Critiques Cinéma

SILENT RUNNING (Critique) Festival Chic Planète

4 STARS EXCELLENT

SYNOPSIS: En 2001, la végétation a disparu de la Terre suite à une guerre nucléaire. Pour remédier à cet état de fait, on cultive de grandes serres en espérant ensuite les réimplanter librement à la surface. C’est à cette tâche que se consacre le botaniste Freeman Lowell à bord du vaisseau spatial Valley Forge. Mais un jour, la décision tombe : les serres doivent être détruites pour des raisons économiques…

Nous terminons le Festival Chic Planète, comme nous l’avions commencé avec Phase IV (Saul Bass, 1974), par la découverte du premier film d’une légende du cinéma qui avait jusqu’alors mis son talent au service des plus grands réalisateurs. On doit en effet à Douglas Trumbull les effets spéciaux de trois des plus grands chefs d’œuvre de la science fiction: 2001 l’Odyssée de l’Espace (Stanley Kubrick, 1968) , Blade Runner (Ridley Scott, 1980) et E.T (Steven Spielberg, 1981). A l’instar de Saul Bass avec Phase IV, Douglas Trumbull  est passé à la réalisation pour porter à l’écran un film éminemment personnel, non exempt de maladresses mais dont les effets spéciaux artisanaux continuent d’impressionner et dont la force et la sincérité du propos le protègent contre les outrages du temps.

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Reposant sur le postulat que la course à l’industrialisation finira par l’emporter sur la sauvegarde de la nature, que le plein emploi ainsi garanti ne se fera pas sans le sacrifice de notre bien commun le plus précieux, Silent Running présente une version cauchemardesque mais toutefois crédible de ce qui nous guette si nous ne changeons pas notre mode de consommation. Avec ce récit Douglas Trumbull revisite le mythe de l’arche de Noé. La terre n’est pas devenue inhabitable par un déluge déclenché par un Dieu punissant l’homme pour ses pêchés, mais bien par l’homme qui a fait le choix conscient d’hypothéquer son avenir pour continuer à se développer. Bruce Dern (Freeman Lowell) jusqu’ici plutôt cantonné à des rôles de psychopathes ou de criminels, endosse la robe de bure du Noé de ce récit, celui en charge de s’occuper de cette nature emportée dans l’espace dans des gigantesques serres. Les autres membres de cette expédition, chargée de préserver les derniers vestiges d’une nature pour laquelle la terre est devenue inhospitalière, tuent le temps en jouant aux cartes ou en faisant des courses à bord des véhicules leur permettant de se déplacer à bord de cet immense vaisseau spatial. Freeman est le seul à prendre au sérieux cette mission et à ne pas se résigner à retrouver les forêts de son enfance. Il est le dernier des écologistes dans ce monde dans lequel le cynisme a triomphé. Il est l’idéaliste jusqu’au-boutiste qui refuse de voir disparaître ce qui faisait le prix de nos existences. Il est surtout clairement le doppelganger de Douglas Trumbull dont il incarne le message et les idéaux. La grande subtilité du jeu de Bruce Dern et son charisme permettent que ce personnage pourtant presque sanctifié dans la première partie du récit ne soit extrêmement lisse.

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Le parti pris du film est clair et radical et il faut accepter cette forme de naïveté dans le propos et la mise en scène, sous peine de décrocher rapidement dès la première scène où Freeman admire ses plantations et communie avec les animaux, le tout illustré par une chanson très datée/ mièvre de Joan Bez. Trumbull a moins d’égard pour les collègues de Freeman que pour ses véritables compagnons dans cette mission, les seuls qui s’acquittent consciencieusement de leur tâche: Riri, Fifi et Loulou (Huey, Louie et Dewey  en Version Originale). Rebaptisés ainsi par Freeman, ces 3 petits robots au design improbable (dont on dit qu’ils inspirèrent Georges Lucas pour R2D2) et à la façon de se déplacer si particulière, étaient animés par des personnes amputées. Contrairement à 2001 l’Odyssée de l’espace auquel collabora Trumbull, ces machines sont parfaitement fiables et obéissent à leur programmation. Elles peuvent tout aussi bien réparer la navette, que planter un petit arbre, jouer au poker ou pratiquer des opérations. Le capital sympathie de ces petits robots est immense et il rejaillit grandement sur le film.

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Lorsqu’est annoncée la décision de détruire les serres et de mettre fin à la mission, les membres de l’équipage se réjouissent de retourner sur cette terre devenue stérile alors que Freeman voit là son dernier espoir balayé avec le même cynisme, la même logique qui a conduit la terre à ce désastre écologique. Dans l’espace, personne ne l’entendra crier sa colère, plus contenue mais pas moins forte que celle de George Taylor (Charlton Heston) dans l’inoubliable scène finale de la Planète des Singes (Franklin J.Schaffner, 1968). Son refus de céder à l’injonction de détruire toutes les serres est celui d’un homme qui refuse de transiger sur ses idéaux et ses valeurs même s’il sait qu’ils n’ont aucune chance de triompher. Lorsqu’il se retrouve bientôt le seul être humain à bord de ce vaisseau, il incarne le dernier irréductible, le dernier espoir de l’espèce humaine. Une sorte de mélancolie envahit le film durant son dernier tiers, le spectateur est placé dans une situation assez inédite, où il sait qu’il n’y a pas de fin heureuse à attendre mais reste complètement absorbé par ce récit, contemplant ce qu’il reste d’humanité dans ce qu’on espère n’être qu’une dystopie et pas une funeste prédiction. Silent Running n’a peut être pas la puissance et la maîtrise d’autres films de SF écologistes de cette décennie mais il aura toujours une place à part dans nos cours, en plus d’avoir offert l’un de ses plus beaux rôles à ce magnifique acteur qu’est Bruce Dern.

Titre Original: SILENT RUNNING

Réalisé par: Douglas Trumbull

Casting : Bruce Dern, Cliff Potts, Ron Rifkin ….

Genre: Science fiction, Drame

Sortie le: 3 décembre 1975

Distribué par: –

EXCELLENT

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