Critiques Cinéma

PHASE IV (Critique) Festival Chic Planète

SYNOPSIS: Un mystérieux signal est lancé de l’espace. Sur Terre, dans le désert d’Arizona, des fourmis noires d’une espèce inconnue attaquent les humains.

Pour sa première édition, le festival Chic Planète qui se déroule du 1er mars au 13 avril au Forum des Images, présente une programmation enthousiasmante, au sein de laquelle un grand nombre de classiques de la science fiction (Soleil Vert, Blade Runner, La planète des singes, La planète des Vampires, E.T , …) que beaucoup d’entre nous ont découvert en vidéo vont enfin pouvoir être redécouverts sur grand écran. Durant ce festival, nous avons fait le choix de vous parler de films de science fiction moins connus, dont la première vision alors que nous étions encore des adolescents consommateurs de VHS a profondément marqué notre cinéphilie: L’homme qui venait d’ailleurs de Nicolas Roeg, Silent Running de Dalton Trumbo, Dark Star de John Carpenter et Phase IV de Saul Bass.

Nous commençons donc les chroniques de ce festival avec le film d’un réalisateur dont le nom est entré dans la légende pour les génériques qu’il créa pour quelques uns des plus grand maîtres: Billy Wilder (7 ans de réflexion) Otto Preminger (L’homme au bras d’or, Autopsie d’un meurtre), Alfred Hitchcock (La mort aux trousses, Vertigo, Psychose), Stanley Kubrick (Spartacus). Martin Scorsese avec lequel il collabora sur 4 films (Les Affranchis, Les Nerfs à Vif, Casino, Le temps de l’innocence) a parfaitement résumé l’importance du travail de Saul Bass « ses génériques ne sont pas de simples étiquettes sans imagination, comme c’est le cas de nombreux films. Bien plus, ils font partie intégrante du film en tant que tel. Quand son travail apparaît à l’écran, le film lui-même commence vraiment ».

Si chacune des grandes œuvres auxquelles il collabora porte donc sa marque, Phase IV, son unique réalisation, est une merveilleuse occasion de voir son talent à l’œuvre sur toute la durée d’un long métrage. Lorsqu’il sort en 1974, Phase IV témoigne de cette évolution des films de science fiction américain sortis dans les années 70. La menace ne vient plus d’une créature venue de l’espace pour nous détruire mais de la destruction/mutation de notre environnement et de la folie de l’homme (Le Cerveau d’Acier en 1970, The Omega Man en 1971, Silent Running en 1972, Soleil Vert en 1973). Phase IV a un postulat de départ intéressant qui finit malheureusement par se diluer face à la volonté d’expérimentation visuelle de Saul Bass. La frontière entre le film de science fiction et le film conceptuel n’est en effet pas toujours étanche. Cela finit par nous donner le sentiment que l’histoire n’est pas loin d’être secondaire et de servir avant tout de prétexte aux idées visuelles de son metteur en scène, par ailleurs peu à l’aise dans la direction d’acteurs. Phase IV est une sorte de mix improbable entre un livre de Bernard Werber (l’auteur de la trilogie des fourmis) et un scénario de Dan O’Bannon (Alien). La menace ne vient pas de l’espace mais de fourmis qu’une inquiétante et inexpliquée mutation transforme en une armée de tueuses, communiquant entre elles, élaborant des stratégies pour étendre leurs colonies.

Saul Bass ouvre son film par ce qui ressemble alors à un documentaire sur les fourmis, celles-ci étant filmée en macro, dans leur environnement. En nous immergeant dans cette société invisible, dont une voix off (celle d’Ernest D.Dubbs, l’un des deux scientifiques du récit) nous avertit de la menace qu’elle représentera bientôt pour les nôtres, Saul Bass réussit à installer le climat de peur et de paranoïa qui constitue l’ingrédient clé de la réussite de ce type de film. Filmées comme des aliens préparant une invasion, ces fourmis représentent une menace tangible mais invisible que deux scientifiques, enfermés dans leur laboratoire installé en Arizona, au milieu d’une zone dont les habitants ont été évacués, vont essayer de contrecarrer. Le parti pris est le même que dans Le Mystère Andromède (Robert Wise,1971): suivre, en quasi huis clos, des scientifiques dont les recherches constituent peut être le dernier espoir d’une humanité qui ne se sait pas encore menacée. Le temps est toutefois beaucoup plus étiré que dans le chef-d’œuvre de Robert Wise dont la tension dramatique ne faiblit jamais. Cette menace tangible au début du film, cette solide ambiance paranoïaque renforcée par l’utilisation habile de la voix off et la musique de Brian Gascoigne (qui composa celle de La Forêt d’Émeraude de John Boorman) est fragilisée par les baisses de rythme d’un récit dont Saul Bass semble se détacher pour soigner ses cadres et expérimenter des effets qui n’ont pas tous bien vieillis. Ses deux acteurs, Nigel Davenport (Ernest D.Dubbs) et en particulier Michael Murphy (James Lesko) sont parfois un peu livrés à eux mêmes, ne parvenant pas à faire illusion dans des personnages qui ne sont guère développés. En vérité, Saul Bass s’intéresse moins à ces scientifiques, rejoints ensuite par une jeune survivante, qu’aux fourmis et à la façon dont elles s’adaptent, déjouent les attaques pour prendre le dessus et retourner le rapport de force. C’est dans ces scènes, quand il adopte le point de vue des fourmis et dans la façon dont Saul Bass joue sur les changements d’échelle, que le film est le plus efficace. L’infiniment petit est infiniment plus intelligent et passionnant que ces deux scientifiques prisonniers de leur laboratoire et de leurs certitudes, pensant pouvoir décoder, dominer le comportement de cette espèce qui leur est inférieure. Avec une grande économie de dialogues et une part prépondérante laissée à l’image, aux expérimentations visuelles, le film de Saul Bass gagne beaucoup à être vu en salle où il donne réellement sa pleine mesure. Ses défauts nous empêchent toutefois, loin s’en faut, de le considérer comme l’égal des grands films de science fiction de cette passionnante décennie.

Titre Original: PHASE IV

Réalisé par: Saul Bass

Casting :  Nigel Davenport, Michael Murphy, Lynne Frederick…

Genre: Fantastique

Sortie le: Reprise 13 septembre 2017

Distribué par: Swashbuckler Films

BIEN

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