reliefs plats et les échelles de plan). De même que certaines idées assez géniales contribuent à épicer le voyage en intervenant au moment le plus opportun – mention spéciale à une représentation du diable par un écran qui crache des flammes !
Pour un public plus réceptif à la dissection d’un genre populaire et des mythologies que le sous-tendent depuis toujours, nul doute que le parti pris du scénario parlera au plus grand nombre. En effet, les enjeux de survie du parc sont ici l’objet d’une opposition entre deux visions de l’horreur, la première classique et viscérale (en gros, on fout la trouille à tout le monde), la seconde glamour et radicale (en gros, on vise un public de midinettes, on chatouille le spectre de la ségrégation et on abuse du marketing grossier). Pour tous ceux que l’érotisme pasteurisé et mormon de l’immonde saga Twilight aura traumatisés à vie, un tel discours ne manquera pas de sonner comme une revanche. Et même si – film familial oblige – l’horreur ne touchera ici que les gens dans l’écran et non pas devant l’écran (ne vous attendez pas à un film terrifiant), le ton fun et musicalement enragé qui parcourt le film d’un bout à l’autre suffit à créer l’illusion. D’une flopée de scènes d’action qui filent un joli vertige jusqu’à une bande originale mortellement rock à transformer la salle de cinéma en concert (on parie que vous allez surkiffer le Stand as one de Mat Bastard ?), Zombillénium assume à fond sa dimension de grand-huit, davantage prompt à fournir de jolies sensations fortes que de vraies sueurs froides. C’est le concept même d’une attraction – horrifique ou pas. Alors, à quoi bon se plaindre ?
Titre Original: ZOMBILLÉNIUM
Réalisé par: Arthur De Pins & Alexis Ducord
Casting : Emmanuel Curtil, Alain Choquet, Kelly Marot …
Genre: Animation
Sortie le: 18 octobre 2017
Distribué par: Gebeka Films
TRÈS BIEN
Catégories :Critiques Cinéma
J’ai bien envie de le voir !